Cinq stratégies pour développer l'autoroute bleue

Publié le 08/05/2010 à 00:00

Cinq stratégies pour développer l'autoroute bleue

Publié le 08/05/2010 à 00:00

Le trafic maritime mondial a doublé au cours des 20 dernières années et crû de 60 % dans le port de Montréal. Cependant, au cours de la même période, il a diminué sur la voie maritime. Cette section de l'autoroute bleue, située entre Montréal et le lac Érié, a vu passer entre 40 et 50 millions de tonnes de marchandises durant le 20 dernières années. " Mais dans les années 1970, elle en transportait jusqu'à 65 millions ! ", rappelle Jean Aubry-Morin, vice-président, développement durable, de la Corporation de gestion de la Voie maritime du Saint-Laurent. Autrement dit, les 15 écluses de la Voie maritime - qui traitent jusqu'à 80 millions de tonnes - fonctionnent environ à la moitié de leur capacité.

Comment le système Saint-Laurent-Grands-Lacs (SLGL) - une voie navigable de 3 700 kilomètres qui s'étire du Golfe du Saint-Laurent au lac Supérieur - peut-il redevenir un véritable corridor commercial ?

1 Mieux faire connaître le transport maritime

" Ce sont des raisons de marché structurelles qui expliquent la baisse d'achalandage dans le système SLGL, pas son manque de compétitivité, croit Robert Masson, président de la Société de développement économique du Saint-Laurent (SODES). Autrefois, les aciéries du nord des États-Unis empruntaient la voie maritime pour importer du charbon et exporter de l'acier. Aujourd'hui, plusieurs d'entre elles ont fermé. "

Le portrait est aussi sombre du côté des céréales : les chargements de blé qui passaient autrefois par le fleuve en route vers l'ex-URSS empruntent maintenant les ports du Pacifique à destination de... l'Asie. Pour survivre, le système SLGL doit attirer de nouvelles clientèles. Mais qui ? " Des entreprises intéressées au transport maritime courte distance ", répond M. Aubry-Morin.

La partie n'est pas gagnée. " Les avantages et les impacts économiques, sociaux et environnementaux du transport maritime sont méconnus ", dit Marie Letellier, la nouvelle directrice générale des Armateurs du Saint-Laurent. En effet, on oublie facilement que le transport maritime a moins d'effets sur l'occupation du territoire que le camionnage, entraîne proportionnellement moins d'accidents et ne cause aucun embouteillage à l'heure de pointe ! Pour Mme Letellier, " la congestion routière poussera les manufacturiers à reconsidérer ce mode de transport. "

2 Allonger la saison de la Voie maritime

Un désavantage important du système SLGL est la fermeture, trois mois par année, des écluses de la voie maritime, de la fin décembre à la fin mars. " Les écluses n'ont pas été conçues pour fonctionner par grand froid ", déplore Robert Masson. Sans compter que leur entretien nécessite une interruption de service. Pendant ce temps d'arrêt, les manufacturiers qui utilisent cette voie de transport ne peuvent plus expédier leurs marchandises. Ils doivent donc les entreposer, ce qui entraîne des coûts. Cela n'encourage guère les entreprises qui utilisent le transport routier ou ferroviaire d'opter pour la voie fluviale.

Les solutions ? Fermer la voie maritime pendant de plus courtes périodes, quitte à le faire plusieurs fois par an. Ou déployer des talents d'ingénierie pour améliorer la performance des écluses.

3 Harmoniser et assouplir la réglementation

Le système SLGL, enclavé entre les frontières américaine et canadienne, tombe sous les juridictions du Québec, de l'Ontario, de huit États américains et des gouvernements des États-Unis et du Canada. Tout cela porte à la confusion dans les règlements.

" Par exemple, l'Organisation maritime internationale publiera en 2012 sa nouvelle réglementation sur le traitement des eaux de ballast des navires, dit Jean Aubry-Morin. Malheureusement, les autorités provinciales et fédérales ne s'entendent pas sur l'interprétation à lui donner. " Par exemple, elles ne s'accordent pas sur les équipements qui seront exigés pour traiter les eaux de ballast, qui peuvent transporter des espèces vivantes susceptibles de déséquilibrer les écosystèmes. " Face à cette imprévisibilité, les armateurs hésitent à investir ", dit M. Masson.

Paradoxalement, le grand nombre de tables de concertations de l'industrie nuit peut-être à l'adoption d'une position commune. En effet, difficile de savoir qui pourrait imposer la norme : le Forum de concertation sur le transport maritime, le Conseil consultatif maritime canadien, l'Alliance des villes des Grands Lacs et du Saint-Laurent ou la Commission des Grands Lacs, pour ne nommer que ceux-là ?

Un autre irritant de la réglementation concerne les frais d'importation de 25 % que le Canada impose à quiconque achète un navire à l'étranger, ce qui représente une facture de plusieurs millions de dollars. Résultat : même si les navires marchands canadiens ont 28 ans en moyenne, les armateurs hésitent à renouveler leur flotte, alors que des bâtiments plus modernes seraient sûrement plus efficaces et moins gourmands en carburant. Quant à s'approvisionner au pays, ce n'est pas vraiment une possibilité. En effet, " les chantiers navals d'ici ne fabriquent plus de navires de fort gabarit dont les armateurs ont besoin ", dit Marie Letellier.

4 Améliorer les infrastructures

Par définition, le transport maritime est intermodal : pour transporter une cargaison jusqu'à sa destination finale, il doit donner le relais à la route ou au rail. Or, les voies d'accès aux ports du Québec sont bien souvent engorgées. " Quand les colons ont bâti le port de Montréal, ils ne savaient pas qu'il serait situé en plein centre-ville ! ", dit Robert Masson. Tout ce qui peut améliorer la fluidité de la circulation autour des zones portuaires, comme la modernisation de la rue Notre-Dame, à Montréal, est bienvenu, dit-il. " L'intermodalité touche aussi des équipements spécialisés, comme des terminaux munis de systèmes de manutention horizontale ou roll on/roll off system, qui permettent aux camions d'embarquer sur les navires et d'en débarquer ", ajoute Claude Mailloux, directeur général du Comité sectoriel de main-d'oeuvre de l'industrie maritime.

5 Creuser dans le chenal pour accueillir de plus gros navires

Enfin, les infrastructures concernent le fleuve lui-même. Une étude de 2008 sur le corridor de commerce SLGL recommande le dragage entre Montréal et Québec, entre autres. L'objectif : accueillir des navires plus lourds et d'un tonnage plus imposant. La recommandation est controversée : le dragage fait baisser le niveau de l'eau, et donc nuit à la faune, à la flore et aux berges. " On ne parle pas d'enlever un pied partout, mais de faire du dragage sélectif, par exemple, de creuser un chenal dans celui qui existe déjà entre Québec et Montréal ", dit Robert Masson pour défendre son point de vue. Selon lui, nous connaissons mal le fond marin du Saint-Laurent. " La profondeur naturelle de certains passages permettrait d'assurer un plus grand tirant d'eau que le minimum garanti ", croit-il.

dossiers@transcontinental.ca

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