Comment Québec pourrait tenter de sauver Rona

Publié le 01/08/2012 à 09:20, mis à jour le 01/08/2012 à 09:20

Comment Québec pourrait tenter de sauver Rona

Publié le 01/08/2012 à 09:20, mis à jour le 01/08/2012 à 09:20

BLOGUE. Ce que l’on suspectait depuis quelques mois est sur le point de se produire : l’américaine Lowe’s a officiellement manifesté son intérêt pour Rona. Le gouvernement du Québec n’est pas d’accord et la Caisse ne le semble pas non plus. Analyse de la grande manœuvre que pourrait tenter Québec, et pourquoi, ultimement, la balle risque d’aboutir à Ottawa.

À la dernière assemblée annuelle de Rona, ce printemps, le chef de la direction Robert Dutton y était allé d’un véritable cri du cœur. « Le consommateur veut que nous restions canadiens. Nous sommes les seuls à encourager le secteur manufacturier canadien, nous jouons un rôle dans les communautés, nous avons une politique environnementale. Nos actionnaires, qu’ils soient petits ou de gros fonds, doivent soutenir Rona. C’est une grande responsabilité, c’est une question d’éthique », avait-il lancé.

Un cri du cœur, qui était aussi une prémonition cauchemardesque pour la Caisse de dépôt, avec sa participation (à l’époque) de 12,18%. Que faire en effet si la prime offerte par Lowe’s est intéressante? Vendre pour donner du rendement aux déposants de l’État, ou bien s’objecter au nom de l’intérêt économique du Québec? La fameuse équation « rendement = développement économique du Québec », mise au point par Henri-Paul Rousseau, ne tient soudainement plus la route. La situation illustre parfaitement comment « rendement » peut en certaines occasions ne pas être à l’avantage du développement économique du Québec.

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La Caisse n’a pas tardé à réagir, mardi. Et sa réaction est fort intéressante, en ce qu’il y transparaît une très nette volonté d’attribuer beaucoup de poids au volet « développement économique » de sa mission. Elle prendra compte de « la création de valeur à LONG TERME des déposants », des retombées économiques du siège social, de l’importance du développement continu du réseau de fournisseurs au Québec et au Canada et du respect du rôle des entrepreneurs franchisés indépendants, a-t-elle en avant-midi indiqué dans un communiqué. En après-midi, elle annonçait avoir passé l’avant-midi à acheter des actions de Rona et avoir fait grimper sa participation à 14,18%.

En bref, la Caisse n’apparaît pas favorable à cette transaction.

Quelle sera la suite des choses?

Le conseil d’administration de Rona a rejeté l’offre à 14,50$ de Lowe’s. La première bataille est gagnée, mais c’était aussi la plus facile. Avant l’annonce, les analystes qui évaluaient ce que serait un prix raisonnable pour Rona en cas d’OPA avaient une fourchette d’évaluation se situant entre 13$ et 19$.

Les choses se compliqueront lorsque Lowe’s portera son offre dans le haut de la fourchette.

Si jamais les administrateurs devaient décider qu’une offre à 17-18$ est encore insuffisante, il y a fort à parier que Lowe’s indiquera que le conseil de Rona n’agit pas dans l’intérêt des actionnaires et transformera son offre en une OPA hostile qui sollicitera chacun d’eux directement.

Dans pareille situation, sans intervention des gouvernements, la nationalité canadienne de Rona n’a aucune chance de résister.

Comment bloquer la transaction?

À propos de ce blogue

Diplômé en droit de l'Université Laval, François Pouliot est avocat et commente depuis plusieurs années l'actualité économique et financière. Il a été chroniqueur au Journal Le Soleil, a collaboré au Globe and Mail et dirigé les sections économiques des différentes unités de Quebecor Media, notamment la chaîne Argent. Au cours de sa carrière, il a aussi fait du journalisme d'enquête ce qui lui a valu quelques distinctions, dont le prix Judith Jasmin. La Bourse Southam lui a notamment permis de parfaire son savoir économique à l'Université de Toronto. François a de même été administrateur de quelques organismes et fondation. Il est un mordu des marchés financiers et nous livre son analyse et son point de vue sur diverses sociétés cotées en bourse. Québec inc. sera particulièrement dans sa mire.

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