Et si vous vous inspiriez de la sagesse de l'empereur Tang...

Publié le 28/02/2017 à 06:06, mis à jour le 28/02/2017 à 06:27

Et si vous vous inspiriez de la sagesse de l'empereur Tang...

Publié le 28/02/2017 à 06:06, mis à jour le 28/02/2017 à 06:27

Une sagesse d'hier troublante d'actualité... Photo: Tang

La dynastie Tang a duré près de trois siècles : elle a été l'une des plus longues de l'Histoire de la Chine. Tang Taizong, son deuxième empereur qui régna de 626 à 649, aimait à s'entretenir avec ses ministres à propos, entre autres, de l'art de diriger, de la science de guerroyer et de l'importance de se montrer vertueux. Ses entretiens sont devenus un classique, à tel point qu'ils sont encore aujourd'hui étudiés par les dirigeants d'entreprise et les gens d'affaires de toute l'Asie.

La bonne nouvelle du jour, c'est que ces entretiens-là viennent tout juste d'être traduits en français, et que la maison d'édition Flammarion a eu la gentillesse de m'en faire parvenir un exemplaire. Son titre : Le Guide de l'empereur Tang – Sagesse d'hier pour leaders d'aujourd'hui.

J'ai été littéralement fasciné par l'intelligence qui s'en dégage. C'est que ce livre a pour ambition d'accompagner toute personne en situation de leadership, et de l'éclairer sur des questions de management tout à fait actuelles :

– comment apprendre à mieux se connaître;

– comment évaluer les autres;

– quel poids accorder à la moralité d'une personne;

– comment exercer son autorité;

– comment rendre une organisation plus efficace;

– comment inscrire sa réussite dans la durée;

– etc.

Mon nouveau livre : 11 choses que Mark Zuckerberg fait autrement

Vous voilà intéressés à votre tour? Parfait, je ne résiste donc pas au plaisir d'en partager de ce pas deux ou trois extraits avec vous:

> Laisser s'exprimer les avis divergents

«Taizong exigeait des fonctionnaires de ses trois départements de réfléchir en toute indépendance, d'être fidèles à leurs principes, de signifier leur désaccord le cas échéant et de ne pas se défausser sous prétexte de sauver la face. Il dit : «Le Secrétariat et la Chancellerie ont été créés pour s'équilibrer afin d'éviter que des erreurs soient commises. Il est naturel qu'ils avaient des opinions différentes. Certaines opinions sont bonnes, d'autres sont mauvaises. Peu importe, les personnes dont les opinions divergent ont un même objectif : servir l'intérêt public.

«Aujourd'hui, certains fonctionnaires s'efforcent de maquiller leurs fautes. Ils répugnent à la critique et honnissent ceux qui disent ce qu'ils pensent. D'autres sont prêts à tout pour éviter les conflits. Ils ont beau savoir qu'une décision est mauvaise, ils préfèrent obtempérer parce qu'ils ont peur de faire perdre la face à leurs supérieurs. Ce type de comportement doit cesser. Il faut qu'ils comprennent que perdre la face n'est rien quand l'intérêt public est en jeu.

«Sous la dynastie Sui, de nombreux fonctionnaires avaient une attitude équivoque. Ils acquiesçaient face à leurs supérieurs, mais se plaignaient dès qu'ils avaient le dos tourné. Ils se croyaient malins et pensaient que la situation ne se retournerait jamais contre eux. Ils avaient tort. Leur dynastie a connu une fin désastreuse. Ils ont beaucoup souffert et l'opinion les a voués aux gémonies.»

> Apprendre à déléguer

«Taizong interrogea Xiao Yu, ancien premier ministre de la dynastie Sui, sur la personnalité de l'empereur Wendi : «Quel type de dirigeant était-il?

– L'empereur Wendi était un dirigeant discipliné et travailleur qui prenait sa fonction très au sérieux, répondit Xiao Yu. Il organisait des audiences du lever au coucher du soleil. Ses ministres et lui discutaient avec une telle ferveur qu'il leur arrivait d'oublier de se nourrir. Il manquait sans doute de sagesse, mais il était consciencieux et s'efforçait d'être un bon dirigeant.

– Vous ne connaissez qu'une facette de cet homme, répliqua Taizong. Il se croyait intelligent, mais il n'était pas vraiment sage. Il tranchait lui-même sur tous les sujets, importants ou non, parce qu'il ne faisait pas confiance à ses ministres. Il avait beau s'épuiser à la tâche, il ne pouvait pas tout faire. Ses ministres savaient qu'il était soupçonneux et n'osaient pas lui donner des conseils honnêtes. Ils se contentaient d'approuver ce qu'il disait.»

«Taizong poursuivit en expliquant quelle était sa méthode : «Mon style est différent. Nous sommes à la tête d'un grand pays. Nous avons de nombreuses questions à régler quotidiennement. Elles doivent d'abord être soumises aux fonctionnaires des départements concernés, en suite le premier ministre peut me faire ses recommandations.

«Chacun a des limites. Un dirigeant a besoin d'avoir des ministres qui le soutiennent. S'il a trop de dossiers à manier seul, il est voué à commettre des erreurs. Comment pourrait-il avoir systématiquement raison? Imaginons que cinq des dix décisions qu'il doit prendre quotidiennement soient mauvaises. Au fil des jours et des mois, ses erreurs s'accumuleront, et tôt ou tard elles provoqueront des catastrophes. Il vaut bien mieux déléguer les responsabilités à des personnes de valeur.»

> Des garde-fous contre le relâchement

«Seriez-vous prêt à commenter les résultats de la politique que je mène?» demanda Taizong à Wei Zheng.

«Votre Majesté est sur le trône depuis plus de dix ans. Notre pays est riche et puissant, notre territoire s'est étendu, de nombreux émissaires étrangers viennent jusqu'ici nous témoigner leur respect. Votre Majesté jouit d'un prestige exceptionnel. En revanche, vous êtes moins exigeant sur la vertu que lors de vos jeunes années.

– Comment cela se fait-il?

– Je vous ai connu à une époque où vous attachiez beaucoup d'importance aux vertus. Aujourd'hui, vous êtes plus arrogant et plus content de vous. Vous êtes en droit, certes, de vous vanter de belles réussites, mais vous ne cultivez plus votre versant moral.

– Quelles erreurs ai-je commises pour en arriver là?

– Au début de votre règne, comme vous craigniez que vos subordonnés n'osent s'exprimer franchement, vous n'avez pas ménagé vos efforts pour les y encourager. Trois ans plus tard, vous acceptiez toujours les remontrances de bonne grâce. Mais depuis peu, vous répugnez à toute critique. Certes, vous prêtez attention aux remontrances des uns et des autres, mais à contrecoeur. Dans votre for intérieur, vous n'acceptez pas les objections.»

«Wei Zheng cita plusieurs exemples dont Taizong reconnut qu'ils étaient vrais.

«À présent, vos subordonnés ont peur de vous, ajouta-t-il prudemment, parce que vous mettez en cause leurs motivations profondes. Vous soupçonnez ceux qui sont d'accord avec vous de faire de la politique partisane. Et vous traitez comme de la calomnie tout franc conseil. Si bien que les honnêtes gens n'osent dire ce qu'ils pensent tandis que les délateurs prospèrent. Au fond, j'ai peur que vous n'alliez droit à l'échec.

– Vous êtes le seul à oser me parler ainsi, répondit Taizong. Je ne pensais pas avoir tant changé. Je comprends à présent que je m'expose à de graves problèmes. Je vous promets d'y remédier.»

De sages conseils, n'est-ce pas? Je vous l'avais bien dit...

Le Guide de l'empereur Tang (Flammarion, 2017) sera disponible en librairie le 16 mars. J'espère de tout coeur que irez faire un tour dans celle qui est la plus proche de chez vous, histoire d'au moins le feuilleter.

En passant, le sage chinois Lao Zi a dit dans son Tao Tö King : «Le meilleur gouvernement est celui dont la présence se fait oublier».

Découvrez mes précédents billets

Mon groupe LinkedIn

Ma page Facebook

Mon compte Twitter

Et mon nouveau livre : 11 choses que Mark Zuckerberg fait autrement

 

À propos de ce blogue

EN TÊTE est le blogue management d'Olivier Schmouker. Sa mission : aider chacun à s'épanouir dans son travail. Olivier Schmouker est chroniqueur pour le journal Les affaires, conférencier et auteur du bestseller «Le Cheval et l'Äne au bureau» (Éd. Transcontinental), qui montre comment combiner plaisir et performance au travail. Il a été le rédacteur en chef du magazine Premium, la référence au management au Québec.

Olivier Schmouker

Blogues similaires

L’exclusion des cadres des casinos du droit à la syndicalisation serait constitutionnelle

L’Association des cadres de la Société des casinos du Québec a déposé une requête en accréditation syndicale en 2009.

Les salutations de Jacques Ménard... ainsi que les miennes

Édition du 30 Juin 2018 | René Vézina

CHRONIQUE. C'est vraiment la fin d'une époque chez BMO Groupe financier, Québec... et le début d'une nouvelle. ...