Les établissements du réseau de la santé et des services sociaux recourent de façon croissante au personnel d'agences privées - la facture était de 324 millions de dollars l'an dernier. Pourtant, le Centre de réadaptation Estrie (CRE), qui affiche un taux de fidélisation de sa main-d'oeuvre de 96 %, n'a aucun mal à attirer les spécialistes dont il a besoin.
Il s'agit d'un véritable exploit, car le CRE emploie 19 des 20 professions aux prises avec les plus importantes pénuries de main-d'oeuvre au Québec. Par exemple, on parle d'orthophonistes, de physiothérapeutes, d'ergothérapeutes, etc.
Quelle est la recette de son succès ? Le CRE a osé, il y a quelques années, investir temps et énergie dans l'humanisation des soins et de la gestion du personnel. "Nous nous sommes dit qu'en devenant un des meilleurs employeurs du Québec, notre problème de recrutement avait peut-être des chances de se régler de lui-même", dit Louise Gosselin, directrice du personnel et du développement organisationnel.
Plus facile à dire qu'à faire. La direction décide de s'inspirer de l'organisme international Planetree Alliance. Ce regroupement vise à améliorer les soins grâce à une démarche axée sur le patient, notamment par un milieu professionnel valorisant pour les soignants et favorisant le développement des connaissances.
Une des pistes privilégiées est l'autonomie des employés en matière d'aménagement des horaires de travail. Les congés sans solde ou les semaines de travail de quatre jours sont monnaie courante au CRE.
En raison de la pénurie de spécialistes, plusieurs centres concurrents n'osent pas accorder ces congés. "Chez nous, c'est le contraire : on estime que ces congés améliorent notre capacité de recruter", dit Mme Gosselin.
À tel point qu'il n'est pas rare, en période de baisse de service, que le Centre se retrouve avec un surplus de personnel. C'est arrivé récemment. Au lieu de mettre à pied cinq ergothérapeutes, le CRE les a prêtés à un établissement de santé et de services sociaux de la région.
Des idées et des projets
Dans la dernière année, l'ouverture de la direction a mené à la création d'une volière d'oiseaux exotiques dans la salle d'attente du CRE. L'idée d'un neuro-psychologue de l'établissement, Jocelyn Chouinard, s'est transformée en projet pour des étudiants en administration du Cégep de Sherbrooke.
Avec l'aide d'une animalerie et la contribution financière des Restaurants Pacini, les étudiants ont concrétisé le projet. "Maintenant, au lieu de penser à leurs problèmes, nos usagers voient leur attention détournée vers autre chose", dit M. Chouinard.
martin.jolicoeur@transcontinental.ca
