Les clients technos essoufflent les détaillants

Publié le 16/06/2012 à 00:00, mis à jour le 14/06/2012 à 09:30

Les clients technos essoufflent les détaillants

Publié le 16/06/2012 à 00:00, mis à jour le 14/06/2012 à 09:30

Les détaillants sont préoccupés par la faiblesse de leurs ventes, mais la technologie les inquiète au moins autant, sinon davantage. Plusieurs se demandent comment suivre le rythme effréné des consommateurs qui changent leurs habitudes de magasinage et augmentent sans cesse leurs attentes. C'est ce que Les Affaires a constaté en participant à deux événements organisés pour l'industrie, au début de juin.

ALDO S'ORGANISE POUR NE PERDRE AUCUNE VENTE

«Les clients achètent une marque, pas un canal de distribution. Ils se fichent du lieu où se trouvent les stocks», croit le président de Groupe Aldo, David Bensadoun, invité par l'International Council of Shopping Centers à expliquer ses stratégies d'affaires.

Quitte à réaliser des marges de profit un peu moins élevées, Aldo investit donc dans le «cross-channel», un système plus complexe, mais qui sert mieux les clients que le «multi-channels».

Selon ce dernier principe, chaque canal de distribution - magasins, Internet, vente en gros - possède et gère ses propres stocks. Ainsi, le bien qui est en stock à l'entrepôt desservant le Web ne peut être vendu au client qui s'est présenté physiquement dans un magasin. Exactement ce type de situation frustrante qu'Aldo ne veut plus faire vivre à sa clientèle.

«Nous voulons nous assurer que nous ne perdrons plus jamais une vente. Nous allons faire moins d'argent, mais nous terminerons la transaction», a ajouté le fils du fondateur du groupe Aldo. Une bonne partie du chiffre d'affaires de l'entreprise provient de la vente de gros à Macy's, Nordstrom, La Baie et L'Aubainerie.

«LE DÉFI EST D'INVESTIR DANS LE SERVICE À LA CLIENTÈLE» - DIANE BRISEBOIS, PRÉSIDENTE DU CONSEIL CANADIEN DU COMMERCE DE DÉTAIL

Les Affaires - On dirait que la technologie force les détaillants à revenir à la base, c'est-à-dire offrir un excellent service à la clientèle. Est-ce une illusion ?

Diane Brisebois - Ironiquement, c'est le cas. La technologie permet d'être plus efficace, mais amène aussi des défis. Les attentes des clients changent rapidement, et les détaillants n'ont plus le droit à l'erreur. Si un client vit une mauvaise expérience, ça lui prend seulement cinq minutes pour partager ce qu'il a vécu sur les réseaux sociaux. En conséquence, c'est encore plus important qu'autrefois de bien former son personnel.

L.A. - Quel sera le plus grand défi des détaillants au cours des prochaines années ?

D.B. - Depuis 10 ou 15 ans, ils ont investi énormément dans les technologies, leur chaîne d'approvisionnement et la formation du personnel. Aujourd'hui, le défi est d'investir de l'argent dans le service à la clientèle, le commerce électronique et les systèmes informatiques qui vont les aider à mieux comprendre leurs clients. Ils doivent faire des études et des recherches. C'est un défi à cause de la petitesse du marché canadien. Plusieurs se demandent pourquoi il y a si peu de sites transactionnels au Canada... Les coûts sont les mêmes pour les détaillants américains que pour les détaillants canadiens dont le marché est 10 fois plus petit. Donc, ça leur coûte 10 fois plus cher !

L.A. - Quel est votre meilleur conseil à l'intention des détaillants ?

D.B. - De ne jamais s'isoler. Les détaillants passent beaucoup de temps entre quatre murs. Or, ils doivent participer à des conférences, étudier ce que font d'autres secteurs comme les télécommunications et les technologies, qui sont des précurseurs. Il ne faut pas juste baigner dans le commerce de détail 24 heures sur 24. Il faut penser et voir plus large et s'inspirer des meilleures pratiques d'autres industries.

LES CENTRES COMMERCIAUX FORCÉS D'INNOVER

Loin d'être découragés par la popularité des achats en ligne et la baisse d'intérêt pour les grandes surfaces, les centres commerciaux y voient plutôt l'occasion de se réinventer, selon le président du CA de l'International Council of Shopping Centers, Brad M. Hutensky. «C'est positif. Tout cela nous donne l'occasion de rénover nos propriétés.»

Les années pendant lesquelles les centres commerciaux poussaient comme des champignons semblent bel et bien révolues. D'ailleurs, M. Hutensky prévoit que les propriétaires de centres commerciaux consacreront de 90 à 95 % de leur budget en rénovation, et moins de 10 % en construction d'immeubles locatifs. «Quel est l'intérêt de construire des locaux plus grands que nécessaire ?» demande-t-il.

Par-dessus tout, les propriétaires de centres commerciaux craignent que l'achalandage dans les magasins diminue, car cela se traduit généralement par des ventes moindres. Mais plutôt que de voir le Web comme une arme de destruction massive de l'achalandage, les 55 000 membres de l'ICSC croient «que les magasins qui utiliseront Internet habilement pour amener des clients en magasin et stimuler leurs ventes seront plus forts».

Autre grande tendance : les consommateurs commencent à préférer les commerces de proximité au détriment des grandes surfaces. La tendance heurte de plein fouet un géant du commerce de détail comme Rona, qui a été forcé de fermer de grandes surfaces et d'inventer des concepts de proximité. M. Hutensky croit que l'espace ainsi libéré peut permettre aux centres commerciaux d'attirer de nouveaux types de locataires comme des cliniques ou des entreprises de divertissement.

Store 2010

Conseil canadien du commerce de détail

Toronto (4-5 juin)

Près de 900 personnes

Conférence annuelle du Québec

International Council of Shopping Centers (ICSC)

Montréal (6 juin)

Plus de 1 000 personnes

LE «CLIENT 3.0» CAUSE DES MAUX DE TÊTE

«Les clients voient l'excellence du rapport qualité/prix comme un droit, et non pas un privilège, car ils sont capables de comparer rapidement les prix.»

- Joe Jackman, conseiller stratégique et créatif de Joe Jackman Brand.

«La technologie change la façon dont nous faisons des affaires. Ma fille de 24 ans est étonnée de voir que mes clients lisent notre circulaire en papier. Jamais elle ne tournerait les pages d'une telle circulaire.»

- Stephen G. Wetmore, président et chef de la direction de Canadian Tire

marie-eve.fournier@tc.tc

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