Pacini investira «des centaines de milliers de dollars» pour rendre son menu encore plus santé dans le cadre du programme Melior. La chaîne de restaurants devient ainsi la première et unique signataire de cette initiative qui vise à améliorer l'offre alimentaire au Québec.
«Notre objectif est de réduire le sel de 20 ou 25 % dans l'ensemble du menu. On va aussi introduire plus de fibres, en donnant toujours le choix aux clients entre des pâtes blanches et des pâtes de blé entier. C'est un très gros changement», résume Pierre-Marc Tremblay, propriétaire des 28 restaurants Pacini. Il se donne 24 mois pour revoir ses recettes, mais dès l'automne, les clients auront accès à «3 ou 4 nouvelles sauces», a-t-il confié à Les Affaires.
Puisqu'il ne suffit pas de réduire bêtement le sel - un tel geste serait périlleux -, l'engagement de Pacini suppose beaucoup de boulot dans la cuisine centrale de l'entreprise à Boisbriand. Les responsables de la R-D doivent concevoir avec les fournisseurs de nouveaux mélanges d'épices, revoir la coupe des légumes, faire tester les recettes par des clients. Une personne a été embauchée spécialement pour Melior.
L'entrepreneur est bien placé pour savoir ce qu'un changement de menu implique. En 2005, il a banni les gras trans artificiels de toutes ses recettes, ce qui lui a coûté entre 500 000 et 700 000 $. Son constat : tout le monde veut manger plus sainement, mais lorsque vient le moment de payer... le portefeuille prend le dessus sur les bonnes intentions.
«Ça coûte très, très, très cher», relate M. Tremblay, qui exclut l'idée de rentabiliser son investissement à court terme, mais prévoit être «gagnant à long terme». «Je crois dans l'implication sociale des entreprises. La réalité, c'est que le client ne voit pas que j'ai aboli les gras trans, mais il voit l'engagement social de mon entreprise dans sa globalité, et mes ventes augmentent [de 24 M$ en 2000 à 43 M$ aujourd'hui].»
Qu'à cela ne tienne, celui qui possède aussi les restaurants végétariens Commensal veut contribuer à améliorer la santé des Québécois et réduire les coûts en santé.
Panier de fruits et légumes à 1 €
Annick Van Campenhout, directrice générale du Conseil des initiatives pour le progrès en alimentation, OSBL créé pour gérer le programme, se réjouit d'avoir un signataire après seulement cinq mois. «En France, avant qu'une première entreprise ne s'engage, il a fallu un an et demi !» Des manufacturiers devraient bientôt suivre l'exemple de Pacini, dit-elle. Une MRC aimerait que les restos de son artère commerciale appliquent le programme Melior.
De plus, deux détaillants évaluent de quelle manière ils pourraient rendre plus accessibles les aliments sains. Annick Van Campenhout rêve qu'ils imitent Carrefour, en France, qui vend les mardis et mercredis des paniers de cinq fruits et légumes un euro chacun (dans le cadre du programme qui a inspiré Melior).
Le CIPA espère qu'il y aura 500 «produits Melior» d'ici cinq ans. Les entreprises signataires peuvent bénéficier de nouvelles subventions du ministère de l'Agriculture pour la R-D et la commercialisation.
Défi marketing
Pour le moment, la promotion du CIPA vise les entreprises. À l'automne, s'il y a assez d'aliments «revus et corrigés» sur le marché, on visera les consommateurs.
De son côté, Pacini fera la promotion de ses nouvelles recettes... sans insister sur la réduction de leur teneur en sel. «Au Québec, les gens croient que ce qui est bon pour la santé l'est moins au goût. On ne peut pas publiciser le fait qu'on vend des aliments santé. Il faut dire qu'on est tendance. C'est dommage, mais c'est un fait. La santé, ça ne se vend pas», soupire Pierre-Marc Tremblay.
