"Le secteur privé est indispensable à la lutte contre la pauvreté"

Publié le 08/11/2007 à 12:56

"Le secteur privé est indispensable à la lutte contre la pauvreté"

Publié le 08/11/2007 à 12:56

Par lesaffaires.com

Créée en 1996, à Manille, aux Philippines, la Banque asiatique de développement (BAD) s'affaire à améliorer le sort des populations dans la région Asie-Pacifique. En particulier, celui des 1,9 milliard de personnes qui y vivent avec moins de deux dollars par jour.

L'an dernier, elle a autorisé 80 prêts totalisant 8 milliards de dollars (toutes les sommes sont exprimées en dollars américains dans cet article). L'Inde (1,69 milliard), la Chine (1,57 milliard) et le Pakistan (1,54 milliard) en ont été les principaux bénéficiaires. La Banque a aussi alloué 242 millions de dollars en assistance technique.

La BAD compte 67 pays membres, dont 48 proviennent de la région et 19 d'ailleurs dans le monde. Les deux principaux actionnaires sont le Japon et les États-Unis. Le Canada est le septième actionnaire en importance. Mais son rôle va bien au-delà du capital, dit son directeur général, Rajat Nag, rencontré récemment à Montréal.

Le Canada compte beaucoup d'expertise dans le domaine des infrastructures, par son savoir-faire et ses technologies, et l'Asie en a cruellement besoin pour se développer. " La lutte mondiale contre la pauvreté sera gagnée ou perdue en Asie ", affirme M. Nag.

Les Affaires - Depuis 40 ans, la Banque asiatique de développement travaille à réduire la pauvreté en Asie-Pacifique. Pourtant, la région abrite toujours les deux tiers de la population pauvre du monde. Est-ce un constat d'échec ? Rajat Nag - La situation s'améliore.

En 1970, la moitié de la population vivait avec moins d'un dollar par jour. Aujourd'hui, ce ratio est de 18 %. Pendant cette période, le taux d'alphabétisme est passé de 40 % à plus de 60 %, alors que l'espérance de vie a aussi grimpé de 48 ans à plus de 60 ans. Au cours des dernières décennies, en partie grâce aux institutions financières comme la BAD, l'Asie a connu des succès économiques qui ont apporté la prospérité à des dizaines de millions de personnes. Mais il y a encore beaucoup de travail à faire.

Par exemple ? Les inégalités sociales sont importantes. Malgré une croissance économique rapide, une grande partie du continent connaît toujours d'importantes difficultés. Il faut donc s'assurer que le progrès économique profite à l'ensemble de la population. Il y a aussi les problèmes environnementaux. Le boom économique entraîne un coût environnemental important. L'économie asiatique ne peut se permettre de croître d'abord, puis de s'occuper plus tard de la protection de l'environnement. Cela doit se faire simultanément. En s'intéressant davantage aux énergies renouvelables, notamment.

Les économies asiatiques, comme vous le mentionnez, affichent une solide croissance, générée en grande partie par la Chine et l'Inde, les deux plus importants pays emprunteurs de la Banque. Doivent-ils encore profiter de votre aide ? La Chine et l'Inde devraient encore, dans les prochaines années, bénéficier d'une bonne part de nos prêts. Les crédits accordés à ces deux pays par la Banque ont contribué à leur développement économique. Mais, au-delà de l'argent, il y a aussi l'importance de l'aide technique et le respect des bonnes pratiques d'affaires, des principes de gouvernance.Par exemple, si nous finançons la contruction d'une route, le projet doit se faire en respectant nos principes sociaux ou environnementaux.

Votre rôle n'est donc pas strictement financier ? La Banque reste toujours une institution financière, mais elle ne se cantonne plus dans son rôle initial qui consistait à mobiliser des fonds en provenance des pays les plus riches en faveur des pays asiatiques en développement. Outre les questions d'environnement et de bonne gouvernance, son cadre d'action vise aussi à favoriser les transferts de connaissances, de technologies. Nous travaillons aussi à renforcer la coopération et les échanges commerciaux entre les différents pays.

Quels sont les principaux projets, les grands chantiers auxquels participe la Banque ? L'Asie fait face à un important déficit en matière d'infrastructures, et c'est là que nous investissons notre argent depuis 10 ans. La région devra affecter trois trillions de dollars au cours des 10 prochaines années à la construction de routes, de ponts et d'autres projets d'infrastructures. Voilà sûrement des occasions d'affaires pour le secteur privé ? Oui, entre autres pour les entreprises canadiennes. Le Canada détient une grande expertise dans le domaine des infrastructures, par son savoir-faire et ses technologies.

Les entreprises canadiennes peuvent assurément contribuer, en travaillant directement avec les différents gouvernements ou même en partenariat avec la Banque. D'ailleurs, la présence du secteur privé est indispensable à la lutte contre la pauvreté et nous travaillons davantage à favoriser sa participation dans nos projets publics d'investissement. Au Laos, l'an dernier, nous avons consenti 100 millions de dollars à un projet hydraulique, en réussissant à générer une contribution de 900 millions de dollars du secteur privé. Le Canada est un pays membre de la Banque asiatique de développement.

Quel est son rôle, sa contribution ? Le Canada est le septième actionnaire de la BAD. Au-delà de son apport en capital, le Canada est vu comme un partenaire fiable qui apporte une perspective très appréciable en matière de développement, de communauté et de gouvernance. Son assistance technique est aussi un atout, comme le démontre les projets réalisés avec l'Agence canadienne de développement international.

Ce texte est tiré du journal Les Affaires du 10 au 16 novembre 2007.

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