Pour une réforme simple du capitalisme

Publié le 01/11/2008 à 00:00

Pour une réforme simple du capitalisme

Publié le 01/11/2008 à 00:00

Les banques se font tellement peu confiance actuellement que la crise, au départ purement bancaire et créée de toutes pièces par des " génies " de l'ingénierie financière, risque de s'étendre à toute l'économie.

L'outil privilégié en ce moment pour rétablir la confiance est l'injection massive de capital gouvernemental dans les banques.

Cette mesure pose elle-même plusieurs problèmes : d'abord, une partie substantielle du capital injecté servira à sécuriser les créanciers obligataires des banques, réduisant d'autant la disponibilité des fonds servant aux prêts; ensuite, si le marché immobilier poursuit sa débâcle, il faudra sous peu recommencer le même processus à un coût potentiellement exorbitant pour les contribuables; enfin, on peut s'attendre à ce que des pressions de plus en plus fortes se fassent sentir pour que le gouvernement injecte du capital dans les entreprises privées non financières en difficulté, un cercle infernal en gestation.

Luigi Zingales, professeur d'économie, d'entrepreneuriat et de finance à l'Université de Chicago, propose un plan B en deux volets1 :

1. Pour soutenir les propriétaires résidentiels dans les quartiers (d'après le code postal) où la valeur des maisons a diminué de plus de 20 %, le gouvernement adopterait une loi leur donnant l'option de renégocier leur hypothèque proportionnellement à la baisse. En contrepartie, le prêteur hypothécaire recevrait une partie du produit de la vente éventuelle de la maison, par exemple 50 % de la différence entre le prix de vente et l'hypothèque renégociée, une solution gagnant-gagnant comparativement à la saisie traditionnelle.

2. Pour aider les institutions bancaires en difficulté, le gouvernement mettrait à leur disposition un processus rapide de recours à la faillite partielle selon lequel la dette (papier commercial et obligations) serait transformée en capital-actions; les actionnaires actuels verraient leur participation liquidée, mais obtiendraient une option, à exercer dans les sept jours, de racheter la dette à sa valeur nominale.

Afin de s'assurer que toutes les banques non solvables - et seulement celles-ci - choisissent de recourir à ce processus de faillite, il faut assujettir la dette de court terme au processus. Dans la mesure où les créanciers considèrent la banque comme non solvable, ils liquideront leur dette dès que possible, provoquant une crise de liquidité et forçant la banque à recourir au processus.

Les incitatifs sont alors bien coordonnés; la banque retrouve sa solidité financière, peut recommencer à prêter et conserve par ailleurs toutes ses autres obligations contractuelles.

La force du processus est triple : d'abord, le secteur bancaire est recapitalisé sans injection de capital gouvernemental; ensuite, le gouvernement n'a pas à déterminer la valeur des actifs de la banque en difficulté; enfin, on évite de voir celui-ci décider de l'avenir de chaque banque, car le marché s'en chargera.

Pour M. Zingales, il est temps que les gouvernements écoutent les économistes et mettent en place une solution de marché qui évite de gaspiller des fonds publics. Les gouvernements doivent plutôt utiliser leur pouvoir pour réorganiser rapidement et efficacement le secteur bancaire.

1- Luigi Zingales, " Plan B ", The Economists' Voice, 24 octobre 2008, Berkeley Press, www.bepress.com/ev/

Marcel Boyer est économiste en chef à l'Institut économique de Montréal et professeur en économie industrielle à l'Université de Montréal.

lesaffaires.redaction@transcontinental.ca

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