Lac-Mégantic : les conséquences pour les titres du CN et du CP

Publié le 20/07/2013 à 00:00, mis à jour le 18/07/2013 à 09:28

Lac-Mégantic : les conséquences pour les titres du CN et du CP

Publié le 20/07/2013 à 00:00, mis à jour le 18/07/2013 à 09:28

Il est difficile d'écrire froidement sur la tragédie de Lac-Mégantic. Particulièrement lorsque souffle un vent de juste colère sociale. Quel sera l'incidence du tragique événement sur les sociétés ferroviaires ? Et, plus particulièrement, sur les titres du Canadien National (Tor., CNR, 105,90 $) et du Canadien Pacifique (Tor., CP, 131,95 $) ?

Analyse en deux temps. D'abord les revenus, ensuite les coûts.

Les revenus

La meilleure façon de regarder les choses est probablement d'envisager le pire scénario pour l'industrie ferroviaire et de s'interroger sur ce qui serait perdu si les autorités décidaient de stopper les livraisons de pétrole par rail.

L'analyste Cameron Doerksen, de Financière Banque Nationale, calcule qu'à la fin de l'année, les revenus provenant du transport pétrolier devraient totaliser de 3 à 5 % des revenus totaux du CN et de 7 à 10 % de ceux du CP.

Précisons que, lors de sa dernière conférence téléphonique avec les investisseurs, le CP avait aussi livré un aperçu de ce que pourrait être la croissance de ses volumes pétroliers sur l'horizon 2015. Dixit Salman Partners, le transport du pétrole pourrait augmenter les revenus totaux du transport de marchandises de 4 % sur l'horizon 2015.

Constat ?

L'exercice permet de voir que, malgré la croissance époustouflante qui a été enregistrée ces dernières années, le poids du transport pétrolier demeure assez modeste par rapport à l'ensemble des marchandises transportées. Et que la contribution de la croissance à venir sur le bénéfice total reste somme toute faible.

Si, du jour au lendemain, on interdisait le transport pétrolier, le CN et le CP en sentiraient les contrecoups, mais ce ne serait pas dévastateur. Les changements de vitesse des économies nord-américaine et mondiales ont beaucoup plus d'influence sur leurs résultats.

Qui plus est, la probabilité que ce «pire scénario» se concrétise est quasi nulle.

L'enjeu économique est trop important pour les pétrolières, qui ont besoin de sortir le brut, et pour toutes les raffineries du Nord-Est américain.

On ne parle pas des autres produits dangereux, parce qu'il serait encore plus risqué de les faire voyager sur route.

Sur les revenus, donc, il s'agit d'un impact probable limité.

Les coûts

Passons maintenant aux coûts. Il est assez clair que ceux-ci grimperont. À différents endroits : installation d'enregistreurs de communications, ajout de personnes responsables, resserrement des normes d'entretien et d'inspection, etc.

Il est toutefois difficile d'envisager des hausses déstabilisantes pour le plan d'affaires.

Dans le pire des cas, les fameux wagons DOT-111, dont l'achat est aujourd'hui interdit, mais qu'on tolère encore jusqu'à leur fin de vie utile, pourraient être mis hors service. Les nouveaux wagons sont nettement plus chers, et c'est tout un investissement de remplacement qui serait demandé. Il faut cependant savoir que ces wagons sont rarement la propriété des sociétés ferroviaires et souvent celle des pétrolières. Ou encore des fabricants, qui les louent. Pas d'impact donc pour les transporteurs.

Il y aura sans doute aussi tout un débat sur la nécessité de dévier les voies ferrées pour contourner les villages. Les sociétés pourraient être appelées à investir. Mais ces investissements ne peuvent être très élevés. Du moment où ils auraient pour effet de détruire le rendement en provenance des activités de transport pétrolier, il deviendrait plus avantageux pour les sociétés de train de complètement abandonner celui-ci. Ce qui, on l'a vu, soulèverait un puissant lobby pétrolier. Rappelons que les bénéfices générés par le transport pétrolier ne sont pas énormes (3 à 5 % des revenus au CN).

C'est Québec et Ottawa qui devraient assumer de tels coûts. Ce qui semble quasi impossible, dans le contexte où les deux gouvernements ont déjà de la difficulté à maintenir en état les infrastructures routières.

Certains coûts en vue pour le CN et le CP, donc, mais pas la catastrophe.

Moment de prendre le train du CN et du CP ?

Malgré la tragédie de Lac-Mégantic, les multiples accolés aux titres demeurent relativement élevés.

Le CN se négocie à 17 fois le bénéfice anticipé de 2013 et à 15,8 fois celui de 2014. À titre de comparaison, la Banque Nationale note que, historiquement, le multiple moyen (sur les bénéfices de l'année à venir) a été de 15.

Le CP se négocie à 20,5 fois le bénéfice de 2013 et 16,6 fois celui de 2014.

L'économie américaine accélère, et c'est positif pour le rail. Parallèlement, l'économie chinoise décélère, ce qui est négatif pour les denrées. Dans la mesure où il semble tout de même certain que les coûts d'exploitation monteront prochainement, il est actuellement préférable de laisser passer le train. D'autres véhicules sont plus intéressants.

DANS LE DÉTAIL

Sur le radar

Évolution du chargement des trains nord-américains

Chargements, en milliers

Sources : Association of American Railroads, Financière Banque Nationale et Bloomberg

Le titre sur cinq ans

Canadien National (CNR ; 105,90 $)

Recommandation des analystes

Achat 0

Surperformance 2

Conserver 24

Sous-performance 0

Cible moyenne : 101,00 $

Le titre sur cinq ans

canadien pacifique (CP ; 131,95 $)

Recommandation des analystes

Achat 2

Surperformance 6

Conserver 14

Sous-performance 3

Vendre 1

Cible moyenne : 125,00 $

blogue > www.lesaffaires.com/francois-pouliot

francois.pouliot@tc.tc

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