« La seule constance, c'est le changement »

Publié le 19/11/2009 à 17:07

« La seule constance, c'est le changement »

Publié le 19/11/2009 à 17:07

Par lesaffaires.com

 Caroline Ménard gagne sa vie en suggérant aux entreprises des manières de mettre en place une culture «permanente» de changement.


La conseillère principale de Brio Conseils aime tellement ça qu'elle profite de son passage d'un an comme présidente de la Jeune Chambre de commerce de Montréal pour dépoussiérer les manières de faire de l'organisation, la plus importante du genre en Amérique du Nord grâce à ses 1 400 membres. " On révise notre structure, nos programmes et le positionnement de notre offre de services, dit cette grande et jolie jeune femme aux yeux verts et au sourire facile. Je suis du genre à rigoler toute la journée. "C'est sans doute parce que les théories de Freud et de Lacan ne l'amusaient plus du tout que Caroline Ménard a troqué la psychologie, après ses trois années de baccalauréat à la fin des années 1990, pour l'administration à HEC Montréal.

" Au début, je ne comprenais rien ", confie celle qui a grandi à Les Cèdres, dans la région de Vaudreuil-Soulanges. Un an de mise à niveau plus tard, nouveau changement de cap : ce ne sont plus les ressources humaines qui l'intéressent, mais bien les organisations, leurs stratégies, leurs façons de communiquer.

Sa rencontre avec le professeur Alain Rondeau - " mon idole ", dit-elle - est une véritable révélation. À l'époque, l'homme est président du Centre d'études en transformation des organisations (CETO) de HEC Montréal. " On dit qu'on apprend dans l'action, et j'y crois. " Pendant ses deux années de maîtrise, elle réalise quatre mandats importants dans le secteur de la santé, dont un à l'hôpital Maisonneuve-Rosemont. Son constat : " La seule constance, c'est le changement. "

Gérér la transformation

Peut-être en raison de sa formation en psychologie, et également parce que c'est le premier milieu où elle est intervenue en tant qu'étudiante, la santé - et l'informatisation de son réseau - est son champ d'expertise. Elle a notamment été consultante chez CGI et travaille maintenant chez Brio Conseils, où elle est conseillère principale depuis bientôt quatre ans. " Le milieu dans lequel je travaille doit avoir un sens, estime-t-elle. J'ai un côté missionnaire. Même dans mon vocabulaire, je dis souvent : "Je dois évangéliser les gens". "

L'évangélisation, dans son cas, passe par l'acceptation des changements dans la vie quotidienne des gens. Un processus qui n'est jamais simple, dit Mme Ménard. " On parle souvent de résistance mais, dans les faits, les changements apportent plutôt des préoccupations. Et c'est lorsqu'on gère mal ces préoccupations que la résistance s'installe."

La gestion des bénéfices est essentielle à tout projet de transformation, poursuit-elle. " Si on fait des changements, c'est pour que ça rapporte. On ne change pas pour changer. "

La fibre entrepreneuriale

C'est par goût de l'aventure que Caroline Ménard n'a pas hésité à quitter, il y a quatre ans, le confort et la notoriété d'une très grande entreprise, CGI, pour participer au développement de Brio Conseils, croit Sylvie Charbonneau, présidente de cette PME. " Tout était à bâtir. Elle a eu un réflexe typique de ceux qui ont l'entrepreneuriat dans le sang ", constate Mme Charbonneau.

" Il fallait développer notre approche et notre clientèle, dit Caroline Ménard. C'est un très beau modèle, où l'être humain a sa place, ce qui est moins évident dans les grandes entreprises, où il est dilué en raison du nombre. Je le comprends, mais je préfère travailler dans des petites organisations, plus flexibles. "

Un jour, Caroline Ménard lancera sa propre entreprise. " Je ne serai pas totalement satisfaite tant que je ne l'aurai pas fait ", dit-elle.

" Elle possède la fibre entrepreneuriale ", confirme Louis Côté, président de Hint Innovation, une firme qui développe des systèmes de gestion financière pour les grandes entreprises. Vice-président, Entrepreneuriat, de la Jeune Chambre, il côtoie fréquemment Mme Ménard. " Elle a une capacité de mobiliser des gens sur qui elle n'a pas de véritable autorité, puisque ce sont tous des bénévoles. " Louis Côté croit que la psychologue en elle a quelque chose à voir avec sa capacité de gérer avec doigté la diversité, que ce soit le cheminement professionnel ou les traits de caractère. "C'est une rassembleuse. Sa force, c'est le consensus. C'est comme ça qu'elle exerce son leadership. "

" Elle écoute et consulte beaucoup ", souligne Pierre-Étienne Simard, avocat chez Fasken Martineau DuMoulin, qui l'a côtoyée alors qu'il était lui-même président de la JCCM et que Caroline était vice-présidente, Milieux d'affaires. " Lorsqu'il faut prendre une décision, elle est capable de rallier tout le monde. "

Donner au suivant

En attendant d'avoir sa propre entreprise, Caroline Ménard s'initie à la gestion en tant que présidente de la Jeune Chambre. Elle doit s'occuper des finances, du conseil d'administration, des problèmes quotidiens, de la représentation publique. " J'adore ça. "

Être gestionnaire, c'est un métier qui s'apprend dans l'action, dit-elle. " Je crois au mentorat. " À la JCCM, un conseil des parrains sert de comité consultatif. " Un autre bel exemple d'engagement pour ces gens d'affaires qui soutiennent la relève ! "

Cette contribution publique, Sylvie Charbonneau croit qu'elle fera toujours partie de la vie de Caroline, même si cela s'ajoute à de longues journées de travail.

" On apprend beaucoup à donner, dit Caroline Ménard. Et on reçoit beaucoup. Plus qu'on donne, en fait. Je dis à tout le monde : Essayez le bénévolat, vous ne le regretterez pas. "

Elle croit avoir conservé son côté naïf, candide, qui lui donne envie de " sauver le monde " et qui l'a poussée vers la psycho. " Je ne veux jamais le perdre. "

La cause des jeunes.. et des femmes

Caroline Ménard a participé, en septembre, au Laboratoire d'idées Urgence Leadership réunissant des personnalités du milieu des affaires et des membres de la relève. Deux tablées de jeunes gens sont venus expliquer à leurs aînés leur vision du monde.

" Il y a beaucoup d'incompréhension entre les baby-boomers et la génération Y. Les baby-boomers croient que nous sommes moins motivés qu'eux, mais c'est faux. Nous voulons simplement travailler différemment. Notamment dans la gestion travail-famille. "

La présidente de la Jeune Chambre n'a pas d'enfants pour l'instant. Mais elle voit bien à quel point la bataille n'est pas gagnée pour les femmes quand vient le temps de fonder une famille et de conserver un emploi au profil haut. " Elles manquent de temps. "

Elle a une opinion un peu à contre-courant sur le congé parental d'un an accordé par Québec à la naissance d'un enfant. Selon elle, c'est un cadeau empoisonné, car il confine les femmes dans un modèle unique qui peut leur être défavorable dans leur carrière. " Une année, c'est énorme. T'as le temps de te faire oublier. "

Il est mal vu aujourd'hui de soulever la question des inégalités, soutient-elle. " Mais il faut voir les chiffres. Les femmes sont encore sous-représentées au sein des conseils d'administration et parmi les hauts dirigeants et les entrepreneurs. Les hommes occupent encore les poles positions. "

Le leadership selon Caroline Ménard

Les Affaires - Pourquoi la Jeune Chambre de commerce a-t-elle mis sur pied le programme Leadership Action ?

Caroline Ménard - Pour répondre au besoin de développer la relève, notamment en raison de tous les départs à la retraite. Et il faut que les jeunes prennent leur place.

L.A. - À quoi ressemble le leader d'aujourd'hui ?

C.M. - Il a un esprit plus collectif qu'auparavant. C'est quelqu'un qui fonctionne en réseau. C'est un rassembleur qui canalyse les forces de chacun vers un objectif commun. Il doit aussi être capable de se remettre en question et avoir un sens de l'autodérision.

L.A. - Et quelles sont les qualités de leader de Caroline Ménard ?

C.M. - J'ai une capacité et une volonté de réussir. Je suis aussi une rassembleuse. Je crois énormément au potentiel des gens. Il faut les écouter. Quelles-sont leurs préoccupations ? Il est difficile d'aller dans une direction si nos collègues ne veulent pas suivre, même si, parfois, il faut y aller si on pense que c'est la bonne chose à faire. Il faut alors mettre le poing sur la table, trancher, sinon on tourne en rond. Mais il faut d'abord écouter. Je gagne souvent plus à écouter qu'à parler.

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