« Il est clair que notre portée et notre influence excèdent largement la valeur de nos revenus. Les architectes sont sous-payés », dit Alain Fournier, président de l'Association des architectes en pratique privée du Québec (AAPPQ).
Trois cents soixante-neuf (369) millions de dollars : c'est la somme des honoraires et des salaires générés par les architectes en cabinet privé. Ils ont influencé l'achat de biens et services près de 2,3 milliards, soit six fois ce qu'ils gagnent.
C'est ce qui ressort de la première étude sur la profession, réalisée en 2007 par l'AAPPQ à partir des données de 2004. M. Fournier précise que le rapport entre l'achat de biens et services et le montant des honoraires professionnels a sûrement augmenté puisque les coûts de construction ont grimpé depuis cinq ans, alors que les honoraires sont restés les mêmes.
Le salaire annuel moyen des architectes (dont les stagiaires) qui travaillent dans les 1 105 cabinets privés de la province s'établit à 52 500 $. Il atteint à 75 000 $ pour les quelque 600 architectes oeuvrant dans la fonction publique.
Compte tenu du rôle que l'architecte joue dans la construction d'un bâtiment, le salaire moyen devrait au moins doubler, dit M. Fournier. Les professionnels québécois ne sont pas les seuls dans cette situation au pays. L'Institut royal d'architecture du Canada travaille à réviser le tarif des architectes au pays.
Le tarif horaire est de 55 à 150 $ l'heure. Quant aux honoraires, le mode de rémunération le plus utilisé, ils représentent de 3 à 10 % de la valeur des projets.
Un pouvoir d'influence
Comment expliquer ce retard salarial par rapport à d'autres professions, comme celle d'ingénieur ? Alain Fournier admet que les récessions et le manque de concertation entre les architectes en pratique privée (plus de 680 travaillent à leur compte au Québec) ont incité plusieurs d'entre eux à brader leurs honoraires. Il concède que les architectes auraient probablement dû revendiquer davantage leur place dans la conception des méga-infrastructures plutôt que de céder ces champs d'expertise aux firmes d'ingénierie. C'est tout le contraire en Europe, où les architectes sont consultés pour la construction de grandes structures comme le viaduc de Millau, dans le Sud de la France, le plus haut pont du monde.
Cela dit, l'étude de l'AAPPQ révèle que l'architecte représente une porte d'entrée pour les entreprises de fabrication et de services liés à la construction.
La loi oblige l'architecte à signer et à sceller les plans et devis de tout travail excédant 300 mètres carrés, ce qui lui confère le pouvoir et la responsabilité de formuler des recommandations en matière d'enveloppe extérieure et de construction intérieure. L'architecte n'impose pas de fournisseur, mais peut en influencer le choix. Selon l'étude, ses recommandations comptent pour 50 % du choix des matériaux. « Bien que ce ne soient pas les architectes qui achètent, leur pouvoir est immense. Nous avons donc le droit et le devoir de revendiquer de meilleures conditions », dit M. Fournier.
47 %
Proportion des revenus des architectes qui dépendent du marché institutionnel, qui ne compte que pour 7 % du marché de la construction.
Source : Association des architectes en pratique privée du Québec (2007) La profession en chiffres Plus d'architectes travaillent en cabinet
435
Cabinets privés (ils emploient 2 500 personnes -architectes, stagiaires et techniciens)
680
Architectes indépendants
Source : Association des architectes en pratique privée du Québec, Étude économique sur la profession d'architecte (2007)
L'écart se rétrécit entre les femmes et les hommes
La profession d'architecte est constituée surtout d'hommes (75 %), mais leur proportion tend à diminuer avec les années. Sur le millier de personnes qui font actuellement leur stage de trois années, plus de la moitié sont des femmes.
Source : Ordre des architectes du Québec, Rapport annuel 2007-200
2 971
Nombre d'architectes inscrits au tableau de l'Ordre des architectes du Québec (OAQ) en 2009. Environ les trois quarts exercent en cabinet privé. Plus de 600 architectes oeuvrent au sein d'entreprises et d'organismes qui ne sont pas liés à des cabinets d'architectes (fonction publique, institutions d'enseignement, etc.).
Source : Ordre des architectes du Québec, Rapport annuel 2008-2009
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