Ces vedettes qui veulent changer le monde

Publié le 24/08/2013 à 00:00, mis à jour le 22/08/2013 à 09:19

Ces vedettes qui veulent changer le monde

Publié le 24/08/2013 à 00:00, mis à jour le 22/08/2013 à 09:19

Bill Gates, Carlos Slim, Barry Diller, Geena Davis, Elan Musk, Peter Thiel, Marc Andreessen... Ces vedettes ont toutes des missions à la mesure de leurs ambitions : sauver l'Afrique ou le New York Times ; mettre les câblodistributeurs à genoux ou les femmes debout ; conquérir Mars ou déclencher la prochaine vague d'innovations. Elles étaient à la très sélecte Milken Global Conference, tenue au printemps à Los Angeles. Les Affaires y était aussi.

Carlos Slim

L'homme de 73 G $ US

C'est l'homme le plus riche du monde et ça ne lui fait ni chaud ni froid. Par contre, il avoue que son père a eu bien trop d'influence sur lui et que le bonheur demeure un idéal qu'il cherche à atteindre. Philanthrope ? Pas du tout ! «Je ne donne pas d'argent, j'investis pour résoudre des problèmes précis en santé et en éducation.» Il respecte le New York Times au point de l'avoir acheté. Mais ce fan fini des Yankees ne se paiera jamais cette équipe. «Mon plaisir consiste à regarder les Yankees, pas à les posséder.»

Vous voulez que la moutarde lui monte au nez ? Dites-lui que sa société de télécoms América Mòvil est un monopole. «C'est ridicule ! Mono signifie un. Je ne suis pas seul. J'affronte des concurrents dans le sans-fil, dans la télé, dans l'interurbain. J'ai 60 % des parts dans certains marchés, mais je ne suis jamais seul.»

Sa solution à la crise ? Privatiser. «Pourquoi le gouvernement devrait-il posséder des routes et des aéroports et exploiter l'approvisionnement en eau ?» Faut-il travailler plus fort pour s'en sortir ? «Il va falloir travailler plus longtemps, mais pas plus fort.» Ce sont les machines qu'il faut faire travailler 24 heures sur 24.

Marc Andreessen et Peter Thiel

Croire ou pas en la techno ?

L'un a fondé Netscape et l'autre PayPal. Entrepreneurs-vedettes, ils sont devenus investisseurs-vedettes. Si la foi de Marc Andreessen dans la techno demeure intacte, celle de Peter Thiel vacille. Ils se sont affrontés sur la scène - amicalement s'entend - sur le thème «Sommes-nous moins innovateurs qu'avant ?».

«On nous a promis des voitures volantes et la fin du cancer. Tout ce que je vois, ce sont des gens qui jouent à Angry Birds sur leur iPhone et qui nous racontent ce qu'ils ont mangé sur Twitter», déplore Peter Thiel.

Pas si vite, réplique Marc Andreessen. «Toutes les grandes innovations ont d'abord été qualifiées de triviales, dit-il. JP Morgan avait refusé d'investir dans les premières automobiles, estimant qu'elles demeureraient un jouet pour les riches.»

Peter Thiel doute encore. «Les médias donnent une idée fausse de l'importance du secteur techno et de l'innovation. Ils en parlent parce que c'est cool. Mais le classement des 500 plus riches de Forbes compte 11 dirigeants techno et 25 dirigeants du secteur minier. Y a-t-il un secteur moins innovateur que les mines ?»

Marc Andreessen ne capitule pas : «Je conclurai que nous innoverons moins lorsque le PIB par habitant diminuera. Pour l'instant, ce n'est pas le cas.»

Match nul.

Barry Diller

L'ennemi no 1 des diffuseurs

«Tout le monde veut jouer dans les plates-bandes de son voisin. Je préfère être l'envahisseur plutôt que la victime», affirme Barry Diller, président d'IAC, la société mère d'Expedia. Ses nouvelles victimes : les diffuseurs de contenu télé et les câblodistributeurs.

La société de M. Diller, Aereo, offre un service de diffusion en flux (streaming). Pour un coût variant de 1 $ par jour à un maximum de 80 $ par an, le client peut accéder à tout le contenu télé qu'il désire. Ses concurrents l'ont déjà traîné deux fois en cour. Ils ont perdu à deux reprises.

«J'aime semer la pagaille dans les industries fermées. Mais je ne tenterai jamais d'arrêter un train en marche. Les propriétaires de journaux devraient suivre mon exemple. Internet a ébranlé leur univers. Ils ne sont plus dans le business des journaux. Ce sont des fournisseurs d'information.»

Elan et Kimbal Musk

Conquérir Mars et éradiquer l'obésité

Ce sont les frères entrepreneurs les plus célèbres des États-Unis. Elan veut conquérir Mars. Kimbal, éradiquer l'obésité chez les jeunes. L'un est flamboyant. L'autre pas. Côte-à-côte sur la scène, le contraste est frappant. La complicité et le respect aussi.

«Kimbal est une des personnes les plus gentilles que je connaisse», dit son frère. «Elan poursuit ce qu'il désire avec une détermination hors du commun», déclare l'autre.

En 1995, ils lancent Zip2, un guide touristique en ligne. Quatre ans plus tard, les frères Musk vendent l'entreprise au moteur de recherche Alta Vista pour 370 millions de dollars. Leurs chemins professionnels se séparent. Kimbal fonde des restaurants (The Kitchen). Il lance aussi Learning Gardens, un projet de jardins communautaires pour apprendre aux jeunes comment bien se nourrir. Elan démarre le système de paiement en ligne Paypal, puis le fabricant de véhicules électriques Tesla. Récemment, il a présenté son dernier projet : l'hyperloop, soit des capsules voyageant à 1 220 km/h qui permettraient de relier Los Angeles à San Francisco en 30 minutes.

Le secret de la réussite des Musk ? «Ma paranoïa, répond Kimbal. Je vis constamment en attente de la prochaine catastrophe. En tant que Sud-Africain, j'ai vécu la fin de l'apartheid, la jungle de Silicon Valley et le 11 Septembre. Je servais des repas aux pompiers.» «Ma persévérance», répond quant à lui Elan.

Et leur plus grosse erreur ? «De mauvais recrutements, confie Elan. J'ai longtemps accordé trop d'importance à l'intelligence des candidats plutôt qu'à leur coeur.»

Kimbal, lui, estime que son talon d'Achille est son «incapacité à dire non. J'ai collaboré à trop de projets qui ne me passionnaient pas.»

Bill Gates

L'apôtre de l'Afrique

C'est un Bill Gates bien humble qui s'est présenté sur scène. On aurait crû ses ambitions pour sa fondation à la mesure de celles, gigantesques, qui ont propulsé Microsoft. Pas du tout. «Lorsque j'ai entrepris mes premiers projets en Afrique, je m'attendais à un impact marginal. Je croyais que tout ce qui pouvait être entrepris pour aider ce continent avait été accompli», reconnaît-il.

Il a donc été surpris de la pérennité de ses initiatives. «Lorsque vous implantez un système ou des processus, il tient le coup. La population locale prend le relais. Elle vient en renfort», raconte-t-il.

Bill Gates emploie souvent le terme «miracle» pour qualifier son expérience africaine et les perspectives d'avenir du continent. Il cite, entre autres, l'amélioration de la productivité dans le secteur agricole et la pénétration de la téléphonie mobile.

Geena Davis

L'actrice-activiste

Les films familiaux comptent trois personnages masculins pour un personnage féminin. Et 81 % des personnages occupant un emploi dans ces films sont des hommes. Deux constats du Geena Davis Institute on Gender in Media.

«Il a fallu que j'aie une fille pour réaliser à quel point les femmes sont absentes des médias ainsi que le rôle mineur qu'on leur confie.» Et lorsqu'elles campent le rôle de l'héroïne, le scénario insiste sur le fait «qu'elles peuvent y arriver aussi, même si ce sont des femmes», ajoute l'actrice.

«Il faut cesser de traiter chaque succès féminin comme une victoire incroyable, déplore-t-elle. Et de conclure qu'un ratio de 20 % de femmes leaders, c'est déjà bien.»

Le Milken nouveau

Dans les années 1980, le financier Michael Milken a été condamné à 10 ans de prison après avoir été sous le coup de 98 chefs d'accusation. Le roi des obligations de pacotille, c'était lui. M. Milken aurait inspiré l'un des plus célèbres vilains d'Hollywood, le personnage de Gordon Gekko, dans Wall Street, dont la réplique «Greed is good» («La cupidité, c'est bien») est passée à l'histoire. Le Michael Milken «nouveau» ne croit plus que la cupidité, ce soit bien. Il a eu un moment d'épiphanie : le voilà philanthrope. Son centre d'études et de recherches, le Milken Institute, a pour misson de «changer le monde à travers l'innovation». Il organise des événements, dont la Milken Global Conference. Une fois par année, pendant quelques jours, les gens d'affaires et les politiciens les plus influents de la planète discutent des grands maux de notre époque. Bienvenue au Davos de la côte ouest.

LE THÈME LE PLUS DISCUTÉ : L'INVESTISSEMENT D'IMPACT

Un thème a été abordé dans six ateliers de la Milken Global Conference : les nouveaux modèles d'entreprises combinant retombées financières et sociales. Aucun autre sujet n'a fait l'objet d'autant de discussions. Les ateliers se déclinaient ainsi : «High performance with a conscience», «Building a local community to drive social change», «Impact investing», «A new generation transforms impact investing», «The rise of social capital markets» et «Community Capital : investing in social innovation». Il n'est pas question d'entreprises traditionnelles assumant des responsabilités sociales, mais de sociétés créées pour régler des problèmes sociaux spécifiques sans sacrifier le rendement. «Les investissements sociaux rapportent plus que les investissements traditionnels, car ils répondent à une demande réelle», souligne Bobby Turner, pdg de Canyon Capital Realty, un promoteur immobilier. M. Turner est un pionnier de l'investissement d'impact qui satisfait les actionnaires tout en rapportant à la communauté, et en assumant sa responsabilité environnementale. Il s'est associé au basketteur Magic Johnson pour réaliser des projets immobiliers urbains cofinancés avec la communauté. Et avec le joueur de tennis André Agassi pour bâtir des écoles à charte, ces établissements publics gérés par le privé et jouissant d'une grande liberté d'enseignement. Prochaine étape : créer un marché des capitaux sociaux.

LE MYSTÈRE CHINOIS

Durant les conférences, dans les ateliers, dans les corridors, durant les repas, la Chine revient constamment dans les conversations des participants de la Milken Global Conference. On s'en inquiète : quel est le programme politique du nouveau gouvernement ? On la décrie : quand respectera-t-elle la propriété intellectuelle ? On lui donne des leçons : elle doit réformer sa fiscalité, décentraliser le pouvoir vers les régions, etc. Bref, l'élite économique et politique internationale attend de la Chine des réformes. Beaucoup de réformes.

LA PRÉSENCE QUÉBÉCOISE : MICHAEL SABIA ET PIERRE BEAUDOIN

La 16e Milken Global Conference a accueilli deux conférenciers québécois : le pdg de Bombardier et celui de la Caisse de dépôt et placement du Québec. Ils ont tous deux fait un tabac. Pierre Beaudoin pour son optimisme et ses observations concrètes, alors qu'il intervenait dans le panel d'économistes «Global Overview». Michael Sabia, pour sa part, a conquis l'auditoire international par la clarté de ses propos lors de l'atelier «Institutional Investors : Where in the world will returns come from ?».

Bombardier est un des commanditaires de cette conférence. «C'est un investissement très rentable, confie le pdg. Plusieurs participants sont clients de notre division des jets d'affaires et les autres sont des clients cibles.» Pierre Beaudoin était donc en mode vente.

Michael Sabia, lui, était en mode charme. «La Caisse veut se positionner comme un acteur international, dit-il. Participer à un événement de cette envergure nous donne une occasion de continuer notre processus de mondialisation. Tout le who's who des affaires et de la finance se trouve ici. C'est l'occasion de leur montrer que la Caisse est une institution qui peut investir n'importe où dans le monde. Être conférencier à Milken nous permet aussi de contribuer à la mondialisation de l'économie québécoise en servant de pont entre les entrepreneurs québécois et le monde.»

diane.berard@tc.tc

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