(Photo: 123RF)
La BOUSSOLE BOURSIÈRE est une rubrique qui traite d’un événement marquant et de son effet sur le marché boursier en s’appuyant sur l’analyse d’experts. Cette analyse pourra être autant fondamentale que technique.
(Illustration: Camille Charbonneau)
Rarement a-t-on vu le cours de l’action d’une entreprise performer si bien à la suite d’une simple journée des investisseurs.
En effet, après le 1er mai, date de l’événement organisé par la direction de Bombardier (BBD.B, 78,19$), le titre du fabricant d’avions d’affaires a gagné plus de 15% durant les cinq séances de négociations qui ont suivi.
Ces rencontres dites «Journée des investisseurs» servent à réunir les investisseurs et les analystes dans un contexte différent de celui de l’habituelle conférence téléphonique que les dirigeants d’entreprises tiennent à la suite de la divulgation de leurs résultats trimestriels.
Pour Bombardier, l’occasion était belle et le choix de l’emplacement, justifié. Déjà, le titre se comportait bien depuis la divulgation des résultats du premier trimestre de l’exercice 2024, survenue le 25 avril, et Toronto était certes un bon endroit pour la société, qui aimerait bien gagner l’appui d’investisseurs institutionnels.
Carnet de commandes impressionnant
Autant les revenus que les bénéfices de la société ont été inférieurs aux attentes au premier trimestre, a-t-on pu constater. On apprenait alors que Bombardier n’avait livré que 20 appareils alors que l’on en espérait plutôt 23. Les revenus ont totalisé 1,28 milliard de dollars américains (G$ US) alors que le consensus des analystes prévoyait 1,5 G$ US, et les bénéfices avant intérêts, impôts et amortissement ajustés (BAIIA) ont été de 205 millions de dollars américains (M$US) alors que les attentes étaient de 225 M$ US.
Malgré tout, ce qui a surtout retenu l’attention, c’est le carnet de commandes, explique Benoit Poirier, analyste chez Valeurs mobilières Desjardins. Bombardier termine le trimestre avec un carnet de commandes de 14,9 G$ US comparativement à 14,2 G$ US au trimestre précédent. Cela représente un ratio de prises de commandes sur facturation (book-to-bill) de 1,6 fois alors qu’il était de 0,9 fois au trimestre précédent.
À la rencontre du 1er mai, la direction énonçait ensuite une stratégie qui a certes plu aux investisseurs. Elle a d’abord élaboré sur les occasions de croissance des revenus provenant des segments tels les services après-vente (maintenance), la défense et les avions d’occasion certifiés qu’elle estime à moyen terme de 2 G$ US à 4 G$ US, explique Fadi Chamoun, analyste à BMO Marchés des capitaux.
Ces segments offrent selon lui de meilleures marges bénéficiaires avec beaucoup moins d’effets cycliques et d’utilisation de capital que la fabrication d’avions. La croissance des revenus de ces segments pourrait les amener à constituer la moitié des revenus totaux de l’entreprise en 2030.
Flux de trésorerie et dette
La génération de flux de trésorerie et la capacité de réduire la dette étaient certes parmi les sujets d’inquiétude des investisseurs.
Ceux-ci ont été rassurés le 1er mai par les propos de la direction, souligne Philippe Côté, gestionnaire de portefeuille à Eterna Gestion de placement. Elle a expliqué qu’elle ne prévoyait pas, d’ici 2030, lancer la construction d’un nouvel appareil à partir d’une feuille blanche, c’est-à-dire du tout début, ce qui évitera toute explosion des dépenses en capital.
Cela permettrait à l’entreprise de générer des flux de trésorerie disponible de 900 M$ US dès 2025, qui pourront servir à réduire la dette et possiblement à initier un plan de retour de capital vers les investisseurs. «La présentation de la direction lors de la Journée des investisseurs a confirmé que l’entreprise est solide», conclut le gestionnaire, qui ajoute qu’elle a possiblement éveillé l’attention de plusieurs investisseurs institutionnels à Toronto.
Une tendance à la hausse établie
S’il y a une conclusion à tirer de l’examen des fluctuations du cours de l’action de Bombardier durant la dernière année, c’est qu’une nouvelle tendance à la hausse s’est installée depuis le mois de février, explique Monica Rizk, analyste technique senior pour les publications Phases & Cycles. «Les signaux techniques positifs sont importants», dit-elle.
Entre autres, le titre est maintenant bien au-dessus de ses moyennes mobiles de 50 jours (ligne noire) et de 200 jours (ligne grise), qui sont respectivement le reflet de la tendance à court et à plus long termes. De plus, ces moyennes mobiles se sont croisées au début du mois d’avril, la plus courte passant au-dessus de la plus longue, confirmant ainsi le changement de tendance, souligne l’analyste.
Des cours cibles révisés à la hausse
Fadi Chamoun hausse son cours cible de 85,00$ à 95,00$ en s’appuyant sur un ratio cours/bénéfice qu’il qualifie pourtant de conservateur, de 7,5 fois le BAIIA moyen qu’il prévoit pour les années 2024 et 2025.
Benoit Poirier, de Desjardins, a quant à lui un cours cible sur un an de 102,00$ en se basant sur une prévision de BAIIA de 1,31 G$ US en 2024. Mais il va plus loin. En s’appuyant sur ses prévisions de 2025, il en déduit une évaluation du titre qui pourrait atteindre 150,00$, indiquant ainsi que les possibilités de gains pour les investisseurs demeurent importantes, et ce, malgré la forte poussée du titre au cours des derniers mois.
