Pourquoi ce gestionnaire boude l'euphorie Trump?

Publié le 28/12/2016 à 06:30, mis à jour le 28/12/2016 à 16:19

Pourquoi ce gestionnaire boude l'euphorie Trump?

Publié le 28/12/2016 à 06:30, mis à jour le 28/12/2016 à 16:19

Par Dominique Beauchamp

Brandon Snow, gestionnaire de portefeuilles, garde une encaisse élevée.

Les élections américaines ont provoqué un raz-de-marée rarement vu tant en Bourse que dans le marché obligataire. Brendon Snow, de Cambridge Global Asset Management, n’embarque pas sur la vague montante.

«Je ne me rappelle pas d’un tel revirement où la psychologie des investisseurs est passée du pessimisme à l’euphorie», évoque le gestionnaire de Toronto.

À ses yeux, la hausse boursière, les sommets répétés et la rotation éclair dans les titres financiers et cycliques reflètent surtout une ruée des investisseurs mal positionnés et désireux de racheter leur année.

«En janvier, tous craignaient la déflation. Maintenant, les investisseurs achètent sans réserve l’espoir que suscitent les politiques pro-croissance de Donald Trump», dit en entrevue le gestionnaire de 37 ans.

Les titres bancaires et industriels en particulier ont grimpé si rapidement que M. Snow a encaissé des gains dans certains placements de longue haleine, tels que le chemin de fer Canadien Pacifique(Tor., CP, 193,23$), le distributeur de machinerie Finning(Tor., FTT, 26,39$) ou l’ingénieur Fluor(NY, FLR, 54,17 $US), dont les cours «avaient devancé les évènements».

Le gestionnaire a aussi réduit ses placements dans certaines banques régionales. Il a par contre ajouté à ses actions dans l’assureur en dommages Chubb(NY, CB 133,24$US), qui a encore beaucoup de synergies de distribution et d’exploitation à tirer de son mariage à ACE.

Encaisse de 18%

L’amateur de titres de qualité bon marché trouve moins de chaussures à son pied depuis un bon moment déjà. Son encaisse tourne autour de 18% du portefeuille depuis 18 mois.

«Nous préférons rester patients et attendre les occasions que de courir après un train en marche. Nos liquidités nous offrent beaucoup de flexibilité», évoque le gestionnaire du Fonds Catégorie de société d’actions canadiennes Cambridge.

Si certains titres ciblés baissaient de 8% à 15%, par exemple, il serait acheteur.

Dans le secteur de la santé, le portefeuilliste vient d’acheter le titre de la pharmaceutique suisse Roche, qui a souffert des gazouillis de Donald Trump concernant les prix des médicaments.

«Ses médicaments sont moins sujets aux pressions des autorités que d’autres», fait valoir M. Snow.

Son portefeuille continue de détenir le pharmacien Walgreen Boots Alliance(NY,WBA, 86,06 $US), qui gagne des parts de marché peut importe les prix de médicaments. La multinationale devrait aussi profiter des économies d’échelle de l’achat de la chaîne Rite Aid(NY, RAD, 8,17$US), qui devrait clore sous peu.

Il faudrait toutefois une chute beaucoup plus prononcée des cours pour que l’encaisse disparaisse.

«Nous ne sommes pas du tout pessimistes, mais lorsque les cours incorporent déjà les bonnes nouvelles, le potentiel est plus limité», dit-il.

À son avis, la présidence de Donald Trump ne provoquera pas le changement de régime pour la croissance économique, l’inflation et les taux que certains prédisent.

«Je crois que les investisseurs mettent trop l’accent sur les aspects positifs de ses politiques et pas assez sur les risques potentiels d’une appréciation du dollar américain sur les marchés émergents ou d’un conflit commercial avec la Chine par exemple», estime le financier.

Dans cet environnement imprévisible, les entreprises américaines dont le marché est surtout local devraient mieux s’en tirer, croit-il.

La hausse des taux accroîtra bien sûr le coût d’emprunt de bien des entreprises. «Je ne suis pas sûr que plusieurs sont prêtes à voir leur taux d’emprunt passer de 2,5 à 3,5%», indique-t-il.

Le gestionnaire surveille de près les écarts qui séparent le rendement des obligations des sociétés de celui des obligations gouvernementales de même échéance pour prendre la mesure de ces pressions.

Alphabet, Tim Hortons et Loblaw en portefeuille

Les titres en portefeuilles sont tous choisis pour leurs mérites propres, peu importe la conjoncture. L’approche de Cambridge met l’accent sur les entreprises offrant un bon bilan, des flux de trésorerie élevés, des avantages concurrentiels durables ou tout au moins un bon pouvoir pour imposer leurs prix.

En technologie, son fonds détient la société-mère de Google, Alphabet(Nasdaq,GOOG, 794,20 $US) justement pour la force de frappe et les flux de trésorerie massifs que lui procurent ses activités principales.

«En plus, la société répartit mieux qu’avant son capital et pourrait monétiser des filiales moins stratégiques. Tout ça pour un multiple d’évaluation inférieur à celui du S&P 500, abstraction faite de l’encaisse», explique le gestionnaire.

Le franchiseur des restaurants Burger King et Tim Hortons, Restaurants Brands International(Tor., QSR, 64,41$) se hisse aussi parmi les 15 plus importants placements du fonds. «Le franchisage est très rentable, encore plus entre les mains d’un exploitation aguerri qui veut augmenter le rendement des flux de trésorerie et les marges. La société rembourse aussi rapidement sa dette», dit-il.

L’automne dernier, M. Snow a ajouté l’épicier Loblaw(Tor.,L, 70,72 $) au placement de longue date dans George Weston(Tor., WN, 113,73$), sa société-mère.

«Nous préférons la valeur d’aubaine de Weston et le potentiel de son surplus de capital, mais Loblaw est redevenu attrayant par rapport à la progression de ses bénéfices», précise le financier.

À la une

Compétitivité: Biden pourrait aider nos entreprises

Il y a 49 minutes | François Normand

ANALYSE. S'il est réélu, Biden veut porter le taux d'impôt des sociétés de 21 à 28%, alors qu'il est de 15% au Canada.

Et si les Américains changeaient d’avis?

EXPERT INVITÉ. Environ 4 électeurs sur 10 âgés de 18 à 34 ans déclarent qu’ils pourraient changer leur vote.

L’inflation rebondit en mars aux États-Unis

Mis à jour à 13:47 | AFP

L’inflation est repartie à la hausse en mars aux États-Unis, à 2,7% sur un an contre 2,5% en février.