Le mythe chinois

Publié le 01/06/2008 à 00:00

Le mythe chinois

Publié le 01/06/2008 à 00:00

Cinq cents ans plus tard, la Chine deviendra-t-elle enfin une "usine mondiale", comme le fut l'Angleterre du 19e siècle lorsqu'elle produisait avec seulement 2 % de la population mondiale la moitié des biens manufacturés de la planète ?

Peu de pays peuvent se vanter d'avoir été ou d'être encore aujourd'hui une usine mondiale. Après l'Angleterre de la révolution industrielle, on compte les États-Unis à partir des années 1880, et le Japon depuis les années 1970. L'expression "usine mondiale" n'a rien de très scientifique : elle désigne les pays qui sont des géants industriels en terme de volumes de biens vendus dans le monde et qui exercent un certain leadership technologique dans le secteur manufacturier.

Si la Chine remplit le premier critère pour plusieurs biens manufacturés, elle est encore loin d'être un géant sur le plan des innovations technologiques ou de sa contribution en dollars au commerce international. Certes, ce pays est le premier producteur mondial de centaines de produits qui nous servent au quotidien. Elle fabrique pour l'ensemble des consommateurs de la planète 90 % des lecteurs de DVD, 85 % des jouets, 85 % des montres, 70 % des photocopieurs, 60 % des bicyclettes, 58 % des téléphones, 55 % des appareils photo et 55 % des ordinateurs portables, pour ne citer que les biens que l'on trouve dans nos maisons.

Ces chiffres masquent une réalité bien connue des statisticiens de l'Organisation mondiale du commerce : malgré un taux de croissance de son PIB de plus de 9 % par an depuis 1978, la Chine ne contribue qu'à hauteur de 6 % au commerce mondial. Elle doit produire une centaine de millions d'appareils DVD pour se procurer un seul appareil Boeing 747. Malgré sa quatrième place avec 5 % de la production industrielle mondiale, le pays de Confucius est encore loin des États-Unis (20 %) et du Japon (15 %).

Les économistes chinois ne laissent planer aucun doute : la Chine n'est pas encore une puissance industrielle, parce qu'elle ne fabrique que des produits bas de gamme et qu'elle n'a pas le savoir technologique pour devenir un centre manufacturier mondial. La valeur réalisée par le secteur manufacturier chinois représente seulement un cinquième de celle des États-Unis et un quart de celle du Japon. Sans parler de la faible productivité des usines chinoises, qui ne correspond qu'à 1/26e de celle du Japon et à 1/25e de celle des États-Unis.

Même les dirigeants chinois établis à Beijing n'ont pas la prétention de dire que leur pays est une usine mondiale. Ils savent très bien qu'il y a un demi-million d'entreprises de capitaux étrangers en Chine, qui produisent le tiers des biens qui y sont manufacturés, avec une part sans cesse grandissante. Ils font la distinction entre les produits manufacturés véritablement chinois (Made by China) et ceux qui sont fabriqués par les entreprises étrangères implantées en Chine (Made in China). Ils savent que si la Chine devient un jour une usine mondiale, cette usine appartiendra majoritairement à des millions d'actionnaires répartis dans une centaine de pays de la planète.

agosselin@videotron.ca

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