On dit couramment que la colère est mauvaise conseillère. Mais se pourrait-il qu'on rende les gens plus intelligents en risquant de les froisser plutôt qu'en étant complaisants ?
La recherche de Moons et Mackie montre que la colère peut être bénéfique à la résolution de problèmes si, d'une part, le problème à résoudre n'a aucun rapport avec le problème qui a provoqué la colère et si, d'autre part, ce problème ne présente pas d'effet de source. L'effet de source est un parti pris systématique qui influence notre jugement.
L'effet de source est accentué par la colère. Quand nous nous disputons avec quelqu'un, nous sommes souvent aveuglés par l'identité de la personne qui nous irrite et nous devenons sourds à ses arguments. Toutefois, si nous parvenons à nous extirper de cette dynamique et à nous concentrer sur un problème autre que la relation, notre acuité intellectuelle augmente. Nous devenons plus lucides parce que nous prenons une distance face à la source de notre colère.
S'il est une session de formation qu'on devrait donner aux dirigeants comme aux parents, c'est comment gérer leur colère. Les conflits sont inévitables, voire souhaitables, dans notre vie privée et dans notre vie professionnelle. Dès qu'il y a des différences à gérer, des gens à former, il faut s'attendre à faire face à des sentiments " négatifs " : l'impatience, la frustration, la rage, la peur. Ces sentiments sont inévitables. Les nier ne peut qu'appauvrir nos relations. Par exemple, nos enfants nous inquiètent ou nous énervent tous un jour ou l'autre. Il est de notre devoir d'intervenir si nous voulons les aider à régler leurs problèmes et à pro-gresser. Mais il faut le faire correctement, sinon nous risquons de leur faire du tort et de nuire à notre relation avec eux.
Bref, la colère, malgré le malaise qui l'accompagne souvent, peut être une merveilleuse conseillère, à condition qu'elle ne nous emporte pas. Elle est un moteur à quatre temps : le recul, l'alignement, la clarification et l'avancement. Bien utilisée, elle énergise grandement toutes nos relations.
Voici donc ce que pourrait être un mode d'emploi de l'énergie de la colère.
Laisser exploser sa colère n'est pas une bonne idée, surtout quand on est en position d'autorité. C'est comme vomir. Cela fait des dégâts et ce n'est pas bon pour l'image.
Quand la moutarde vous monte au nez, sortez ; cela vous permettra de vous calmer.
Définissez ce que vous voulez obtenir de la situation et centrez-vous sur votre objectif.
Évaluez l'état de la personne qui est devant vous et trouvez la façon la plus appropriée d'atteindre votre but. Il se peut que vous décidiez de rompre la conversation en signifiant à l'autre une fin de non-recevoir, d'user de stratégies afin qu'elle devienne réceptive à vos propositions ou à vos idées, ou encore de vous placer à ses côtés pour aller dans le même sens qu'elle.
Quel que soit votre choix, si vous êtes en possession de vos moyens, " sky is the limit ! "
COLÈRE À L'ÉTUDE
Une recherche réalisée à l'Université de Californie, à Santa Barbara, auprès d'étudiants qui devaient analyser un texte immédiatement après avoir été vertement critiqués, a montré que ces étudiants ont fait preuve de beaucoup plus d'acuité intellectuelle qu'un groupe de sujets de profil similaire dont la colère n'avait pas été provoquée préalablement.
nicole.cote@transcontinental.ca
