La guerre des téléphones intelligents résumée en deux graphiques

Publié le 05/10/2016 à 16:54

La guerre des téléphones intelligents résumée en deux graphiques

Publié le 05/10/2016 à 16:54

Avec le lancement de son Pixel, le géant de l'internet Google (GOOG; Nasdaq) part à l'assaut d'un marché du mobile en ralentissement, où la concurrence est féroce. Après avoir remporté la bataille des OS (systèmes d'exploitation), Google est-elle capable de s'imposer de la même manière dans le marché du téléphone intelligent? Résumé d'une guerre numérique en deux graphiques.

Le marché des téléphones intelligents est en proie à une véritable guerre mondiale. La lutte pour les parts de marché est âpre et bien des acteurs sont tombés et tomberont encore au champ d'honneur.

Ce conflit est divisé en deux mots et deux fronts: le téléphone (l'appareil) et l'intelligence (le système d'exploitation ou OS). Et le moins que l'on puisse dire, c'est que la situation sur ces deux fronts est très différente...

OS: Fin des hostilités?

La bataille des systèmes d'exploitation est terminée. Et elle s'est soldée par la victoire écrasante d'un acteur encore inconnu il y a 7 ans: Android. Le graphique ci-dessous témoigne de ce véritable bain de sang numérique (cliquez dessus pour agrandir l'image)...

On le constate: le système d'exploitation de Google a littéralement siphoné l'offre en passant de 1,2% de part de marché en 2009 à 86,2% en 2016.

Un seul système résiste encore et toujours à cette hégémonie grandissante: iOS. Avec 12,9% de part de marché (mais 85% à 90% des revenus, c'est important de le garder en tête), la plate-forme d'Apple reste un concurrent minoritaire, mais extrèmement solide. On notera d'ailleurs qu'iOS n'a pas spécialement souffert de la montée en puissance d'Android (avec 10,5% de part de marché en 2009, on peut même dire qu'il a consolidé sa position).

Derrière? C'est le désert. Alors qu'en 2009 cinq OS se partageaient encore le marché, il n'y en a plus que deux encore debout. Symbian de Nokia? Atomisé. RIM de Blackberry? Perdu dans les limbes. Windows mobile de Microsoft? Ça bouge encore, mais a priori plus pour très longtemps.

En optant pour la stratégie du logiciel libre, autrement dit en offrant Android aux fabricants de téléphones intelligents pour qu'ils le modifient à leur guise, Google a littéralement cannibalisé le marché de l'intérieur. Son système fait aujourd'hui tourner plus de 8 téléphones sur 10, et même si ce chiffre n'a pas beaucoup progressé depuis 2014, on ne voit pas à cette heure ce qui pourrait le faire baisser.

Téléphones: la guerre continue

Si l'affaire est (provisoirement?) réglée sur le front des systèmes d'exploitation, il en va tout autrement du marché des téléphones intelligents en eux-mêmes. Ces dernières années, le secteur a en effet connu une multiplication des acteurs, globaux ou régionaux, tout en étant confronté à un ralentissement global des ventes. 

Après une croissance à deux chiffres du marché jusqu'en 2015, le cabinet Gartner s'attend en effet à une petite progression de 4,5% pour l'année en cours, pour continuer à ralentir par la suite. «Nous sommes sur un marché très concurrentiel», confirme Roberta Cozza, directrice de recherche chez Gartner, «les opportunités de croissance sont réduites, à moins de prendre des part de marché à la concurrence».

Et l'arrivée d'un acteur comme le Google Pixel pourrait venir perturber les positions des uns et des autres. Le graphique ci-dessous donne une bonne idée de la fragmentation de ce marché en évolution permanente. L'augmentation de la part de marché de la catégorie «Autres» (de 17% en 2009 à plus de 45% en 2016) en dit notamment long sur la multiplication exponentielle de l'offre.

À une époque pas si lointaine, où les téléphones portables ne servaient qu'à passer des coups de fil et envoyer des sms, les leaders du marché étaient européens, Nokia, Ericsson, Alcatel en particulier, ou américains, avec Motorola.

Aujourd'hui, plus aucun d'entre eux n'est présent. Le groupe suédois Ericsson a ainsi revendu totalement ses activités mobiles au japonais Sony en 2011, quand Motorola en faisait de même avec Google, qui a ensuite transféré ces activités au chinois Lenovo en 2016.

Quant à Nokia, autrefois numéro un mondial, c'est à un autre géant américain, Microsoft, qu'il a cédé son activité mobiles, devenus depuis les Windows Phones, avec un succès plus que relatif.

Considéré il y a encore quelques années comme un incontournable, le canadien Blackberry (BB ; TSX) a fini par suivre la même voie, en annonçant, le 29 septembre, abandonner la fabrication de téléphones.

Et c'est désormais au tour d'Apple de subir les contre-coups de sa domination.

Même si, une fois encore, la marque à la pomme résiste bien aux coups de boutoir de ses concurrents, la part de marché occupée par son iPhone a été dépassée ces dernières années par le sud-Coréen Samsung, actuel numéro un mondial à 23,4%, selon Gartner.

Pour le géant américain, dont les ventes sont en recul depuis le début de l'année et qui représente moins de 15% de part de marché au Q2 2016, la menace vient à présent du retard pris sur un certain nombre d'innovation.

«Apple est en retard sur l'intelligence artificielle, Siri n'est pas au niveau de ce que fait Google en la matière. Par ailleurs, ils n'ont pas de produit de réalité augmentée», rappelle ainsi Jérôme Lavigne.

Un constat qu'il convient de minorer en rappelant qu'Apple capture encore une part gigantesque des profits provenant du marché des téléphones intelligents. Entre autres parce que la marque contrôle justement à la fois le système d'exploitation et le matériel.

L'Asie en force

Les deux leaders du marché que sont Samsung et Apple doivent par ailleurs faire face à la montée en puissance des constructeurs chinois, qui profitent de leur assise sur leur immense marché local pour partir à la conquête du monde avec des smartphones sur toutes les gammes, souvent moins chers que la concurrence.

Certains, tels que Huawei, actuel troisième avec 8,3% du marché, n'hésitent pas à afficher leurs ambitions, espérant détrôner le duo américano-coréen. Pour autant, la marche est encore haute pour eux, de l'avis des analystes.

«Huawei a l'ambition et ils peuvent éventuellement y arriver. Mais leur capacité à atteindre le sommet reste pour l'heure loin d'être certaine. Ils doivent en faire plus sur les applications pour y arriver et relever le défi de la construction de la marque», estime ainsi Roberta Cozza.

«Aujourd'hui, ce sont les services que les fabricants vont apporter qui feront la différence : intelligence artificielle, réalité augmentée et autres. Quand vous maîtrisez à la fois les appareils et les programmes, vous êtes sur une voie royale», assure M. Lavigne.

Avec des appareils qui ne se différencient plus énormément en termes de performance, la valeur se fait à présent sur les services ou objets associés, un virage qui donne des idées aux géants américains du numérique.

En la matière, Google et son Pixel ne viennent que copier ce que d'autres, de Microsoft (MSFT ; Nasdaq) à Amazon (AMZN ; Nasdaq), ont tenté avant lui, sans beaucoup de réussite. Même Facebook (FB ; Nasdaq) tente de s'y mettre.

«Le modèle suivi est celui d'Apple, qui malgré son repli réalise encore des marges impressionnantes. Les Facebook, Amazon ou Google tentent d'y aller car ils ont compris l'intérêt de maîtriser à la fois la fabrication et les applications et services», explique Jérôme Lavigne, directeur technique du cabinet de conseil Niji.

Mais tous tentent de se faire une place sur un marché où les acteurs, en particulier asiatiques, sont, on l'a vu, toujours plus nombreux.

Sources des graphiques: Statista

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