Acquisitions: la manne n'est pas finie, mais elle s'essouffle

Publié le 19/01/2016 à 17:46

Acquisitions: la manne n'est pas finie, mais elle s'essouffle

Publié le 19/01/2016 à 17:46

Il en coûte plus qu’avant pour les entreprises d’emprunter. Cela modèrera l’appétit pour les transactions, mais la manne est loin d’être finie.

L’année 2015 a vu 2800 milliards de dollars américains de transactions conclues dans le monde, un peu moins que le record de 3100 milliards établi en 2007.

En 2016, la machine s’essoufflera parce que le coût en capital augmente pour les entreprises qui empruntent ou qui émettent des actions pour financer leurs transactions.

La première hausse du taux directeur par la Fed en presque dix ans a accru le taux préférentiel chez nos voisins du Sud. Ce changement de régime s’est rapidement répercuté jusqu’ici comme en témoigne la légère hausse des taux hypothécaires par les banques d’ici.

Les banques canadiennes passent aussi leur propre portefeuille de prêts au peigne fin, surtout dans le secteur de l’énergie, afin de s’éviter de mauvaises surprises et de se constituer des réserves de capital.

Surtout, il est plus difficile et plus dispendieux qu’avant pour les entreprises d’emprunter sur le marché des obligations parce que la chute du pétrole et le ralentissement économique font fuir les acheteurs.

Cela fait non seulement baisser les obligations de sociétés déjà en circulation, mais les entreprises doivent dorénavant offrir un coupon d’intérêt plus élevé qu’avant pour vendre les obligations qu’elles veulent émettre.

Par exemple, il en côute 9,16% pour une entreprise américaine d’émettre des obligations de pacotille (dont la cote de crédit est inférieur à BBB), soit 4% de plus qu’en juin 2014.

Les entreprises qui bénéficient d’une cote de crédit de première qualité doivent aussi payer 0,76% de plus qu’il y a neuf mois, soit 3,60%, pour écouler leurs obligations.

S’acheter de la croissance ou des marges

Malgré tout, les acquisitions restent un bon moyen pour les entreprises de s’acheter de la croissance ou d’éliminer un concurrent, dans une économie au ralenti, font valoir les analystes de Canaccord Genuity.

L’offre de 6,6 milliards de dollars Suncor pour sa rivale Canadian Oil Sands, le projet de fusion de 2,67 milliards de dollars américains entre la Canadienne Progressive Waste par l’Américaine Waste Connections, ainsi que deux transactions en cours par des entreprises de l’empire Brookfield, démontrent bien la volonté des entreprises de consolider leur industrie ou de sauter sur les occasions que la chute des Bourses provoque.

Canaccord identifie 14 prédateurs et huit proies potentielles au Canada

L’équipe de recherche de Canaccord Genuity a tenté d’identifier des prédateurs et des proies potentielles en 2016 dans ses trois marchés: les États-Unis, la Grande-Bretagne et le Canada.

Voici ce qu’a donné le survol de l’univers de placement de ses analystes canadiens.

Dans le secteur battu de l’énergie, Rock Energy(Tor.,RE) est une proie potentielle puisque l’intervention de l’actionnaire activiste FrontFour Capital a poussé l’entreprise à effectuer un examen stratégique qui devrait mener à une vente rapide ou à son démantèlement. Un prix juste selon l’analyste Sam Roach serait de 2,50$ par action.

La chute de 48% de l’action TransGlobe Energy(Tor.,TGL) en 2015 et son encaisse de 127 millions de dollars (2,20$ par action) en font aussi une proie attrayante pour des acquéreurs intéressés par ses puits en Égypte et au Yémen.

L’analyste Christopher Brown estime qu’un acquéreur potentiel pourrait offrir jusqu’à 5,50$ par action pour TransGlobe.

Toujours dans le secteur de l’énergie, l’équipe de Canaccord Genuity estime que Gran Tierra Energy, Inter Pipeline, Parex Resources, Pine Cliff Energy, Raging River Exploration et Total Energy Services sont tous des acquéreurs potentiels, en 2016.

Dans le secteur minier déprimé, Agnico-Eagle Mines(Tor, AEM) ou Yamana Gold(Tor.,YRI) pourrait cueillir le propriétaire de la future mine d’or brésilienne Volta Grande, Belo Sun Mining(Tor., BSX) pour aussi peu que 0,70$ par action.

En revanche, avec ses liquidités de 434 millions de dollars américains Nevsun Resources(Tor.,NSU) est bien placée pour acquérir des mines de cuivre déjà en production en Afrique ou en Europe.

Kinaxis, Nanotech et Sandvine : trois cibles de technologie appétissantes

Dans le secteur de la technologie, Kinaxis(Tor.,KXS), Nanotech Security(Tor.V,NTS) et Sandvine(Tor.,SVC) sont trois proies potentielles, tandis que l’exploitant controversé du jeu en ligne Amaya Gaming(Tor.,AYA) pourrait avaler d’autres fournisseurs de son industrie afin de freiner l’érosion du nombre de joueurs à ses jeux de poker et de casino en ligne.

Les solutions d’analyse infonuagiques pour la chaîne d’approvisionnement de Kinaxis s’insèreraient facilement dans la gamme de produits de géants tels que SAP ou Oracle, croit l’analyste Robert Young.

Si les transactions passées sont un bon guide, un acquéreur pourrait offrir jusqu’à 60$ pour Kinaxis, soit 22% de plus que le cours actuel.

La technologie de pellicule optique du petit fournisseur de solutions de sécurité pour le papier monnaie, Nanotech, pourrait éventuellement devenir une cible attrayante pour l’Autrichienne Hueck Folien, avec qui la société de Thurso vient de conclure un partenariat.

La chute du huard et du cours de l’action du fournisseur de contrôle des réseaux fixes, mobiles et convergées Sandvine augmente son attrait pour un acquéreur américain, fait valoir l’analyste Robert Young.

Un fonds d’investissement privé ou des géants de la réseautique ou des logiciels tels que Cisco Systems, Ericsson ou Oracle seraient des acquéreurs naturels de Sandvine, croit l’analyste.

M. Young évalue que la société pourrait attirer une offre de 4,30 à 4,60$, soit 27 à 36% de plus que son cours actuel.

CP, Exco, ATS, WSP et Lumenpulse : quatre acquéreurs industriels

Dans le secteur industriel, les analystes énumèrent seulement cinq acquéreurs en puissance, soit Canadien Pacifique(Tor.,CP) qui tente déjà de charmer l’Américaine Norfolk Southern(NY, NSC); le fournisseur d’équipements pour le moulage sous pression Exco Technologies(Tor.,XTC) est mûr pour d’autres achats dans son créneau des pièces intérieures pour les automobiles; ATS Automation(Tor., ATS) pourrait acquérir d’autres spécialistes de l’automatisation afin d’accroître sa valeur en tant que partenaire de ses clients dans les domaines de la santé, de l’électronique, de l’automobile et des produis de consommation.

La société de génie-conseil appuyée par la Caisse de dépôt et placement du Québec WSP Global(Tor., WSP) continue de consolider son industrie afin d’ajouter 1,3 milliard à ses revenus d’ici 2018.

L’analyste Yuri Lynk estime que WSP préfèrera conclure plusieurs petits achats au Canada, aux États-Unis, en Suède ou en Afrique du Sud qui ajouteraient 1500 employés et 20 millions de dollars à son bénéfice d’exploitation.

Quant au fabricant d’éclairages architecturaux DEL à haut rendement Lumenpulse(Tor.,LMP), il devrait continuer à avaler de petits acteurs de son industrie pour percer de nouveaux marchés ou ajouter à sa gamme de produits, comme il vient de le faire avec l’Italienne Exenia.

Aston Hill et Sprott pourraient disparaître

Dans le secteur financier, deux éclopés pourraient changer de main. Le gestionnaire de fonds de titres à faible capitalisation Aston Hill Financial(Tor.,AHF) serait réceptif à une offre de la part d’un acquéreur intéressé par ses fonds grand public, tandis que Sprott inc.(Tor.,SII) pourrait fermer le capital du fonds privé Sprott Resource(Tor.,SCP) qui lui est affilié en pleine déprime pour les ressources.

Par ailleurs, avec huit achats depuis trois ans, Fiera Capital(Tor., FRZ) continuera d’être l’acquéreur le plus actif de son industrie.

Le gestionnaire de fonds veut doubler à 200 milliards de dollars son actif en gestion, d’ici 2020, rappelle l’analyste Scott Chan. La société de Montréal veut aussi faire passet de 37 à 50% la part des revenus qu’elle réalise aux États-Unis.

 

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La Sentinelle de la Bourse se veut un blogue pour les investisseurs qui s¹intéressent aux rouages de la Bourse et aux marchés financiers. Son objectif : surveiller et débusquer des repères financiers pertinents pour prendre le pouls des Bourses et ainsi mieux aiguiller les décisions de placement de l¹investisseur.

Dominique Beauchamp
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