Des artistes qui façonnent notre environnement

Publié le 20/06/2009 à 00:00

Des artistes qui façonnent notre environnement

Publié le 20/06/2009 à 00:00

Par Claudine Hébert

Les bâtiments que nous habitons ou fréquentons ? usine, bibliothèque, aréna, commerce du coin ? sont d'abord nés dans l'imagination des architectes. Même si leurs projets sont connus par une multitude de gens, les professionnels qui les ont conçus le sont moins.

Voici les portraits de cinq d'entre eux qui racontent leur démarche de création et leur vision de l'architecture. Les cinq sont finalistes aux Prix d'excellence en architecture 2009, un concours organisé tous les deux ans par l'Ordre des architectes du Québec.

Jamais depuis sa première édition, en 1978, ce concours n'aura été aussi vert. « Pour la première fois, toutes les candidatures, 114 au total, incluaient au minimum un geste écoresponsable dans la réalisation de leur projet », dit Sylvie Champeau, productrice déléguée de l'événement.

Elle note également une forte présence de la relève. « Des jeunes exceptionnels qui sortent des sentiers battus », résume-t-elle.

L'identité des gagnants aura été dévoilée dans le cadre d'une soirée, le 18 juin, au Centre CDP Capital, à Montréal.

UNE USINE EN BOIS QUI SEMBLE FLOTTER

St-Germain Égouts et Aqueducs. Maxime-Alexis Frappier a fait d'un bâtiment industriel un lieu convivial.

Maxime-Alexis Frappier compare régulièrement l'architecture à une belle histoire.

« Chaque projet constitue une ligne narrative à laquelle se greffent différents intervenants qui, à leur tour, racontent et en défendent le concept », dit-il. Une vision poétique de sa profession qui suggère comment ce jeune architecte de 32 ans, de la firme ACDF, est parvenu à conférer une allure de précieuse boîte de bois flottant sur un bassin d'eau miroitant? à un bâtiment industriel.

Ce tour de force, accompli pour le siège social du fabricant et distributeur de pièces d'égout et d'aqueduc St-Germain Égouts et Aqueducs, dans l'arrondissement Saint-Hubert, à Longueuil, a valu à son concepteur d'être finaliste aux Prix d'excellence en architecture 2009 dans la catégorie « Bâtiment industriel » du concours de l'Ordre des architectes du Québec.

Un bâtiment esthétique et fonctionnel

« L'idée de départ était de créer un endroit chaleureux avec un jardin intérieur. Il fallait un lieu convivial pour les employés dont l'entreprise, en croissance, souffrait d'un sérieux manque d'espace. Toute l'architecture, y compris l'usage des matériaux et des végétaux, s'inspire du nouveau site de relocalisation [une friche agricole bordée d'un axe routier et d'un quartier résidentiel] et de la nature même de l'entreprise, qui produit et vend de l'équipement pour le traitement des eaux », commente M. Frappier.

L'architecte a utilisé le bois comme revêtement extérieur, un matériau qui évoque le caractère humain et chaleureux de l'entreprise familiale. Il lui a toutefois fallu obtenir une autorisation spéciale de la Ville de Longueuil qui ne permet pas l'usage du bois dans la construction des bâtiments industriels.

M. Frappier demeure particulièrement fier de la mise en place d'un bassin, devenu l'atout principal du bâtiment, qui vient pallier le problème de rétention d'eau du nouveau terrain. Idem de l'aménagement d'une grande vitrine qui expose le savoir-faire du fabricant. Comme le font certaines usines de traitement d'eau.

Ce diplômé de l'École d'architecture de l'Université de Montréal s'illustre depuis déjà 10 ans sur la scène architecturale. Membre fondateur du collectif Allaire Courchesne Dupuis (aujourd'hui ACDF), en 2006, Maxime-Alexis Frappier figure au nombre des professeurs invités de l'École d'architecture de l'Université de Montréal, où il donne un atelier de conception aux étudiants de troisième année et à la maîtrise.

UN CONCEPT DE PIQUE-NIQUE URBAIN QUATTRO-D.

Marc-André Plasse et Stéphane Rasselet voulaient donner une forte personnalité à une épicerie-restaurant de quartier.

Qu'il s'agisse d'un garage municipal, d'une résidence sur le bord de la mer ou d'un salon funéraire, le défi de Marc-André Plasse et Stéphane Rasselet, associés au sein de la firme NatureHumaine, est toujours le même : donner une forte personnalité à chaque type de bâtiment pour frapper l'imaginaire des gens.

« Quelle que soit sa nature, le bâtiment doit dégager une image aussi forte qu'un message véhiculé par une publicité », explique Marc-André Plasse qui a atteint son objectif avec le projet Quattro-D, un commerce de la rue SaintDenis, à Montréal.

Il est finaliste dans la catégorie « Bâtiment commercial ».

Un pique-nique urbain

Mis au défi par ce nouveau concept original de restauration rapide, à mi-chemin entre l'épicerie de quartier, le restaurant et le café, les deux architectes ont convenu de s'inspirer d'un mélange de style urbain et d'esprit européen. « C'est ainsi que l'idée du pique-nique urbain s'est imposée », explique M. Plasse.

Bien sûr, qui dit pique-nique dit aussi nappe. Au plafond, on remarque le dessin d'une nappe peinte, suggérée par des motifs de broderie italienne pixélisés, qui donne l'impression de retomber devant les frigos. « Le vert est une couleur dominante du décor. Elle donne du punch et fait le lien avec la nourriture santé. Il y a aussi du brun qui rappelle le bon café », ajoute l'architecte.

Marc-André Plasse, 35 ans, et Stéphane Rasselet, 44 ans, ont fondé leur cabinet d'architecture et de design en 2003. Ils sont tous deux diplômés de l'École d'architecture de l'Université McGill.

UNE RÉSIDENCE SIGNATURE

Maison en U. Natalie Dionne a transformé un bâtiment industriel en résidence familiale unique.

Architecte ou artiste ? Le coeur de Natalie Dionne, mère dans la quarantaine, balance depuis 10 ans. Et c'est tant mieux.

Son plaisir de construire, qui remonte à l'enfance, jumelé à une exploration plus artistique des matériaux qui s'est développée au fil des ans, se reflète dans le concept de la Maison en U, finaliste dans la catégorie « Architecture résidentielle familiale ».

Cette petite oasis, de la rue Iberville à Montréal, qui baigne au coeur du chaos urbain, démontre le potentiel insoupçonné que recèlent certains lots vacants en bordure de voie ferrée. Il suffit parfois d'un brin de créativité? et de persévérance pour dénicher de jolies perles.

L'architecte, qui a consacré quatre années à ce projet de résidence familiale-bureau réalisé avec son conjoint Martin Laneuville (lui aussi diplômé en architecture), tenait mordicus à demeurer en ville. Idéalement sur le PlateauMont-Royal. Mais, budget oblige, le couple était prêt à faire certaines concessions quant à l'emplacement.

Après trois ans de promenades du dimanche en vélo, le couple est tombé sur ce lot vacant voisin d'un atelier de sculpture en périphérie du Plateau. À partir du bâtiment industriel existant, le couple a ajouté deux nouvelles constructions disposées à chaque extrémité du terrain pour créer un lieu intime.

« Ce concept de forme en U a permis d'exploiter l'idée d'ouverture sur la cour intérieure. Des parois de verre et de bois (y compris une porte de garage) s'articulent autour d'un environnement de verdure qui devient, lorsque la température le permet, une pièce de la maison », explique Natalie Dionne. La cour intérieure est orientée de façon à profiter du soleil.

« Bien que l'environnement immédiat soit moche, nous avons réussi à faire de notre demeure un lieu qui nous émeut. Nous en avons fait une résidence signature », souligne l'architecte, fière de ce projet appelé à devenir une source d'inspiration pour d'autres familles qui rêvent de s'établir en ville.

UN VÉRITABLE LIEU DE RASSEMBLEMENT

Bibliothèque de Charlesbourg. Éric Pelletier et Marie-Chantale Croft ont conçu un édifice moderne qui s'harmonise au quartier historique du Trait-Carré.

Musée de la Gaspésie, Théâtre de Terrebonne, Bibliothèque de Val-Bélair... Depuis ses débuts en 1995, la firme CroftPelletier architectes, de Québec, a conçu plusieurs lieux à vocation culturelle. La plus récente réalisation de Pierre Pelletier et son associée MarieChantal Croft est l'agrandissement de la Bibliothèque de Charlesbourg, un projet finaliste dans deux catégories aux Prix d'excellence d'architecture, soit « Bâtiment culturel » pour les projets de plus de 2 millions de dollars et « Architecture et développement durable ».

« On aime contrer l'ambiance froide habituelle de ces bâtiments pour créer un véritable lieu de rassemblement. Ce sont des projets très stimulants », souligne Pierre Pelletier.

Oubliez également les concepts exportables. Pour chacune de leurs réalisations, les architectes ont le souci d'une intégration réussie du bâtiment à son environnement. Dans le cas de la Bibliothèque de Charlesbourg, le duo a dû composer avec le caractère historique du quartier. « Notre plus grande contrainte était d'articuler la bibliothèque autour de l'église. Nous devions en plus harmoniser le projet avec le quartier résidentiel existant », explique M. Pelletier. Toit végétal et géothermie Le résultat vaut le détour. Le bâtiment recouvert de pierre s'harmonise avec l'environnement du quartier du TraitCarré. Un véritable parc a été aménagé sur le toit, accessible aux piétons.

La nouvelle Bibliothèque de Charlesbourg, qui a accueilli plus de 300 000 visiteurs en 2008, est équipée d'un système de géothermie pour son chauffage de sa climatisation. Le toit végétal, l'un des plus vastes au pays, l'utilisation généreuse du verre qui laisse pénétrer la lumière naturelle et l'usage du bois de merisier témoignent également de la démarche écoresponsable des architectes.

Le duo Croft-Pelletier sort très stimulé de l'expérience et ce projet institutionnel lui donne le goût de partager ce savoir-faire dans la réalisation d'écoles.

UN ARÉNA MODERNE LIÉ À UN BÂTIMENT VIEUX DE 175 ANS

Complexe sportif du Collège de L'Assomption. Éric Gauthier a utilisé la dénivellation du terrain pour intégrer la construction.

Vouloir réinventer le modèle de l'aréna constitue en soi un défi. Imaginez le travail lorsque l'architecte doit en plus greffer l'infrastructure sportive sur un bâtiment historique vieux de 175 ans.

Voilà la mission qu'a réussie l'architecte Éric Gauthier, de la firme FABG, chargé de projet du Complexe sportif du Collège de L'Assomption, finaliste d'un Prix d'excellence dans la catégorie « Bâtiment institutionnel ».

Fidèle à sa ligne de pensée, celle de viser l'élégance sans vouloir surprendre ni déstabiliser, l'architecte de 48 ans a misé sur un concept simple pour revitaliser le vieil aréna de l'institution scolaire qui accueille plus de 1 250 élèves de niveaux secondaire et collégial. « Il suffisait de trouver un concept pour que le bâtiment moderne, constitué de brique et de verre, se fonde avec le reste du collège », explique Éric Gauthier.

La ligne de pente à l'arrière du collège s'est avérée un atout. L'architecte a utilisé la différence entre le rez-de-chaussée du collège et le terrain arrière, moins élevé, pour intégrer l'imposante structure de l'aréna dans la pente.

Un point de vue privilégié

Sans être certifié LEED, le complexe sportif, qui abrite un gymnase double, une salle d'exercice et une salle de danse, s'inspire des principes de base de l'accréditation écoresponsable nord-américaine. Généreusement fenêtré, le bâtiment est inondé de lumière naturelle. Une toiture verte recouvre également près du tiers de la structure. « Cette partie, qui communique en ligne directe avec le rez-de-chaussée du collège, offre un point de vue privilégié aux spectateurs lors des compétitions extérieures qui se déroulent dans la cour arrière de l'établissement », indique l'architecte.

Associé de la firme FABG depuis 1988, Éric Gauthier est un habitué au concours des Prix d'excellence. Plusieurs de ses réalisations à caractère culturel (relocalisation de l'École nationale de l'humour, réaménagement de la Biosphère, la conception du nouveau Théâtre Espace Go) ont été primées au cours des dernières années.

dossiers@transcontinental.ca

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