Quand Bombardier refuse des commandes

Publié le 16/06/2012 à 00:00, mis à jour le 14/06/2012 à 09:38

Quand Bombardier refuse des commandes

Publié le 16/06/2012 à 00:00, mis à jour le 14/06/2012 à 09:38

À moins d'un mois du Salon international de l'aéronautique de Farnborough, en Grande-Bretagne, la confiance règne chez Bombardier à propos de sa nouvelle famille d'avions CSeries.

À tel point qu'aujourd'hui l'avionneur montréalais s'offre le luxe de refuser des commandes, a confié mardi le président et chef de la direction de Bombardier, Pierre Beaudoin, au cours d'une table éditoriale avec Les Affaires.

Fort d'un carnet de 138 commandes fermes et de 170 options d'achat et lettres d'intention, Bombardier serait parvenue à une étape de son développement où, paradoxalement, toutes les nouvelles commandes d'aéronefs ne sont pas nécessairement les bienvenues.

Son président explique que le calendrier de production de cette nouvelle gamme d'appareils, de 100 à 150 sièges, prévoit la livraison de 30 appareils en 2014, de 60 autres en 2015 et de 120 en 2016. Avec une telle cadence de production, a-t-il fait valoir, Bombardier ne peut accepter beaucoup plus de nouvelles commandes d'appareils à brève échéance.

«On ne peut pas vraiment accélérer le rythme, dit Pierre Beaudoin. Ce serait risqué du point de vue financier, de la fiabilité [de l'appareil] et ainsi de suite. Il y a une certaine courbe d'apprentissage à respecter. Faire autrement serait une erreur. On a assez d'expérience dans ce genre de produit-là pour le savoir.»

Certes, nuance le président, Bombardier ne crachera jamais sur de nouvelles ventes. La multinationale en a fait la démonstration cette semaine en bouclant une transaction monstre qui pourrait atteindre 7,3 milliards de dollars américains pour 275 de ses avions (Challenger et Global), la plus importante commande jamais enregistrée dans toute l'histoire de l'aviation d'affaires. Celle-ci a fait progresser son titre de 6 % mardi dernier, à la Bourse de Toronto.

Par contre, l'homme fort de Bombardier a reconnu que les prochaines commandes de CSeries, en particulier celles qui sont vendues à prix de lancement (en escompte), devront répondre à des critères stratégiques.

Par exemple, M. Beaudoin dit souhaiter obtenir de nouvelles commandes d'une entreprise de Chine, un pays aux possibilités titanesques et pourtant encore absent de son carnet de commandes.

La rentabilité des commandes est aussi décisive. «Je comprends que certains clients veuillent profiter de prix de lancement. Pour une commande de 25 appareils, assortie de 25 autres en option, ça m'intéresse. Mais pour une commande de 100 avions, plus 100 autres en option, à livrer sur une période de dix ans, pas vraiment.»

M. Beaudoin se défend de faire ainsi la fine bouche devant des clients potentiels. Mais il avoue d'un même souffle avoir dû mettre fin à des discussions portant sur des commandes importantes, après que l'équipe de direction eut jugé que de telles transactions n'étaient pas intéressantes pour l'entreprise.

«Dans de tels cas, il faut se dire qu'il va y en avoir d'autres [...] Je ne vois pas l'intérêt de Bombardier de sauter sur de telles commandes. Nous sommes en bonne position. Nous travaillons en fonction du long terme. Les grosses commandes qui font beaucoup de bruit ne nous intéressent pas. Une fois le contrat signé, c'est nous qui devrons livrer [les avions] et surtout, ce faisant, trouver le moyen de faire de l'argent.»

La stratégie des petits pas, ou «par étapes», est donc celle que préconise le petit-fils de J.-Armand Bombardier, inventeur de la motoneige, devenu grand patron d'une multinationale de 18 G$ US de revenus et quelque 70 000 employés partout sur la planète.

Le prochain objectif de Bombardier est de parvenir à réaliser les premiers vols d'essai de ses avions CSeries d'ici la fin de 2012. Si tout va bien, la première livraison suivra avant la fin de décembre de 2013. «Même si nous avions trois à cinq mois de retard, je considérerais que nous avons respecté notre échéancier», a commenté M. Beaudoin, rappelant que les constructeurs Airbus et Boeing étaient «particulièrement mal placés» pour lui reprocher quoi que ce soit en la matière. La dernière couvée de chacun de ces deux concurrents (l'A380 et le B787) a été livrée avec plusieurs années de retard.

Après trois ans de rodage, en 2016, Bombardier prévoit une cadence de production de 120 appareils par an, pouvant être augmentée à un appareil par jour ouvrable. Le prix de vente affiché du CS100 (115 sièges) est de 58,28 millions de dollars américains, alors que celui du CS300 (135 sièges) est de 66,57 M$ US.

Au plus fort de sa production, en 2017, Bombardier s'attend à ce que le programme d'avions CSeries fasse vivre 3 500 personnes dans ses usines de Montréal et de Mirabel, en plus de 800 autres travailleurs à Belfast, en Irlande du Nord.

«Nous travaillons en fonction du long terme (avec la CSeries). Les grosses commandes qui font beaucoup de bruit ne nous intéressent pas.»

RYTHME DE PRODUCTION ANNUELLE DU CSERIES

30 appareils en 2014

60 appareils en 2015

120 appareils en 2016

138 COMMANDES FERMES ET 170 OPTIONS D'ACHAT ET LETTRES D'INTENTION

BRAATHENS AVIATION/MALMÖ (10)

DEUTSCHE LUFTHANSA (30)

KOREAN AIR (10)

LEASE CORPORATION INTERNATIONAL (20)

PRIVATAIR (5)

REPUBLIC AIRWAYS (40)

CLIENT NON IDENTIFIÉ (23)

martin.jolicoeur@tc.tc

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