La réputation prise dans la Toile

Publié le 01/03/2009 à 00:00

La réputation prise dans la Toile

Publié le 01/03/2009 à 00:00

Peu d'entreprises suivent ce que l'on dit d'elles dans Internet. Pourtant, c'est de plus en plus sur le Net que les réputations se font et se défont.

Le câblodistributeur américain Comcast ne connaît que trop bien l'effet immédiat qu'Internet peut avoir sur la réputation d'une entreprise. Une vidéo montrant un de ses techniciens endormi sur le sofa d'un client a fait sensation sur le site YouTube. En 2006, un client a filmé pendant près d'une minute le technicien qui devait réparer sa connexion Internet. Celui-ci, qui était en attente au téléphone pour parler avec sa centrale, a fini par s'assoupir. La vidéo a été visionnée près de 1,5 million de fois, et l'entreprise a dû s'excuser publiquement auprès de son client.

Depuis cet incident embarrassant, la menace Internet a grandi. Les fonctionnalités du Web 2.0 apparues au cours des deux dernières années donnent aux consommateurs un nouveau pouvoir. Il est temps que les entreprises s'en préoccupent. "Les sociétés québécoises auraient tout avantage à organiser une veille de ce qui est véhiculé sur elles dans Internet, affirme Sylvain Sénécal, titulaire de la Chaire de commerce électronique RBC Groupe Financier, à HEC Montréal. Particulièrement celles qui figurent moins bien dans le classement Commerce/Léger Marketing." Grâce à Internet, les consommateurs peuvent désormais égratigner la réputation des entreprises avant même d'y avoir acheté quoi que ce soit ! "On trouve beaucoup d'informations dans des outils comme les blogues ou les sites d'évaluation de produits. Et, après l'achat, on peut inciter l'entreprise à tenir ses promesses grâce à des commentaires dans Internet", explique le professeur.

Évidemment, tous les commentaires des internautes n'ont pas le même poids. Car, comme le rappelle Jean-Jacques Stréliski, vice-président et directeur général associé chez Publicis Canada, on trouve de tout dans le cyberespace. "Aujourd'hui, chaque petit commentaire négatif a tendance à nous faire frissonner. Les prochaines années seront importantes pour séparer le bon grain de l'ivraie", affirme le publicitaire.

Si toutes les critiques n'ont pas le même poids, le problème avec Internet, c'est que ce qui y est affiché y reste très longtemps. "Dans le Web 2.0, on peut faire durer la nouvelle, même sur des sujets anodins, prévient Christian Bourque, vice-président recherche chez Léger Marketing. Une nouvelle négative peut donc s'avérer très dommageable pour la réputation d'une entreprise."

Certaines sociétés prennent l'habitude de parcourir le Net régulièrement pour voir ce que l'on dit d'elles. C'est le cas notamment du Cirque du Soleil (2e rang du classement), pour qui Internet joue un rôle crucial dans la relation avec la clientèle. "Contrairement à d'autres types d'entreprises, nous n'avons pas de contact quotidien avec la clientèle, souligne Joanne Fillion, directrice principale de la marque au Cirque du Soleil. Dans certains cas, nous visitons un marché tous les deux ou trois ans. Internet nous permet de garder le lien avec les gens qui ont déjà assisté à nos spectacles." Les employés du secteur Internet de l'entreprise parcourent régulièrement des sites et des blogues choisis pour lire les commentaires concernant le Cirque. Cependant, ils n'interviennent pas dans les discussions. L'engouement pour les blogues et les réseaux sociaux (comme Facebook) modifie le travail des gestionnaires en marketing, croit Joanne Filion. " Jusqu'à présent, les entreprises contrôlaient l'image qu'elles voulaient projeter à la télévision, dans les journaux et même sur Internet. Maintenant, les gens peuvent afficher eux-mêmes des contenus ou des commentaires. Notre image n'est plus diffusée uniquement par nous : elle l'est aussi par le public."

Le Cirque du Soleil a développé des outils Web qui permettent de maintenir un lien avec les spectateurs. En s'inscrivant à la section "Club Cirque" sur le site de l'entreprise, les spectateurs ont accès à des contenus originaux. Ils reçoivent des nouvelles sur les spectacles et ils peuvent acheter en priorité des billets pour les spectacles en tournée. Le Club Cirque a enregistré 1,8 million d'inscriptions.

Élaborer des contenus spécifiques pour Internet est aussi une façon pour une entreprise d'occuper le terrain, de reprendre un peu le contrôle de son image. Chez Microsoft (58e rang du classement), on n'hésite pas à réaliser des messages publicitaires destinés exclusivement à ce média. L'automne dernier, l'entreprise a conçu un message en interviewant des jeunes dans les rues de Toronto au sujet d'un nouveau téléphone disponible chez Bell. Le "HTC Touch Diamond" utilise le système d'exploitation Windows Media de Microsoft. "La réaction face à cette vidéo a été très bonne. Après deux semaines, elle avait été visionnée près de 13 000 fois. Pourtant, nous l'avions annoncée seulement en envoyant le lien à des blogueurs sélectionnés", souligne Paolo Pasquini, porte-parole de la division consommateurs et services en ligne chez Microsoft Canada.

La vidéo a été affichée sur un site de Microsoft et sur YouTube. Dans la discussion entre internautes qui accompagne celle-ci, les commentaires ne sont pas tous positifs. Un représentant de l'entreprise, clairement identifié comme tel, intervient à l'occasion pour donner un complément d'information. "Nous voulions lancer une discussion.

Alors, après, on ne peut pas se défiler. Ce ne sont pas toutes les entreprises qui laissent leurs représentants écrire des messages sur Internet. Nous voulons avoir une relation interactive avec notre clientèle", affirme Paolo Pasquini.

Chez Groupe Jean Coutu (no 1), on n'effectue pas de veille particulière de ce qui est véhiculé dans Internet. Par contre, le site de l'entreprise occupe une place de plus en plus importante dans la stratégie marketing de la société. Une équipe à l'interne se consacre à son fonctionnement, tant sur le plan technique que sur celui du marketing. "Le rôle de notre site est de compléter l'expérience en pharmacie, de fidéliser le client", explique Hélène Bisson, directrice principale, communications, au Groupe Jean Coutu. Jouissant d'une très grande notoriété au Québec, la marque Jean Coutu peut inspirer quelques esprits créatifs. Sur YouTube, on trouve quelques parodies de publicités et de films maison qui utilisent le nom de Jean Coutu. "Sans prendre cela trop au sérieux, cela fait partie du prix à payer pour être une marque connue et appréciée, dit Hélène Bisson. Il est certain que les entreprises moins connues font moins parler d'elles..."

Même si les entreprises n'ont pas de contrôle sur ce que les internautes diffusent, il est possible d'intervenir après coup. Le référencement permet de donner la priorité aux sites officiels de la société lorsqu'on tape le nom d'une marque dans un moteur de recherche. Une entreprise qui a été associée à une nouvelle négative qui reste un peu trop longtemps sur la Toile peut améliorer son sort. Il en va de même si l'un des dirigeants défraie les manchettes en raison de ses frasques personnelles ou professionnelles. "Nous pouvons prioriser d'autres nouvelles plus positives, de manière à ce qu'elles apparaissent en premier dans les moteurs de recherche", explique Nicolas Cossette, directeur des ventes et communications chez NVI, une firme de stratégie interactive. Compte tenu de l'évolution constante des blogues et des autres espaces de discussion, de plus en plus d'entreprises auront sans doute recours à ce genre de petits coups de baguette magique.

fabrice.tremblay@sympatico.ca

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