Le plan de match de quatre stratèges pour 2012

Publié le 14/01/2012 à 00:00

Le plan de match de quatre stratèges pour 2012

Publié le 14/01/2012 à 00:00

Par Dominique Beauchamp

La Bourse a connu un bon départ en 2012, après une année tumultueuse où le S&P/TSX a perdu 11 %. Voici la stratégie de quatre experts pour tirer son épingle du jeu dans un marché encore très risqué.

1 Stéfane Marion

Financière Banque Nationale

Ses cibles

S&P 500 : 1 350 (+ 5,7 %)

S&P/TSX : 12 729 (+ 4,3 %)

Sa répartition suggérée

Actions : 53 %

Obligations : 38 %

Encaisse : 9 %

«Pour la première fois depuis longtemps, l'emploi s'améliore et les banques prêtent davantage aux États-Unis.»

Une année en trois temps

L'année 2012 pourrait évoluer en trois temps, prévoit Stéfane Marion, stratège de la Financière Banque Nationale.

Au début, les investisseurs attendront de voir 9 des 17 pays de la zone euro entériner leur nouveau pacte fiscal. La menace d'une implosion imminente du crédit s'atténuera. L'élan de l'économie américaine et les bénéfices des entreprises devraient aussi soutenir les cours, mais sans grand éclat. En millieu d'année, les Bourses devraient s'apprécier, car pacte en main, la Banque européenne déploiera ses fonds d'urgence. Les craintes de contagion mondiale par le système bancaire diminueront aussi.

Si ce scénario se produit, les économies des États-Unis et des marchés émergents croîtront suffisamment pour que l'économie mondiale progresse à un taux enviable de 3 à 3,5 % en 2012, prévoit M. Marion.

Les risques que les banques transmettent la crise européenne au reste du monde sont encore bien présents. Voilà pourquoi M. Marion conseille une encaisse (9 %) plus élevée que d'habitude (5 %) et un peu moins d'actions (53 %) que son portefeuille type (55 %).

«Même si les États-Unis connaissent une amélioration tangible de l'emploi et que les banques prêtent davantage, il est difficile d'adopter une approche plus fonceuse avant de savoir si le Congrès prolongera le congé fiscal de 2 % sur la masse salariale qui finance la sécurité publique», explique-t-il.

Plus tard en 2012, les investisseurs s'inquiéteront de nouveau des compressions budgétaires que le gouvernement américain devra à son tour imposer en 2013.

L'optimisme prudent de M. Marion mène à des choix de placement mixtes. Ainsi, au Canada, il suggère le fonds négocié en Bourse Claymore Dividend (Tor., CDZ, 21,63 $) pour bénéficier des rendements réguliers des dividendes et le fabricant de pièces d'or et d'argent Royal Canadian Mint (Tor., MNT, 19,07 $) pour miser sur la valeur refuge du métal jaune.

Aux États-Unis, sa stratégie combine deux secteurs opposés. Le fonds négocié en Bourse des pharmaceutiques est un choix prudent de titres à l'évaluation attrayante et qui versent de bons dividendes.

La création de 760 000 emplois à temps plein depuis six mois pourrait ressusciter l'immobilier. Pour les téméraires, M. Marion suggère le FNB des fabricants de maisons (NY, XHB, 18,35 $ US).

Pour la portion d'obligations (32 %), il suggère 13,5 % d'obligations fédérales, 9,6 % d'obligations provinciales, 9 % d'obligations de sociétés et 6 % d'obligations à rendement réel.

2 Pierre Lapointe

Brockhouse Cooper

Ses cibles

S&P 500 : 1 125 (- 7 %)

S&P/TSX : 10 500 (- 9 %)

Sa répartition suggérée

Actions : 50 %

Obligations : 35 %

Encaisse : 15 %

«Mieux vaut être prudent parce que les Bourses ne reflètent pas pleinement la possibilité qu'une nouvelle crise de crédit fasse retomber l'économie mondiale en récession.»

L'austérité devient un frein

L'économie mondiale se dirige vers un sérieux ralentissement, en 2012, auquel les investisseurs pourront difficilement échapper.

Le désendettement des ménages, des banques et des gouvernements des pays développés sera un frein à la croissance.

«Certains prévoient que de nouvelles mesures fiscales stimuleront l'économie américaine. D'autres, que les consommateurs américains seront plus dépensiers ou que les entreprises investiront davantage. D'autres encore misent sur une solution durable à la crise européenne ou sur des mesures musclées de relance en Chine. Tous ces espoirs ont selon moi peu de chances de se réaliser en 2012», croit Pierre Lapointe, stratège mondial, de Brockhouse Cooper.

Il juge donc plus prudent de conserver 15 % de liquidités et de consacrer 50 % du portefeuille aux actions, au lieu de l'habituel 60 %.

Dans un ralentissement mondial, il n'existe pas de réel refuge, puisque les économies sont liées entre elles par leurs échanges commerciaux et bancaires, notamment. M. Lapointe rappelle que, lors de la récession de 2007 à 2009, les trois quarts des pays ont connu une contraction de leur économie.

Malgré tout, les Bourses des Amériques devraient afficher de meilleurs rendements que celles de l'Europe et de l'Asie-Pacifique en 2012.

Les États-Unis devraient éviter la récession en 2012, mais 2013 est une autre histoire si le gouvernement se voit forcé d'imposer des mesures d'austérité, après les élections de novembre 2012.

Le quart de l'indice S&P 500 se compose d'industries moins tributaires de l'économie tels la santé, la consommation essentielle, les télécommunications et les services aux collectivités, quatre secteurs que M. Lapointe privilégie.

Par contre, au Canada, 50 % du S&P/TSX se compose de producteurs de matières premières qui, eux, souffriront du ralentissement en Chine.

Parmi les secteurs plus sensibles à l'économie, il favorise l'énergie, car il résiste mieux que les autres au début d'une récession. De plus, les prix élevés du pétrole ne sont pas reflétés dans les titres.

3 Martin Roberge

Canaccord Genuity

Ses cibles

S&P 500 : 1 310 (+ 5 %, dividende de 2,2 % compris )

S&P/TSX : 13 500 (+ 15 %, div. de 2,8 % compris)

Sa répartition suggérée

Actions : 60 %

Obligations : 40 %

«La détente monétaire des banques centrales du monde en 2012 et la résilience de l'économie américaine militent en faveur des actions.»

Les pires craintes ne se réaliseront pas

Les risques associés à la crise des dettes souveraines en Europe et au ralentissement en Chine sont bien connus et gardent déjà les investisseurs sur les lignes de côté.

Mais contrairement aux deux dernières années, les investisseurs attendent désormais de voir les mesures de relance fonctionner concrètement avant d'y croire et d'investir.

Puisque tous les décideurs seront en mode solutions en 2012, les actifs «risqués» telles les actions et les obligations de sociétés procureront ultimement de meilleurs rendements que les obligations et les titres monétaires en 2012, prévoit Martin Roberge, stratège quantitatif, chez Canaccord Genuity.

«L'évaluation raisonnable des actions, les liquidités mondiales abondantes et l'amélioration de plusieurs indicateurs précurseurs suggèrent qu'il est prudent d'allouer 60 % du portefeuille aux actions, par rapport à une proportion neutre de 55 %.

Concernant la portion obligataire, soit 40 % du portefeuille, M. Roberge préconise les obligations de sociétés. Leur rendement supérieur est attrayant, puisque la valeur de ces obligations reflète déjà l'effet d'une récession possible sur les bénéfices des entreprises. Selon lui, les États-Unis éviteront la récession.

Quant au choix des secteurs, le stratège préconise une approche équilibrée, où les industries cycliques et stables se côtoient, pour démarrer 2012. Ainsi, M. Roberge agence les secteurs de l'énergie et de la technologie avec ceux des titres de télécommunications.

Les industries plus tributaires de l'économie reprendront le haut du pavé en cours d'année devant la résilience de l'économie américaine, le baume d'un euro faible sur les exportations européennes, qui atténuera la récession de l'économie de la zone euro, ainsi qu'une baisse probable des taux d'intérêt en Chine, prévoit M. Roberge.

4 Vincent Delisle

Scotia Capitaux

Ses cibles

S&P 500 : 1 375 (+ 10 %)

S&P/TSX : 13 250 (+ 9%)

Sa répartition suggérée

Actions : 62 %

Obligations : 36 %

Encaisse : 2 %

«Deux forces s'affrontent en Bourse : le pessimisme des investisseurs envers l'avenir se bute à une nouvelle période d'assouplissement monétaire.»

Les États-Unis en tête

Les Bourses sont toujours dans un dilemme : elles ont déjà intégré bien des mauvaises nouvelles, mais la détérioration des économies de la Chine et de l'Europe pourrait réserver d'autres mauvaises surprises, dans les trois à six prochains mois. «J'aborde 2012 à l'inverse de 2011. Je commence sur la touche avec l'objectif d'augmenter la place accordée aux actions et aux titres sensibles à l'économie en cours d'année», dit Vincent Delisle, stratège de Scotia Capitaux.

Il commence l'année avec une part neutre (62 %) dans les actions et un mélange de secteurs stables et d'industries tributaires de l'économie.

Les actions américaines devraient continuer à offrir un meilleur rendement relatif que celles des pays émergents pendant cette première moitié d'année, puisque l'économie des États-Unis s'améliore tandis que celles des pays émergents ralentissent. Le S & P 500 devrait bien performer, tant que les nouvelles demandes d'assurance- chômage diminuent.

Par contre, la Bourse canadienne tirera de l'arrière jusqu'à ce que l'activité manufacturière en Chine montre des signes de redressement.

Tant que le dollar américain servira de refuge et s'appréciera par rapport aux autres monnaies, les cours des matières premières pourront difficilement s'apprécier. D'où sa décision d'éviter les secteurs des matériaux et de l'énergie, du moins pour la première moitié de l'année.

M. Delisle préfère donc les industries moins tributaires du rythme de l'économie mondiale pour le premier trimestre de 2012, soit l'industrie de la consommation essentielle, les fournisseurs de technologie et de services de télécommunications.

Les titres industriels de grande capitalisation et les banques complètent le tableau.

À mesure que les banques centrales assoupliront leur politique monétaire pour stimuler leurs économies toutefois, la Bourse canadienne, les marchés émergents d'Asie et d'Amérique latine pourraient rebondir plus tard dans l'année.

«Se déplacer d'une catégorie d'actif à l'autre ou d'un secteur à l'autre, en fonction de l'évolution des événements et des marchés, est difficile à accomplir. M. Delisle suggère donc aux investisseurs de meubler le corps de leur portefeuille de titres qui versent des dividendes et de meilleures occasions d'achat aux États-Unis, qui se retrouvent surtout dans les secteurs de la technologie, de la consommation essentielle et de la santé.

«Les secteurs des finances, de l'énergie et des matériaux exigeront une approche plus active», dit-il.

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