Apple et Dublin montrent les crocs, Bruxelles tient tête

Publié le 19/12/2016 à 17:21

Apple et Dublin montrent les crocs, Bruxelles tient tête

Publié le 19/12/2016 à 17:21

Par AFP

(Photo: 123rf.com)

Dublin s'insurge, Apple se rebiffe, Bruxelles s'obstine: quatre mois après la décision de la Commission imposant au géant informatique de rembourser 13 milliards d'euros d'avantages fiscaux indus à l'Irlande, les trois parties ont durci lundi leur position.

D'abord Dublin, qui a rendu public dans la matinée sa ligne de défense: «La Commission a outrepassé ses pouvoirs et violé la souveraineté» irlandaise concernant l'impôt sur les sociétés. 

Voilà maintenant plus d'un mois que l'Irlande a fait appel de la décision de Bruxelles la «condamnant» -paradoxalement- à récupérer ces 13 milliards d'euros d'impôts, ce à quoi elle se refuse.

En jeu: la réputation «pro-entreprises» du pays, mais aussi le siège d'Apple en Europe, là où l’entreprise enregistre tous les bénéfices réalisés sur le Vieux Continent, ainsi qu'en Afrique, au Moyen-Orient et en Inde.

Le géant informatique y emploie 6000 personnes, essentiellement dans la ville de Cork, la deuxième plus importante de la République d'Irlande, au sud de l'île.

Mais il y paie trop peu de taxes, estime la Commission, à cause d'un accord fiscal passé pendant des années avec les autorités irlandaises, qui lui aurait permis de ne soumettre à l'impôt qu'une infime partie des milliards de recettes réalisés.

«Moins de 50 euros d'impôt pour chaque million d'euros de bénéfices» en 2014, selon les calculs de la commissaire européenne à la Concurrence, Margrethe Vestager.

Le reste des profits était, selon la Commission, placée dans un «siège» situé hors du pays, un fantôme sur lequel l'État irlandais se refusait à avoir un droit de regard.

«Une aide d'État» et donc un frein à la concurrence, avait conclu Bruxelles fin août après des mois d'enquête, dont les détails -un document de 130 pages- ont été rendus publics lundi.

«La Commission n'a pas la compétence, selon les règles en matière d'aide publique, à substituer unilatéralement son propre point de vue concernant l'étendue géographique de la politique fiscale d'un État membre à celui de l'État membre lui-même», lui a répondu l'Irlande. 

L'UE «tente de réécrire la législation irlandaise concernant l'impôt sur les sociétés», a même déploré le ministère, qui estime l'enquête de la Commission marquée par des erreurs.

Des années de procédure

Apple -présent en Irlande depuis les années 80- a surenchéri à la mi-journée, peu après avoir officiellement fait appel de la décision: la Commission européenne a «entrepris une action unilatérale et changé les règles de manière rétroactive, au mépris de décennies de droit fiscal irlandais, de droit fiscal américain, et du consensus mondial en matière de politique fiscale».

Défense de l'entreprise californienne: les «produits et services» Apple étant «créés et conçus aux États-Unis», ils trouvent leur valeur aux États-Unis et c'est logiquement dans ce pays que l'entreprise doit être taxée -pas en Irlande, ni ailleurs en Europe-. 

«Apple est le plus grand contribuable dans le monde, aux États-Unis et en Irlande avec un taux d'imposition global d'environ 26%», souligne le géant informatique dans un communiqué. 

Reste que les milliards de bénéfices non taxés en Irlande ne l'ont, pour l'instant, pas été non plus aux États-Unis. 

Rien d'illégal, selon la loi irlandaise, mais tant qu'Apple ne s'est pas décidé à rapatrier cet argent aux États-Unis, la somme échappe à l'impôt. «Ces profits seront taxés aux États-Unis», a assuré lundi un porte-parole du groupe. 

«Il est clair depuis le début de cette affaire que le résultat était connu d'avance», conclut Apple, qui a reçu dans la journée le soutien du Trésor américain.

L'UE «défendra sa position devant la cour», a commenté lundi un porte-parole de la Commission, désormais lancée avec Dublin et Apple dans une longue procédure devant la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) à Luxembourg.

Elle devrait durer des années, au moins deux ans rien que pour une première décision du tribunal, sans compter un éventuel appel.

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