Desjardins écolo avant l'heure

Publié le 20/11/2008 à 00:00

Desjardins écolo avant l'heure

Publié le 20/11/2008 à 00:00

Par François Rochon
À quel moment est apparue la préoccupation pour le développement durable chez Desjardins ?

Elle a coïncidé avec mon arrivée, en 1988. Lors de ma première assemblée générale, Claude Villeneuve, alors délégué de la Caisse populaire de Saint-Prime, a réclamé que le Mouvement adopte une politique environnementale. On ne parlait pas encore de développement durable à ce moment-là. À la fin des années 1980 et au début des années 1990, j’ai parlé sur plusieurs tribunes de l’Option environnementale Desjardins. Il y a eu ensuite un effet d’entraînement ; mais pendant quelques années, Desjardins a été le chevalier de la cause environnementale dans le domaine financier au Québec.

Quels ont été vos premiers gestes en faveur de l’environnement ?

Dans le cadre de l’Option environnementale Desjardins, nous avons créé le fonds Desjardins Environnement, un fonds de placement géré par Fiducie Desjardins. Nous avons invité toutes les grandes entreprises canadiennes à y inscrire leur titre. Pour cela, elles devaient prouver qu’elles avaient une politique environnementale. Beaucoup d’entreprises qui n’en avaient pas se sont retrouvées, l’année suivante, avec une politique en règle, pour pouvoir s'inscrire au fonds. Ce projet a donc eu de belles retombées sur le plan environnemental et financier, car le fonds a connu un très bon rendement !

Depuis, comment a évolué votre politique de développement durable ?

Parce que nous sommes une coopérative, deux des trois dimensions du développement durable, soit le développement économique et le développement social, font partie de notre culture depuis nos origines. Quant au volet environnemental, Desjardins y était déjà sensibilisé. Raymond Blais, qui était président de Desjardins avant Claude Béland, avait créé un fonds de deux millions de dollars pour aider Cascades à construire une usine de pâtes recyclées à Breakeyville. En 2003, lors de l’assemblée générale, les délégués des caisses ont voté à 97 % pour que Desjardins transforme son Option environnementale en une politique de développement durable. Notre politique actuelle a été adoptée par le Conseil en octobre 2005.

Quelles sont les actions concrètes qui illustrent cette politique de développement durable ?

Nos actions sont réparties en trois grands volets : la gestion des matières résiduelles, l’efficacité énergétique et les achats responsables. Le Mouvement dépense 600 millions de dollars par année en achats de biens et services et 31 millions de dollars en consommation d’énergie ! Desjardins a notamment créé le programme Défi relevé vert, en mai 2006, pour convaincre les membres de remplacer leur relevé de compte sur papier par un relevé électronique. L’objectif visé était l’adoption de 100 000 relevés virtuels en trois ans avec, à la clé, pour chaque nouveau relevé virtuel, la plantation d’un arbre, en collaboration avec la Corporation Saint-Laurent, mandataire du Jour de la Terre au Québec. Au bout de six mois, l’objectif était atteint! L’intérêt de ce projet, c’est qu’il fait intervenir le membre, donc le citoyen, et qu’il est en même temps porteur d’une mission éducative.

Quel est votre plan pour réduire la consommation d’énergie de Desjardins ?

Un programme d’efficacité énergétique se met en place graduellement dans le parc immobilier de Desjardins. Nous visons 6 % de diminution de la consommation d’énergie dans les bâtiments sur trois ans, ce qui peut être obtenu aisément, simplement en optimisant l’utilisation des équipements en place. Du même coup, nous améliorerons la qualité de l’air, pour le bénéfice des employés. Le même dossier couvre donc à la fois l’économique, le social et l’environnemental. En analysant notre consommation énergétique, nous avons fait une grande découverte : les grandes entreprises sont facturées en fonction du barème tarifaire des 15 minutes de plus forte demande d’énergie. Si nous parvenons à gérer ces 15 minutes, nous réduirons de beaucoup la facture énergétique ; mais cela, la plupart des entreprises ne le savent pas. Nous travaillons sur le fameux concept du « négawatt », c’est-à-dire le mégawatt non dépensé, qui coûte moins cher à économiser qu’à produire.

Que faites-vous pour réduire la production de gaz à effet de serre de Desjardins ?

Nous voulons améliorer notre gestion des transports, notamment en installant des systèmes de vidéoconférence dans les locaux de la Fédération, dans les grands centres et en région. Nous avons déjà la navette Desjardins qui transporte les employés quotidiennement entre Lévis et Montréal. De plus, Desjardins s’est engagé à tenir des assemblées générales annuelles « zéro carbone ». Pour compenser les émissions de CO2 engendrées par le déplacement des participants, et estimées à 124 tonnes, 500 arbres ont été plantés. En 2006, on a obtenu le « zéro carbone ». En 2007, on vise le « Zéro carbone, zéro déchet ».

En matière d’achats responsables, que faites-vous ?

Nous demandons à nos fournisseurs de réduire au maximum leurs emballages. Nous posons des conditions au moment du renouvellement des contrats d’achat. Nous informons notre fournisseur de nos exigences et nous allons en appel d’offres. Par exemple, au moment du renouvellement de notre partenariat avec Bell, nous nous sommes entendus pour récupérer les téléphones cellulaires des membres du personnel et de nos clients. Tout contrat important qui se signe avec Desjardins doit maintenant intégrer notre politique de développement durable. Notre politique d’achat responsable implique la formation des acheteurs, le développement d’une grille simple d’analyse des entreprises qui nous envoient leur offre de services et la mise en place d’un site Web pour tenir nos fournisseurs informés de nos critères et de nos orientations.

Comment faites-vous pour intégrer vos politiques de développement durable à la stratégie globale de votre entreprise ?

La stratégie de Desjardins a toujours été fondée sur le long terme ; cela constitue un immense avantage par rapport à nos concurrents, qui sont soumis à la tyrannie du trimestre et à l’atteinte des niveaux de rentabilité nécessaires pour satisfaire l’actionnaire. Desjardins parle de présent, de futur, de pérennité… Conjuguer l’économique et le social, cela fait 100 ans qu’on fait ça !

Le Mouvement Desjardins, ce sont plusieurs entités autonomes, 40 600 employés et une armée de fournisseurs. Cela fait bien du monde à convaincre d’adopter la politique de développement durable. Quelle est votre stratégie ?

Nous mobilisons et sensibilisons nos employés. Nous concluons des partenariats avec les membres et avec les grandes entreprises du Québec qui sont nos fournisseurs de services. Nous devons d’abord les informer des enjeux du développement durable, puis les inciter à revoir leurs choix de consommation, leurs comportements et leurs modes de production. Bien sûr, l’adoption de la politique de développement durable par les caisses se fait d’une manière volontaire. Nous faisons valoir que c’est une politique du Mouvement qui a été adoptée en assemblée générale avec un fort taux d’adhésion, mais nous respectons le rythme des caisses. Pas de coercition. Un des facteurs de réussite est l’engagement de la haute direction dans l’entreprise. Tout se fait avec le concours des équipes de gestion. Nous commençons avec la Fédération, puis les filiales, puis les caisses. Notre stratégie est très structurée. La Fédération développe le programme et les outils ; nous informons ensuite les caisses des résultats obtenus, puis, nous les invitons à mettre en oeuvre la politique.

Pour répondre aux objectifs du développement durable, vos exigences doivent parfois être contraignantes pour vos membres ou vos employés. Comment réagissent-ils ?

Au début, ils sont parfois étonnés devant nos critères, mais ils y adhèrent rapidement. Il faut habituer les gens à penser en fonction des trois pôles du développement durable. La dominante a toujours été l’économie ; la composante sociale, on l’a naturellement, chez Desjardins, mais il faut amener les gens à intégrer l’environnement. C’est une exigence de plus. Dans le quotidien, à chaque étape décisionnelle, on passe par toute la grille de développement durable. Il faut élargir nos critères d’évaluation par rapport à la politique environnementale. Notre objectif est de susciter l’adhésion, de faire en sorte que chacun se sente concerné dans tous les secteurs d’activité du Mouvement. Il faut que les gens prennent en charge le dossier et qu’ils le portent.

Vous faites beaucoup parler de vous avec le développement durable. C’est bon pour votre image…

Oui, Desjardins a pris beaucoup d’initiatives au cours de la dernière année, mais je vous assure que ce n’est pas un exercice d’image publique ! Beaucoup de ces initiatives ne sont pas coûteuses. Notre partenariat avec le site Ethiquette.ca, qui liste des entreprises socialement responsables, par exemple, crée une relation gagnant-gagnant. Ce partenariat donne de la visibilité à ces entreprises et s’inscrit bien dans notre volet éducatif. Même chose pour le Guide du bureau Vert : des organisations externes nous demandaient l’autorisation de l’utiliser. Nous l’avons finalement rendu accessible sur notre site. Tous nos outils sont disponibles gratuitement pour les autres entreprises. Nous essaimons la bonne nouvelle ! www.desjardins.com/frla_ propos/profil/difference/guide

Magazine Vision Durable, mai 2007

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