Des arguments technologiques

Publié le 15/12/2012 à 00:00

Des arguments technologiques

Publié le 15/12/2012 à 00:00

Ancien chef du secteur Asie-Pacifique au Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS), Michel Juneau-Katsuya n'hésite pas un seul instant : «On ne peut pas avoir confiance quand on travaille avec Huawei.» Et ce risque qui plane pourrait avoir des impli-cations directes pour les entreprises d'ici.

L'ancien agent accuse l'entreprise chinoise d'avoir assis une partie de sa supériorité technologique sur des innovations «siphonnées» à l'ancien leader Nortel.

«Il y a trop de preuves, trop de témoignages qui démontrent que Huawei a été ou est encore impliquée dans l'espionnage, dit-il. Il n'y a pas de fumée sans feu. Et en particulier dans ce domaine - où l'on ne voit généralement que la pointe de l'iceberg -, quand de tels témoignages sortent, c'est qu'il y en a beaucoup plus en dessous.»

«Cet argument est constamment employé contre nous», déplore Scott Bradley, vice-président aux affaires gouvernementales pour Huawei Canada. Selon lui, la spectaculaire croissance de Huawei se résume ainsi : elle était au bon endroit, au bon moment.

«De 1999 à 2009, le nombre de cellulaires en Chine est passé de 49 millions à 549 millions. Nous étions aussi présents dans d'autres pays où la croissance du marché a été très forte, comme le Nigeria. Voilà maintenant 15 ans que nous réinvestissons 10 % de nos revenus dans la recherche et le développement.»

Ces efforts de recherche et développement sont en partie déployés au Canada. Huawei emploie environ 150 chercheurs à Kanata, près d'Ottawa, et compte porter ce nombre à 250 d'ici 18 mois. Ce centre a bénéficié d'une subvention de 6,5 M$ du gouvernement ontarien.

Ancien directeur du SCRS lui aussi, David Harris se méfie tout autant de Huawei.

«Avoir le contrôle des réseaux de télécommunications d'un pays, cela revient, pour les militaires, à être installé en hauteur sur un champ de bataille, résume-t-il. Ils pourraient avoir accès à nos plus grands secrets.» Le fait que Huawei soit chinoise est encore plus inquiétant, selon lui, en raison «de la nature impérialiste et agressive du régime chinois».

Des marchés risquent de se fermer

Les deux experts voient des implications directes pour les entreprises canadiennes, particulièrement celles qui font des affaires aux États-Unis.

«Quiconque gère une petite ou une grande entreprise qui utilise un réseau compromis pourrait constater que le gouvernement ou des entreprises américaines ne veulent plus rien savoir de sa société. Je ne sais pas si je le ferais moi-même, mais à cause du rapport, certaines entreprises américaines pourraient décider de ne plus faire affaire avec Huawei directement, avec les clients de Huawei [les opérateurs de réseaux] ou avec les clients des clients.»

«De plus en plus d'organismes de sécurité commencent à enquêter au-delà de leurs fournisseurs directs, jusqu'à deux ou trois niveaux plus loin, pour vérifier d'où provient l'équipement qu'ils utilisent», renchérit M. Juneau-Katsuya.

Contrairement à ce qui s'est passé aux États-Unis, aucune étude concernant Huawei n'a été publiée par le gouvernement canadien. Celui-ci affirme toutefois être vigilant, «sur les conseils des organismes de sécurité et d'application de la loi».

«La sécurité est essentielle à une industrie des télécommunications florissante, a répondu par courriel le ministère chargé du dossier, Sécurité publique Canada. C'est pourquoi nous travaillons régulièrement avec les entreprises de télécommunications, pour veiller à ce que l'infrastructure des télécommunications soit résiliente et sécuritaire.»

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