À projet surréaliste, pari risqué

Publié le 19/02/2011 à 00:00

À projet surréaliste, pari risqué

Publié le 19/02/2011 à 00:00

Pour le premier ministre Jean Charest et le maire Régis Labeaume, l'affaire est réglée.Québec aura son amphithéâtre, où pourra évoluer une équipe de la Ligue nationale de hockey (LNH). Il n'y a pas de " si ". On a mis la charrue devant les boeufs. L'amphithéâtre sera construit, qu'il y ait une équipe ou non.

Le gouvernement du Québec investira 200 millions de dollars (M$) et la Ville, la différence entre 200 M$ et la somme que le groupe privé J'ai ma place aura recueilli; en autant, bien entendu, que le coût total ne dépasse pas 400 M$ . J'ai ma place a récolté jusqu'à maintenant 14 M$.

C'est un projet risqué, quasi surréaliste et essentiellement politique.

Pour Jean Charest, Québec a besoin d'un tel amphithéâtre. Il voit cet équipement comme une contrepartie à la nouvelle salle de l'Orchestre symphonique de Montréal. Le projet permettra au Parti libéral de gagner des votes à Québec lors des prochaines élections et de neutraliser le maire Labeaume, un sympathisant péquiste.

De son côté, Régis Labeaume réalise sa principale promesse électorale. " J'appelle Gary Bettman [commissaire de la LNH] pour lui annoncer que nous allons de l'avant ".

Le maire feint d'ignorer que ce dernier a déclaré récemment que la LNH n'a aucun projet d'expansion ni de déménagement d'une équipe existante.

Il y a deux façons de voir un tel projet :

1. L'amphithéâtre améliorera la qualité de vie des gens, qui auront ainsi accès à plus d'événements sportifs et culturels d'envergure. C'est parfaitement légitime, mais il faut être réaliste. Le coût de cet équipement est très élevé et l'argent qui sera alors investi pour le construire, et dépensé pour l'exploiter et l'entretenir, créera un manque ailleurs.

2. L'équipement contribuera au développement de l'économie locale. On fantasme sur les retombées (emplois, revenus, recettes fiscales, attrait touristique, etc.). A-t-on fait une analyse solide des coûts et des bénéfices de ce projet ? Certes, il existe une étude commanditée par les promoteurs, mais celle-ci comporterait une marge d'erreur de 75 %.

Que l'on voit l'amphithéâtre comme un facteur d'amélioration de la qualité de vie ou comme un investissement, il est logique que les contribuables de la ville supportent une grande partie de son coût. C'est pour eux qu'on réalise ce projet.

Est-ce que le partage des coûts entre les bailleurs de fonds est idéal ? Difficile à dire, mais puisque le maire n'a même pas daigné présenter un projet détaillé à Ottawa et que son complice, le premier ministre Charest, a décidé d'ajouter 200 M$ à la dette du Québec pour redorer le blason de son gouvernement dans la Capitale-Nationale, le gouvernement de Stephen Harper est maintenant dédouané face à ce projet.

Quant aux fameuses retombées, précisons qu'elles seront minces, même advenant le retour de la LNH. S'il n'y a pas de club, Québec aura alors son éléphant blanc, comme Montréal, avec son Stade olympique. Selon des études d'économistes indépendants menées dans 37 villes (Coates and Humphreys) et 32 régions métropolitaines (Baade) des États-Unis, la construction d'un amphithéâtre ou l'établissement d'un club sportif professionnel n'ont pas accru le revenu personnel par habitant de ces collectivités. De même, celui des résidents de Québec n'aurait pas baissé avec le départ des Nordiques.

La raison est simple. L'argent dépensé dans le nouvel amphithéâtre est un manque à gagner pour d'autres activités. Pour les villes des environs, l'impact net peut même être négatif, à cause du déplacement des dépenses vers la ville où est situé l'amphithéâtre.

À part la construction, les emplois créés sont souvent à temps partiel et mal payés.

De plus, l'argent dépensé dans ces amphithéâtres profite surtout à des non-résidents : les athlètes professionnels et les artistes qui s'y produisent paient généralement leurs impôts à l'étranger. Les promoteurs d'événements en tireront des profits et les gouvernements des paliers supérieurs y recueilleront un peu d'impôts et 100 % des taxes de vente.

Propriété de la Ville, le futur amphithéâtre ne paiera pas de taxe foncière. Pour éviter que son financement, son entretien, les services de sécurité et le nettoyage des lieux après les spectacles soient refilés directement aux contribuables, le maire propose d'exiger des frais de 4 $ par billet vendu. C'est pertinent... mais encore faut-il qu'une équipe de hockey s'y installe, ce qui reste à voir.

Enfin, la venue d'une équipe de sport professionnel deviendra si importante pour la justification a posteriori de l'amphithéâtre et la carrière politique du maire que la Ville se retrouvera avec un pouvoir de négociation affaibli face aux promoteurs qui voudront profiter de cet équipement. Bonne chance aux contribuables de Québec.

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