Comment Héma-Québec fidélise ses donneurs

Publié le 26/05/2012 à 00:00

Comment Héma-Québec fidélise ses donneurs

Publié le 26/05/2012 à 00:00

Imaginez si vous deviez absolument convaincre chaque jour au moins 1 000 clients de venir vous voir pendant une heure, tout en sachant qu'ils ne vous achèteront rien. Et cela, sans avoir recours à des incitatifs financiers. Mission impossible ? Pas du tout, c'est exactement le boulot de Manon Pepin, vice-présidente aux affaires publiques et au marketing d'Héma-Québec.

Contrairement à la grande majorité des vice-présidents du marketing, Manon Pepin ne travaille pas pour faire mousser les ventes d'une entreprise. Mais tout comme ses pairs qui oeuvrent pour des organisations à but lucratif, elle doit faire connaître son employeur, augmenter son bassin de clients (les donneurs) et surtout, élaborer des stratégies de fidélisation. Si elle devait échouer, les hôpitaux du Québec se retrouveraient avec des pénuries de sang et de produits sanguins (plaquettes, globules rouges) dont on peut facilement imaginer les conséquences dramatiques.

«On n'a pas de carte de fidélisation. On a des contraintes médicales et on ne peut pas avoir de bureaux à tous les coins de rue. Alors, on fait du marketing direct», explique la femme de 50 ans, qui doit aussi composer avec un budget serré (4 millions de dollars par année, provenant de l'État).

Chaque jour, des milliers de donneurs potentiels sont ainsi invités, par téléphone, à se rendre à une collecte de sang en fonction de leur adresse, de leur groupe sanguin et de la date de leur dernier don (il faut attendre 56 jours entre deux prélèvements).

La méthode peut sembler simpliste, mais elle fonctionne très bien, insiste Manon Pepin. À preuve, depuis qu'Héma-Québec a pris le relais de la Croix-Rouge (en 1998), il y a eu «zéro jour» de pénurie, relate celle qui se qualifie de «fille de terrain».

Promouvoir le don de soi

Puisque Santé Canada interdit toute forme de compensation financière aux donneurs - cela pourrait encourager le mensonge sur les questionnaires - la responsable du marketing doit trouver d'autres arguments pour convaincre les Québécois de se déplacer pour se faire insérer une aiguille dans les veines. Une activité qui n'est pas tout à fait aussi agréable que le cinéma ou le restaurant...

Son meilleur argument de vente ? «On dit aux gens qu'ils peuvent sauver des vies. Il n'y a pas d'autre truc. Notre marketing se fonde sur le don de soi. On sait que les gens aiment sentir qu'ils font quelque chose d'exceptionnel. Et on leur dit merci.»

C'est justement ce sentiment de faire un geste concret qui anime autant Manon Pepin, diplômée en science politique de l'Université de Montréal, dont le CV comprend la Commission de coopération environnementale de l'Amérique du Nord et la Fondation Lucie et André Chagnon. Même si elle n'a encore jamais fait de marketing purement mercantile, ce n'est pas quelque chose qu'elle exclut de son plan de carrière. «Ça m'intéresserait, si j'étais à l'aise avec le produit.»

De toute façon, son travail actuel n'est pas différent de celui des autres vice-présidents du marketing. En effet, «comme eux, mon travail est de changer le comportement du consommateur et j'utilise les mêmes outils. On fonctionne exactement comme une entreprise privée». Depuis un an, elle a fait une campagne de publicité (télé, radio et affichage), lancé des capsules vidéo sur le Web, utilisé des groupes de discussion et entretenu une page Facebook.

Étant donné l'obligation de bien gérer les fonds publics, pas question de se payer un 30 secondes à Tout le monde en parle ou une grande affiche sur le pont Champlain. C'est parfois frustrant, mais ça encourage la créativité. Par exemple, les affiches présentant les fameuses manches coupées ont été collées sur les camions de l'OSBL.

Quelle est la pire crainte de Manon Pepin ? On s'en doute : un autre scandale du sang contaminé. «Comme pour toute entreprise, le lien de confiance est quelque chose de très fragile. Présentement, notre taux de confiance est à 94 %. Je connais peu d'entreprises qui peuvent en dire autant.»

«J'utilise les mêmes outils que les autres vice-présidents du marketing. On fonctionne exactement comme une entreprise privée.» - Manon Pepin, d'Héma-Québec

300 M$ Revenus d'Héma-Québec en 2011 (provenant exclusivement de la vente de produits sanguins et de tissus humains aux hôpitaux), pour un excédent net de 54 000 $. L'OSBL (1 300 employés et 16 000 bénévoles) a reçu 239 000 dons l'an dernier. | Source : Héma-Québec

Série 3 de 5

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