Gérer, selon Glenn Chamandy


Édition du 17 Mai 2014

Gérer, selon Glenn Chamandy


Édition du 17 Mai 2014

Par Marie-Claude Morin

L.A. - À quel point planifiez-vous à long terme ?

G.C. - Chaque année, nous mettons à jour notre plan sur cinq ans et nous le soumettons à notre conseil d'administration. Nous le divisons en deux parties : la stratégie et les prévisions financières. Nous séparons les deux, parce que nous voulons comprendre la situation dans son ensemble, le big picture, pas seulement les chiffres. Parfois, vous ne devez pas vous préoccuper des chiffres, mais de la direction vers laquelle évoluent les choses.

L.A. - Est-ce un défi pour vous de vous dégager du court terme pour vous concentrer sur le long terme ?

G.C. - Non, pas du tout. Le seul moment où je regarde le court terme, c'est quand nous avons un problème, par exemple une rupture de stock. Mon équipe s'occupe du court terme et fait appel à moi de façon efficace et stratégique.

L.A. - Comment choisissez-vous vos collaborateurs ?

G.C. - La plupart travaillent dans l'entreprise depuis très longtemps, souvent depuis les années 1980 ou 1990. Ils ont acquis de l'expertise et une grande sagesse, ce qui est très important. Selon moi, l'expérience dans l'entreprise compte autant que les capacités intellectuelles. Nous essayons donc de développer nos gens à l'interne le plus possible. Si nous devons recruter à l'externe, nous tentons le plus possible d'embaucher à un niveau où nous pouvons faire grandir les gens, plutôt que de les parachuter au sommet. Lorsque nous embauchons un dirigeant nous disons toujours que la période d'apprentissage est de pratiquement trois ans. Avant de prendre des décisions éclairées, qui cadrent vraiment avec l'entreprise, ça prend du temps. Quelqu'un qui reste trois ans, toutefois, reste souvent à vie. Parce que pour ça, il faut être motivé, avoir de la drive, et ne pas avoir peur de se mouiller !

L.A. - Comment prenez-vous les décisions importantes dans l'entreprise ?

G.C. - Nous en discutons beaucoup. Nous avons une excellente communication et ne prenons jamais une décision si elle ne fait pas l'unanimité. Même si je suis le pdg ! Et lorsque nous sommes tous d'accord, nous appliquons toujours la règle des 48 heures : nous ne faisons rien durant ce délai, afin de continuer à réfléchir. Et je peux vous dire qu'assez souvent, nous modifions légèrement la stratégie après cette période. C'est ce qui nous permet de toujours aboutir à la bonne décision et de diminuer notre risque. Cela dit, nous bougeons plus vite que quiconque dans notre industrie. Nos concurrents ont besoin de six mois pour prendre une décision, alors que ça nous a pris six semaines pour acheter Gold Toe [un fabricant de chaussettes américain acquis pour 350 M $ US en avril 2011].

L.A. - Gildan risque-t-elle de devenir si grosse qu'elle sera difficile à gérer ?

G.C. - Non. La clé est de diviser l'entreprise en morceaux. Chaque division peut mener des projets en parallèle, sans être bloquée par ceux des autres. Nous sommes positionnés plus que jamais pour grandir. Toutes nos divisions ont d'excellentes perspectives de croissance interne, mais en plus, nous avons les capacités financières d'accélérer cette croissance en réalisant des acquisitions.

L.A. - Dans quelle mesure participez-vous aux acquisitions ?

G.C. - Je suis très engagé. Je n'achèterai aucun équipement, terrain ou usine sans l'avoir vu de près. Lorsque mon équipe a fait la vérification diligente et formulé des recommandations, mon rôle est de l'écouter et de m'assurer qu'elle a pris la bonne décision. Je veux comprendre ce que nous achetons, parce que je gère l'entreprise comme si c'était mon argent. C'est important, c'est ce qui nous différencie.

L.A. - Que dites-vous aux gens qui remettent en doute l'idée que vous êtes vraiment une entreprise canadienne ?

G.C. - Apple ne fabrique aucun de ses téléphones aux États-Unis... Dans un marché mondial, vous devez fabriquer vos produits là où c'est le plus adapté. Nous ne fabriquons pas au Honduras à cause des salaires ; nous fabriquons là parce que c'est un excellent endroit où faire des affaires. Nous avons de l'espace pour construire de grandes usines et automatiser. De plus, les gens veulent travailler pour nous là-bas, parce que nous leur permettons de faire partie de la classe moyenne.

L.A. - Une chose qu'on a critiquée est votre structure fiscale...

G.C. - Nous payons l'impôt canadien sur les ventes faites au pays, mais la réalité est qu'une faible partie seulement de nos ventes sont réalisées au Canada.

Nous fonctionnons comme toutes les multinationales du monde : nous payons nos impôts dans les pays où nous avons des activités. Notre division Vêtements imprimés est réellement installée à la Barbade. Le président habite là, tout comme le groupe marketing, les finances, les relations avec la clientèle... Notre bureau là-bas comprend 150 personnes ! Comme toutes les entreprises, nous cherchons à créer la plus grande valeur pour nos actionnaires, et les taxes et impôts représentent une grosse part de notre structure de coûts. Nous essayons donc de choisir des juridictions qui permettent de les minimiser, dans la mesure où cela cadre avec l'exploitation de l'entreprise. Nous sommes très à l'aise avec nos façons de faire.

***7,4 G $ - Le titre de Gildan s'échange maintenant à 60,60 $ en Bourse, une hausse de 73 % sur trois ans. Sa valeur boursière atteint maintenant 7,4 milliards de dollars.

***89,6 - L'an dernier, Gildan a réalisé 89,6 % de ses ventes aux États-Unis, 7,4 % en Europe et 3 % au Canada.

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