Il faut savoir distinguer la chance du talent

Publié le 05/06/2010 à 00:00

Il faut savoir distinguer la chance du talent

Publié le 05/06/2010 à 00:00

Si je vous dis que les gains que vous avez réalisés à la Bourse au cours des derniers mois s'expliquent en grande partie par la chance, serez-vous choqué ?

Hum ! Si vous avez obtenu un faible rendement, non. Par contre, si votre performance a été nettement supérieure à celle des indices, vous risquez de me lancer des tomates !

Nous avons tendance à expliquer nos bons coups par le talent, et nos échecs, par des facteurs indépendants de notre volonté, comme la chance ou le contexte. C'est une réaction normale, mais dangereuse pour l'investisseur. Car la seule façon de s'améliorer vraiment est de reconnaître ses forces et ses faiblesses.

Pour cela, il faut savoir distinguer l'effet du hasard et le talent, ce qui n'est pas facile.

Puis-je faire exprès de perdre ?

Michael Mauboussin est stratège chez Legg Mason Investment Management. Dans son dernier ouvrage intitulé Think Twice : Harnessing the Power of Counterintuition (publié chez Harvard Business Press), il traite de la différence entre la chance et le talent.

Tentons d'abord de déterminer l'effet du hasard dans différentes activités. Par exemple, on sait que le résultat d'une machine de loterie vidéo est uniquement tributaire du hasard. Toutefois, objectivement, la seule façon de le démontrer est de se poser la question suivante : " Puis-je faire exprès de perdre ? "

Posez-vous cette question avant de jouer et vous serez obligé de répondre : " C'est impossible. " Il n'existe pas de moyen de perdre à volonté. Je mets une pièce de 25 cents et bingo ! la machine décide. Dans ce sens, le talent n'y joue aucun rôle.

Par contre, un joueur d'échecs peut faire exprès de perdre. Cependant, si je joue contre un grand maître, le hasard ne peut pas réellement m'aider à gagner.

Le poker et la Bourse

Dans d'autres activités, il est plus difficile de distinguer la part de la chance et celle du talent. C'est le cas notamment du poker. Si je joue une seule partie contre le meilleur joueur du monde, le hasard peut faire en sorte que je gagne. Par contre, si je joue toute une journée contre lui, il y a de forts risques qu'il me vide les poches.

C'est la même chose en Bourse, où le rendement s'explique en partie par la chance. Plus la période de rendement est courte, plus les forces du hasard ont un effet.

Dans son livre, M. Mauboussin propose un exercice intéressant. Pour évaluer la composante chance en Bourse, il conseille de bâtir un portefeuille en visant à obtenir le pire rendement possible (absolu et par rapport à un indice boursier de référence).

Pensez-y une seconde : en tant qu'investisseur, vous avez l'habitude de chercher les titres qui vont vous enrichir. Maintenant, faites le contraire : déterminez les pires titres.

John W. Rogers, chef des placements chez Ariel Investments, de Chicago, a soumis cet exercice à ses gestionnaires l'an dernier. Il a demandé à 71 associés de choisir 10 titres qui afficheraient un rendement plus faible que l'ensemble du marché pendant le deuxième trimestre de 2009. Résultat : 19 associés sur 71 seulement ont réussi; c'est dire que trois quarts des spécialistes sont incapables de " perdre à volonté ". Le rendement moyen de leur portefeuille a été de 30 %, le double du rendement du marché !

Cela montre clairement l'effet de la chance, du moins à court terme.

Faites l'expérience : composez un portefeuille de 10 titres que vous jugez médiocres, et après trois mois, comparez son rendement à celui d'un indice boursier (pour les titres canadiens, prenez l'indice S&P/TSX, et pour les titres américains, le S&P 500).

Vous verrez de vous-même le rôle de la chance dans un portefeuille boursier.

Réfléchissez à votre processus

En étant conscient de l'impact du hasard, surtout à court terme, vous comprendrez à quel point il est contre-productif d'évaluer votre performance en examinant les fluctuations quotidiennes des cours.

Pour vous améliorer, vous devez surveiller un autre aspect : votre processus de placement. Vous vous concentrerez ainsi sur ce qui importe vraiment, et surtout, sur ce que vous pouvez contrôler.

Ce qui devrait vous mener nécessairement à réfléchir à votre processus. En fonction de quels critères décidez-vous d'acheter un titre ? Combien d'argent investissez-vous dans un seul titre ? Pourquoi ? Pourquoi vendez-vous un titre ? Si vous ne pouvez pas répondre à ces questions toutes simples, c'est que votre processus présente des lacunes. Si c'est le cas, vous courez à votre perte, car la Bourse ruine ceux qui ne savent pas ce qu'ils font.

Prenez le temps de préciser par écrit votre processus de placement. C'est la première étape vers la réussite en Bourse. La deuxième étape est de chercher à améliorer constamment votre processus.

De mon blogue

www.lesaffaires.com/bernard-mooney

La relation différente entre les taux et la Bourse

Dans le passé, une hausse des taux d'intérêt était perçue comme néfaste pour les marchés boursiers. Or, depuis quelques années, cette relation ne semble plus tenir, explique John Paulsen, stratège de Wells Capital Management.

Entre 1968 et 1996, des taux en hausse de 1 % sur les obligations de 10 ans ont provoqué un recul de 3,5 % des cours boursiers. " Cependant, depuis 1997, des taux en hausse sont liés à des gains boursiers ", écrit M. Paulsen. Selon lui, cela s'explique par la perception des investisseurs à l'égard des risques potentiels de déflation et d'inflation. Lorsqu'ils craignent l'inflation, la corrélation entre les taux et la Bourse se renverse. Par contre, lorsque la crainte dominante est la déflation, c'est le contraire : des taux en hausse signifient que l'économie se porte mieux et que les forces déflationnistes diminuent.

Vos réactions

" Je suis d'accord. C'est la déflation qui nous menace à court terme. "

- Nicagoss

" Des changements majeurs dans l'économie ont rendu caduques bien des comparaisons fondées sur les statistiques. "

- berixyz

bernard.mooney@transcontinental.ca

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