«Il faut aussi accepter que le secteur privé soit un acteur clé du développement» - Claudia Black, du Centre d'étude et de coopération internationale

Publié le 08/06/2013 à 00:00

«Il faut aussi accepter que le secteur privé soit un acteur clé du développement» - Claudia Black, du Centre d'étude et de coopération internationale

Publié le 08/06/2013 à 00:00

Le gouvernement Harper est en train de revoir son approche en matière d'aide internationale, en la liant davantage aux activités du secteur privé canadien. Que pensez-vous de ce virage ?

Il ne faudrait pas qu'on en arrive à la commercialisation de l'aide internationale. L'une des craintes est qu'on délaisse les pays les plus démunis, ceux qui ne présentent pas d'atouts stratégiques pour le commerce, parce qu'ils n'ont pas de ressources naturelles ou d'accès à la mer, par exemple. Dans ces pays, les communautés ont d'abord besoin d'aide pour se prendre en main, pour s'organiser, avant de se lancer dans le commerce avec les sociétés canadiennes. La crainte est que les ONG n'aient plus les moyens de jouer ce rôle de soutien majeur. Mais il faut aussi accepter que le secteur privé soit un acteur clé du développement. Le monde a changé. Voilà 40 ans, c'était le Nord qui débarquait dans le Sud. Aujourd'hui, dans les pays en émergence, les gouvernements ont leurs stratégies de développement. On ne voyait pas cela avant. Et dans ce nouveau contexte, les deux acteurs - le secteur privé et les ONG - ont un rôle à jouer, et ils peuvent travailler ensemble. C'est à nous de trouver des modèles de collaboration novateurs.

Vous avez effectué des projets avec le privé. Quelles sont les bonnes pratiques, à votre avis ?

Au Mali, nous avons réalisé un partenariat avec les jus Lassonde. Nous avions déjà aidé les producteurs de mangues à s'organiser en coopérative. De son côté, Lassonde avait communiqué avec nous pour que ses employés fassent du volontariat. Sur place, Lassonde a vu qu'elle pourrait s'approvisionner en mangues du Mali, et aujourd'hui, cette filière alimente 25 % de sa production. En Guinée, nous avons travaillé avec Alcan à la mise sur pied d'une table multipartite chargée de choisir et de gérer les projets de développement locaux, une table à laquelle siège aussi le gouvernement régional. Ce genre de structure apporte de la transparence et incite les gouvernements locaux à être imputables. De plus, elle fait en sorte que les décisions sont prises en fonction des besoins de la communauté, et non selon des intérêts strictement d'affaires.

N'y a-t-il pas parfois des conflits d'intérêts entre les deux ?

Oui. C'est pourquoi il faut que la priorité de l'aide internationale canadienne demeure la réduction de la pauvreté, et que les intérêts de la population, défendus par la société civile, soient pris en compte. Dans le milieu coopératif, ceux qui diabolisent le secteur privé ont tort, mais ce dernier doit avoir de l'éthique. Certaines entreprises en ont, mais d'autres, malheureusement, n'en ont pas.

CV

Nom : Claudia Black

Titre : Directrice générale

Organisation : Centre d'étude et de coopération internationale (CECI)

Claudia Black compte près de 25 ans d'expérience en coopération internationale. Avant d'être nommée au CECI en 2012, elle a travaillé à Oxfam-Québec.

5,7 G$

L'aide internationale canadienne a totalisé 5,7 milliards de dollars en 2011-2012.

Source : Agence canadienne de développement international

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