Processia s'attaque aux États-Unis, forte de son succès en Europe

Publié le 16/02/2013 à 00:00, mis à jour le 14/02/2013 à 09:51

Processia s'attaque aux États-Unis, forte de son succès en Europe

Publié le 16/02/2013 à 00:00, mis à jour le 14/02/2013 à 09:51

Vincent Fraser et son associé Marc Allard ont de la suite dans les idées. Leur entreprise Processia Solutions, qui intègre des logiciels de gestion pour des projets manufacturiers, a d'abord fait ses preuves en Europe. Aujourd'hui, la PME de Laval s'appuie sur cette expertise pour se démarquer de ses concurrents des États-Unis.

«Les projets que nous avons faits en Europe sont une belle vitrine pour nous», dit Vincent Fraser, pdg de l'entreprise cofondée en 2000 avec Marc Allard. En Europe, Processia a des clients comme Airbus, Dassault Aviation et McLaren. La PME ne conçoit pas de logiciels : elle intègre des systèmes existants.

Ces logiciels intégrés (Product Lifecycle Management [PLM] ou gestion du cycle de vie du produit) facilitent la collaboration entre les employés des manufacturiers qui travaillent à un projet commun. Ce qui permet de réduire les coûts et de faire des gains de productivité. Le coût d'implantation de ces solutions peut osciller entre 100 000 et 50 millions de dollars sur plusieurs années.

«Il y a 10 ans, un constructeur automobile pouvait mettre environ 30 mois pour concevoir un nouveau véhicule. Aujourd'hui, ces logiciels intégrés permettent de le faire en 12 mois», dit Vincent Fraser.

La demande de ce type de systèmes est plus forte en Europe qu'aux États-Unis. C'est pourquoi la PME québécoise a d'abord pris pied sur le Vieux Continent, où elle exploite des filiales au Royaume-Uni et en France, qui contribuent pour 78 % de ses revenus totaux. Un Britannique dirige la première, un Français, la seconde. Tous deux détiennent une participation minoritaire (inférieure à 30 %) dans les filiales.

Le modèle européen exporté aux États-Unis

La PME a mis en place cette formule de participation aux États-Unis quand elle a créé sa filiale, en 2012, et embauché un directeur établi à Chicago. «Sa participation aux résultats de l'entreprise fait en sorte qu'il a tout intérêt à maximiser nos ventes aux États-Unis», dit Vincent Fraser.

Spécialiste en stratégie internationale à HEC Mont-réal, Louis Hébert affirme que cette approche a fait ses preuves. «Cascades l'utilise depuis longtemps dans ses usines.»

Processia réalise déjà 11 % de ses revenus aux États-Unis, où ses clients sont Boeing et l'armée de l'air. L'entreprise continuera de concentrer ses énergies sur l'aérospatiale et la défense en 2013. Une stratégie qui comporte des risques, étant donné les compressions annoncées et à venir dans le secteur militaire.

«L'industrie de la défense semble être sur une pente descendante, après une décennie de forte croissance, note Richard Aboulafia, analyste chez Teal Group Corporation, en Virginie, dans un courriel. Les réductions des dépenses militaires ont déjà commencé à faire mal.» Selon lui, l'aviation commerciale permettra de compenser les coupes dans la défense.

Une opinion partagée par Cameron Doerksen, analyste à la Financière Banque Nationale, dont une analyse citait récemment des statistiques de l'industrie. Selon la U.S. Aerospace Industries Association, les ventes d'avions militaires devraient décliner de 2,4 % en 2013.

Toutefois, étant donné la croissance de la demande d'avions civils, les ventes de l'ensemble de l'industrie aérospatiale devraient progresser de 2,6 %. Cette année, les livraisons d'Airbus et de Boeing pourraient même totaliser 1 240 appareils, «ce qui représenterait un nouveau record», souligne Cameron Doerksen.

L'avantage d'embaucher des Américains

Dans la défense, Processia maximise ses chances de décrocher des contrats grâce à sa nouvelle filiale et à l'embauche de personnel américain (cinq employés). L'entreprise est maintenant considérée comme une entreprise américaine. «Dans cette industrie, nos employés doivent obligatoirement être des citoyens américains, pour des raisons de sécurité», rappelle Vincent Fraser.

L'embauche d'un directeur et de représentants américains procure aussi un avantage concurrentiel, surtout s'ils possèdent de l'expérience dans les industries ciblées, selon Nancy Haskell, spécialiste en marketing à l'Université Laval. «Ils auront l'avantage de connaître la mentalité des acheteurs industriels, les produits concurrentiels et les attentes. Ils peuvent aussi fournir de l'information stratégique à la société mère au Canada.»

Les enjeux de Processia

LE RISQUE

Manquer d'expertise pour croître aux É.-U.

Dans l'industrie de l'intégration de logiciels, le nerf de la guerre, c'est de recruter et de retenir des ingénieurs compétents. Or, si Processia Solutions n'arrive pas à trouver les bonnes personnes, elle risque de limiter son potentiel de croissance sur le marché américain. Processia pourrait embaucher des jeunes fraîchement sortis des universités, mais cette stratégie est risquée, affirme son pdg, Vincent Fraser. «Développer un ingénieur à l'interne prend du temps et de l'argent. C'est pourquoi nous préférons embaucher des gens qui ont déjà de l'expérience.» Pour trouver la perle rare, la PME de Laval maraude chez ses concurrents aux États-Unis (les petites firmes spécialisées et les grands groupes comme IBM) ou des entreprises employant un grand nombre d'ingénieurs.

LE DÉFI

Déployer la bonne stratégie de commercialisation

Processia est une nouvelle venue aux États-Unis. «Nous devons avoir la bonne stratégie et nous faire connaître pour vendre nos solutions, sinon nous n'aurons pas de projets !» lance Vincent Fraser.

LE CONSEIL

Gardez votre indépendance financière

Pour percer un marché étranger, une entreprise doit absolument préserver son indépendance financière, selon le patron de Processia. Sinon, elle perdra un certain contrôle sur la stratégie commerciale au profit de ses créanciers. F

635-645 Nombre de livraisons prévues de nouveaux avions de Boeing, cliente de Processia, en 2013. Source : Financière Banque Nationale

L'entreprise réalise la moitié de son chiffre d'affaires dans l'industrie automobile (Répartition des revenus par secteur en 2012)

Automobile, transport, mobilité 49,1 %

Aéronautique 34,9 %

Énergie 9,5 %

Autres 6,5 %

22 % revenus de l'entreprise en amérique du nord

(Répartition géographique des revenus en 2012)

France 40 %

Royaume-Uni 38 %

Canada 11 %

États-Unis 11 %

2 %

Part des revenus investis en R-D

Chiffre d'affaires de 10 à 20 M $ en 2012

100

Nombre d'employés

Source : Processia

Dans cette série, nous décodons la stratégie internationale d'une entreprise canadienne et analysons ses risques.

Sur le Web, Les Affaires s'associe à L'actualité, Canadian Business, The Report on Business, The Economist Intelligence Unit et à la banque HSBC pour offrir un site axé sur les exportations. À lire sur affairessansfrontieres.ca.

@la_monde @francoisnormand

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