Nos entreprises manquent de combativité concurrentielle

Publié le 16/04/2011 à 00:00

Nos entreprises manquent de combativité concurrentielle

Publié le 16/04/2011 à 00:00

Le fardeau fiscal des entreprises est un facteur important de la compétitivité d'un pays.

C'est pour cette raison que le gouvernement Harper projette de faire passer le taux général d'impôt fédéral sur les profits des grandes sociétés de 16,5 à 15 % en 2012. Les PME paient des taux encore plus bas. En y ajoutant l'impôt provincial, le taux nominal sur les profits des grandes entreprises sera d'environ 25 %, ce qui fera du Canada le pays du G7 taxant le moins les profits de ses entreprises.

La stratégie fiscale du Parti conservateur repose sur la théorie voulant que les entreprises accroissent leurs investissements en machinerie et en équipement selon l'encaisse dont elles disposent. C'est aussi la thèse défendue par les Manufacturiers et Exportateurs du Canada (MEC), un des plus importants lobbies d'affaires du pays.

Cette politique ne reçoit toutefois pas l'appui du chef libéral Michael Ignatieff, qui a promis de ramener le taux d'imposition sur les profits des grandes sociétés à 18 % si son parti prend le pouvoir aux prochaines élections. Ni celui du NPD de Jack Layton, qui préconise de revenir au taux de 2008, qui se situait à 19,5 %.

Accroître l'encaisse aux dépens de la productivité

Même si la position du Parti conservateur sur cette question est conforme à la doctrine capitaliste, dont s'inspirent la plupart des gouvernements des pays industrialisés pour stimuler la compétitivité de leur pays, des données récentes de Statistique Canada semblent plutôt donner raison aux partis de l'opposition. En effet, les entreprises canadiennes sont davantage portées à accroître leur encaisse qu'à investir dans l'accroissement de leur productivité, ce qui stimulerait la concurrentialité de l'économie canadienne.

En effet, selon une analyse récente de certaines données de Statistique Canada par The Globe and Mail, les sociétés canadiennes ont augmenté leur encaisse globale de 83 milliards de dollars depuis 2008, début de la dernière récession, tandis qu'elles réduisaient en pourcentage du produit intérieur brut (PIB) canadien leurs investissements en machinerie et en équipement. Ces investissements représentaient l'an dernier 5,5 % du PIB canadien par rapport à 6,8 % en 2005 et à 7,7 % en 2000.

Selon MEC, les investissements annuels des manufacturiers en machinerie et en équipement ont chuté de 37 % au cours de la décennie. De plus, alors que le PIB canadien a progressé de 55 % de 1999 à 2009, les investissements des entreprises en technologie n'ont augmenté que de 14 % au cours de la même période. Et tout cela s'est produit lors d'une forte appréciation du dollar canadien, rendant plus abordables les achats à l'étranger d'équipements de production, d'ordinateurs et d'autres appareils utilisant des technologies avancées, ce qui aurait aidé les entreprises à devenir plus productives.

Ces données alarmantes expliquent le recul relatif de la productivité (valeur de la production par heure travaillée) des sociétés canadiennes, qui correspondait à 76 % de celle de leurs concurrentes américaines en 2007, comparativement à 93 % en 1984. En résumé, la productivité des sociétés canadiennes a crû de 1 % au cours de la dernière année, par rapport à 2 % aux États-Unis.

Un examen de conscience s'impose

Outre notre investissement insuffisant en machinerie et en équipement, la faiblesse de notre productivité s'explique par d'autres facteurs, dont la petite taille de nos usines, le faible investissement du secteur privé en R-D (alors que l'État engage pourtant beaucoup d'argent dans la recherche fondamentale), notre difficulté à valoriser la recherche universitaire et la fragmentation du marché canadien. Aussi, le fait qu'une forte proportion de nos entreprises oeuvrent en amont de la chaîne d'approvisionnement plutôt qu'à proximité des marchés de consommation, le manque de capital de risque (0,12 % du PIB, soit la moitié du ratio d'autres pays) et l'insuffisance de dynamisme de notre culture entrepreneuriale et concurrentielle, en regard de celle des Américains, nuisent à nos entreprises.

Bien entendu, les groupes de pression et les consultants en crédits d'impôt à la R-D demandent encore plus d'aide fiscale. Toutefois, avant d'acquiescer à cette demande, Ottawa doit attendre les résultats du groupe de travail sur la réforme de ce système de crédit d'impôt, qui donne lieu à du gaspillage et à de la fraude.

Plusieurs entreprises ont un examen de conscience à faire. L'argent n'est pas une panacée au manque de productivité. Elles doivent plutôt se pencher sur l'innovation et travailler aux facteurs qui les rendront plus combatives sur les marchés.

MON COMMENTAIRE

J'aime

Maintenant que le Conseil supérieur de la langue française a donné son appui au libre choix de la langue d'enseignement dans les cégeps, il faut espérer que les opposants à l'accès des francophones à un cégep anglais abandonnent leur combat d'arrière-garde. Il ne faut pas croire que l'avenir du français soit menacé parce que 5 % de francophones s'inscrivent à un cégep anglophone.

Je n'aime pas

Le triage partisan des personnes qui peuvent ou non assister aux assemblées du chef du Parti conservateur Stephen Harper, parfois avec la complicité de la Gendarmerie royale du Canada (faut-il s'en surprendre?), est odieux. Ce comportement est antidémocratique, comme l'est le confinement des journalistes dans certaines salles ou dans des autobus pendant que le chef conservateur se prête à des activités en compagnie de citoyens. Cette attitude est indigne d'un chef de parti aspirant à la plus haute fonction politique de son pays.

jean-paul.gagne@transcontinental.ca

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