Nouveau quotidien au Québec : des experts surpris se perdent en conjectures

Publié le 29/03/2010 à 18:22

Nouveau quotidien au Québec : des experts surpris se perdent en conjectures

Publié le 29/03/2010 à 18:22

Photo: lesaffaires.com

L’annonce parue dans La Presse et sur le site Workopolis, propriété de Gesca, intrigue au plus haut point des experts du monde médiatique, qui jugent étonnant qu’un investisseur puisse vouloir lancer un nouveau quotidien dans le contexte de crise que traversent les médias écrits.

Rappelons que samedi dernier, on pouvait lire dans ces médias qu’ « une société d’investissement privée (était) à la recherche d’une équipe dynamique pour lancer un nouveau quotidien francophone au Québec.» Des postes d’éditeur, de directeur de l’information, de rédacteur en chef, de directeur, arts & spectacles, de directeur des ventes publicitaires, de directeur de production, de journalistes pigistes et de réceptionniste étaient sollicités.

Joint par lesaffaires.com, le cabinet d’avocats Smart & Biggar, à qui on doit se référer pour offrir sa candidature, a refusé de préciser l’identité de son client, nous référant à la personne-ressource dans le dossier, M. Philippe Lazure, à qui on doit faire parvenir un courriel.

Le secrétaire général du Centre d’études sur les médias de l’Université Laval, Daniel Giroux, s’est montré surpris par cette annonce. «Le seul à avoir parlé récemment de lancer un nouveau quotidien au Québec, c’était Quebecor, qui voulait lancer un gratuit à Québec», mentionne-t-il. C’était lors du conflit de travail au Journal de Québec. Depuis, l’entreprise semble s’être ravisée, compte tenu de l’échec du lancement d’un quotidien francophone gratuit dans la région d’Ottawa.

Alors que les quotidiens payants sont en déclin, le terrain pour les gratuits à Montréal est déjà «pas mal occupé», souligne M. Giroux. Quant aux formules spécialisées sur internet, M. Giroux estime qu’il n’est «pas évident » que ça puisse être payant dans un petit marché comme le Québec. «L’offre en information est déjà abondante, avec Radio-Canada notamment qui propose beaucoup de contenu gratuit», dit-il.

Même à l’international, des groupes comme Rue89 et Médiapart n’ont pas encore réussi à développer un modèle d’entreprise viable. «Ce serait un grand risque de se lancer dans une telle aventure au Québec», affirme-t-il.

De son côté, Bernard Motulsky, titulaire de la Chaire de relations publiques et communications marketing à l’UQAM, souligne l’état moribond des journaux québécois traditionnels, qui rend selon lui le lancement d’un quotidien payant imprimé improbable. Pour autant, il se montre moins sceptique que son collègue.

Le fait que la société cherche à se doter d’un directeur, arts & spectacles (sans qu’il soit fait mention qu’on recherche aussi un directeur, sports ou encore un directeur, économie) lui fait spéculer qu’il pourrait s’agir d’un quotidien gratuit avec une forte teneur en information artistique.

«Il y a peut-être une place pour une information culturelle quotidienne à Montréal, avec la clique du Plateau et les jeunes», mentionne-t-il. De plus, il fait valoir que le Canada et le Québec sont mal servis en quotidiens en comparaison des États-Unis, alors qu’il y a à l’inverse proportionnellement plus d’hebdos au Canada qu’aux États-Unis.  

Pas si fou que ça

C’est cependant Marc-François Bernier, professeur de communication à l’Université d’Ottawa, qui accueille avec le plus d’enthousiasme l’idée d’un nouveau quotidien québécois francophone, même s’il dit ne pas avoir la moindre idée de qui pourrait en être le promoteur et qu’il avoue avoir d’abord cru à un «canular»

Pour cet expert, le lancement d’un nouveau quotidien au Québec ne pourrait se faire que sur les nouvelles plateformes que sont l’internet, le iPad à venir et les téléphones intelligents.

«Le problème des médias traditionnels est qu’ils ont beaucoup de dettes et sont aux prises avec une structure de coûts qui date d’une autre époque qui correspondait à l’âge d’or des journaux», explique-t-il.

L’absence de coûts d’impression et de livraison, combinée à une salle de rédaction peu coûteuse, dépourvue de convention collective onéreuse, pourrait rendre cette aventure rentable, si le produit est suffisamment niché et qu’il rejoint bien un petit public à qui les annonceurs publicitaires souhaitent s’adresser. La «société d’investissement privée» doit toutefois avoir les reins solides financièrement pour pouvoir essuyer des pertes au début. «Pour que ça marche, il ne faut pas des millions, il faut des dizaines de millions», avance-t-il.

 

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