Les caisses de retraite dans le rouge

Publié le 01/10/2011 à 00:00

Les caisses de retraite dans le rouge

Publié le 01/10/2011 à 00:00

Du 1er janvier dernier au 23 septembre, le ratio de financement des régimes de retraite au Canada a dégringolé de 94 à 77 %, selon Aon Hewitt. Les 23 % qui manquent pour atteindre 100 % représentent le pharaonique déficit comptable des régimes à prestations déterminées.

Ce recul s'explique en grande partie par des taux d'intérêt presque nuls et la baisse des marchés boursiers. En conséquence, de nombreux employeurs ont décidé de changer leur régime.

"En 2008, 24 % des régimes à prestations déterminées dans le monde avaient été transformés en régime à cotisations déterminées pour le service futur, affirme Étienne Dubé, actuaire et responsable de la pratique nationale de gestion des risques chez Aon Hewitt. Cette année, le pourcentage atteint 39 %. Et il est bien possible que cette tendance se poursuive."

"Il va falloir que les gens comprennent que leur retraite, c'est aussi leur responsabilité, lance Michel St-Germain, actuaire, partenaire de Mercer. Ce n'est plus possible de se fier uniquement aux régimes publics et aux employeurs."

L'annonce il y a quelques jours de la Banque Royale (cliente de Mercer) selon laquelle ses futurs employés bénéficieront d'un régime de retraite à cotisations déterminées alors que les employés déjà en poste pourront continuer à profiter de la Cadillac des régimes, soit à prestations déterminées, nous a brutalement rappelé à quel point les régimes de retraite à prestations déterminées pèsent lourd sur le bilan des organisations. Ces régimes garantissent le niveau de la rente, peu importe les rendements de la caisse de retraite, alors qu'avec les régimes à cotisations déterminées, la rente varie en fonction des rendements de la caisse.

L'annonce de la Banque Royale nous jette à la figure le défi colossal des baby-boomers de maintenir leur niveau de vie pendant 20, 25 et même 30 ans sans travailler. Un défi que devront relever toutes les sociétés industrialisées au cours des prochaines années. Un contexte démographique et social unique dans l'histoire de l'humanité, déstabilisée par une génération dont l'espérance de vie ne cesse d'augmenter.

Combler le déficit actuariel

La tendance à la transformation des régimes à prestations en régimes à cotisations s'est amorcée il y a quelques années, quand les déficits actuariels ont commencé à enfler. La loi oblige les entreprises à combler le déficit actuariel de leur régime à prestations déterminées en cinq ans au Québec, et en plus ou moins sept ans au fédéral.

Au Canada, on parle de dizaines de milliards de dollars de déficit dans le contexte troublant qui ne permet pas d'entrevoir le jour où les taux d'intérêt repartiront à la hausse. À lui seul, le déficit actuariel du régime de retraite de Postes Canada dépasse les trois milliards de dollars. En juin, celui d'Hydro-Québec s'élevait à 2,6 milliards. Celui de Rio Tinto Alcan, à 500 millions de dollars. Celui d'Air Canada, à 2,1 milliards. Celui des enseignantes et des enseignants de l'Ontario, à 17,2 milliards (en avril). La décision de la Banque Royale, qui a tout de même réalisé un bénéfice net de 5,22 milliards de dollars l'an dernier, risque d'avoir un effet d'entraînement angoissant pour des centaines de milliers de travailleurs canadiens.

"Il faut sortir du débat prestations contre cotisations", croit Lyne Duhaime, avocate chez Fasken Martineau qui a récemment publié Les aspects juridiques des régimes de retraite, chez CCH.

"Au Québec, les régimes de retraite existent depuis 1966. À cette époque, les hommes prenaient leur retraite à 65 ans et vivaient jusqu'à 71 ans, dit Mme Duhaime. Aujourd'hui, ils prennent leur retraite à 61 ans et vivent jusqu'à 81 ans. Les chiffres n'arrivent plus. Maintenir son niveau de vie pendant 30 ans sans toucher de revenu de travail, ce n'est pas réaliste."

L'épargne obligatoire

Il faudra innover pour s'en sortir. Selon M. St-Germain, une des solutions est l'épargne obligatoire. L'employeur aurait l'obligation d'offrir à ses employés un régime d'une institution financière. L'employeur ne serait pas tenu de mettre un sou dans le régime, mais les employés devraient y verser une partie de leur salaire, à moins de se retirer du régime.

De plus en plus d'experts pensent que c'est une solution avisée dans les cas où on considère que la population est incapable de gérer elle-même sa retraite.

L'Association canadienne des administrateurs de régimes de retraite (ACARR), pour sa part, croit qu'il est temps de remettre en question "l'opinion populaire" selon laquelle un revenu de retraite suffisant devait correspondre à au moins 70 % des revenus avant la retraite. "Il faut tenir compte des changements qui surviennent dans les dépenses entre la vie active et la retraite, comme les versements hypothécaires, les frais liés au travail, etc., et de la part importante du soutien de l'État, depuis la réduction des impôts jusqu'aux services d'aide à la vie autonome ce qui, en fait, augmente le revenu des retraités. Quand on pense que 60 % des revenus avant la retraite pourraient constituer un revenu à la retraite tout à fait adéquat, l'objectif est beaucoup plus facile à atteindre", écrit l'ACARR.

M. St-Germain croit qu'on peut maintenir son niveau de vie à la retraite avec 60 % de son revenu brut. "Moi, quand mes enfants étaient sous ma responsabilité, je vivais avec bien moins que 70 % de mon revenu. Maintenant que mes enfants sont autonomes et que ma maison est payée, je ne vois pas pourquoi j'aurais besoin de 70 % de mes revenus à la retraite."

"Maintenir son niveau de vie [pendant 30 ans] sans toucher de revenu de travail, ce n'est pas réaliste."

- Lyne Duhaime, Fasken Martineau

43 % des travailleurs ne contribuent pas à un régime de retraite d'employeur

57 % des travailleurs admissibles (environ 2 millions) participent à un régime collectif

42 % d'employés (1,5 million) adhèrent à un régime complémentaire de retraite

7 % ont un REER collectif (260 000)

3 % ont un régime de participation différée aux bénéfices (120 000)

5 % ont un autre type de régime (170 000)

Source : Régie des rentes du Québec (2008)

1000000 Nombre de travailleurs qui n'ont aucune épargne-retraite : rien chez l'employeur, aucun REER.

LE PLAN DE L'ACARR

L'Association canadienne des administrateurs de régimes de retraite (ACARR) représente 400 régimes de retraite comprenant trois millions de participants à des régimes totalisant des actifs sous gestion de 330 milliards de dollars. Elle a déposé l'an dernier le document "Améliorer la couverture en matière de revenu de retraite au Canada". Voici un résumé de son plan en cinq points :

1 Supprimer les obstacles législatifs, notamment pour donner accès à une couverture aux travailleurs autonomes et aux salariés dont l'employeur n'offre pas une telle couverture ;

2 Maintenir les régimes à prestations déterminées ;

3 Favoriser l'innovation. La souplesse des fournisseurs de régime est entravée par les règles, et leur capacité d'offrir des produits hybrides et d'autres nouveaux types de régime est limitée ;

4 Promouvoir la simplicité de l'administration. La complexité administrative est le principal facteur qui dissuade les employeurs, surtout les PME, d'offrir des régimes de retraite ;

5 Augmenter les mesures incitatives à l'épargne. Une plus grande équité à l'égard de ceux qui ne disposent pas de régime en milieu de travail pourrait favoriser davantage l'épargne, particulièrement chez les travailleurs autonomes.

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