Pourquoi ne pas profiter du froid qui règne sur le Québec près de six mois par an pour réfrigérer gratuitement un entrepôt ?
Simon Bérubé, directeur de l'aménagement commercial chez Sobeys, a opté pour la technologie de la réfrigération gratuite (Free Cooling) lorsqu'il a conçu, avec son équipe, le centre de distribution de l'entreprise, à Trois-Rivières.
Car selon lui, " efficacité énergétique " est synonyme de " technologies innovantes " teintées de gros bon sens.
Facture réduite de 60 %
La réfrigération gratuite repose sur un système d'échangeur de chaleur qui utilise l'air froid extérieur pour réfrigérer l'entrepôt, dont la température doit être à 4 °C. La chaleur émise par les compresseurs du système est redistribuée dans des planchers radiants qui chauffent les bureaux.
De plus, grâce à l'aide de l'Université Concordia, les besoins de réfrigération de la salle des machines ont été évalués en fonction de la masse thermique des produits : Autrement dit, nul besoin de refroidir davantage des produits déjà froids à leur arrivée à l'entrepôt; maintenir leur température suffit. Résultat : la dépense énergétique pour la réfrigération a été réduite du tiers, ce qui représente une économie d'un million de dollars.
Parmi les autres technologies mises en oeuvre, des panneaux isolants translucides couplés à des détecteurs de luminosité et de mouvement qui contrôlent l'éclairage permettent de tirer profit de la lumière naturelle.
" Le projet de Trois-Rivières nous a coûté 1,5 million de dollars de moins que si nous l'avions réalisé de façon traditionnelle [30 millions] ", se réjouit Simon Bérubé, qui précise que toutes les initiatives instaurées ont réduit la facture énergétique globale de 60 %. " C'est rentable de faire les choses de la bonne manière. Sur le plan de l'investissement initial, des coûts d'entretien, des coûts d'exploitation... Économiser l'énergie, c'est rentable sur toute la ligne ! "
Économies appréciables
" Vous économisez. L'environnement y gagne aussi ", dit le slogan de l'Agence de l'efficacité énergétique (AEE).
La mission de l'Agence - promouvoir l'efficacité énergétique et le développement de technologies pour toutes les sources d'énergie, s'inscrit dans une perspective de développement durable.
Cela dit, Alain Daneau, directeur des secteurs de l'innovation technologique, du transport et du développement de l'industrie à l'AEE, précise que la rentabilité se trouve parmi les premiers principes qui guident les programmes de l'Agence. " Nous ne sommes pas l'Agence de la privation, dit-il. Rechercher l'efficacité énergétique, ce n'est pas seulement louable : c'est aussi payant. "
L'efficacité s'applique à tous les aspects d'un bâtiment, que ce soit son enveloppe, son architecture ou son intérieur (isolation, chauffage, procédés industriels), et ce, tant dans les nouvelles constructions que dans les immeubles existants.
Depuis peu, le secteur du transport est aussi dans la mire. Québec a, pour la première fois, inclut le pétrole dans sa nouvelle stratégie énergétique de 2006.
" Force est de constater que cela n'a pas été la priorité des entreprises au cours des dernières années. Par contre, certaines sont déjà championnes dans le domaine ", indique Luce Asselin, pdg de l'AEE.
Par exemple, des entreprises ont instauré des pratiques d'écoconduite. Elles ont installé, dans leur flotte de camions, des appareils surveillant la consommation de carburant au départ et à l'arrivée, qui corrigent également le comportement des chauffeurs.
" Notre objectif est de faire l'inventaire des bonnes pratiques et de voir comment les perfectionner ou, encore, de cerner ce qui n'a pas été exploité au Québec. Ainsi, nous aidons l'entreprise à instaurer des processus entraînant des économies substantielles. "
Par où commencer ?
Au départ, on doit faire un bilan ou un audit de la consommation d'énergie, explique André Chalifour, consultant indépendant en efficacité énergétique. Ce diagnostic est effectué par un spécialiste. Il visite l'entreprise pour déterminer quand et comment l'énergie est utilisée. Il évalue le matériel et il s'informe des équipements de remplacement disponibles sur le marché. Il évalue ensuite la rentabilité des mesures proposées en tenant compte du coût initial, des économies d'énergie réalisées, du rendement de l'investissement attendu et de la capacité de réduction des émissions de gaz à effet de serre.
" On quantifie les économies qui en découleront et les coûts de réalisation, sans oublier de calculer aussi les subventions disponibles, précise Robert Patenaude. Souvent, une subvention fera la différence entre le fait de mettre en oeuvre un projet ou non. "
Au Québec, l'entreprise est très bien servie en ressources susceptibles de l'aider et de la guider dans ses efforts pour atteindre l'efficacité énergétique. À tel point qu'il est parfois difficile de s'y retrouver dans l'éventail de programmes offerts ! Près de 80 programmes d'aide financière sont offerts sur le marché québécois.
Comme le dit Simon Bérubé, l'efficacité énergétique est un virage dirigé par le gros bon sens. Une fois le virage terminé, on se retrouve devant une autre ligne droite. Ce n'est pas plus compliqué qu'avant, c'est simplement différent, dit-il. " Ce qui est extraordinaire, c'est que nous réduisons nos émissions de gaz à effet de serre, nous diminuons notre consommation de ressources, nous faisons attention à l'être humain et nous réduisons nos coûts d'exploitation et de construction. Que peut-on espérer de plus ? "
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