Entrevue n°255 : Maya Winkelstein, directrice, Open Road Alliance


Édition du 22 Août 2015

Entrevue n°255 : Maya Winkelstein, directrice, Open Road Alliance


Édition du 22 Août 2015

Par Diane Bérard
D.B. - Si une ONG manque d'argent pour terminer un projet, ne faudrait-il pas revoir sa gestion au lieu de lui donner d'autre financement ?

M.W. - Comme dans toute organisation, il arrive que des projets frappent un mur parce qu'ils sont mal conçus ou mal gérés, mais la majorité des dossiers qui nous sont soumis sont victimes de circonstances hors de leur volonté. Deux exemples : la nouvelle réglementation qui encadre les soins de santé aux États-Unis (Obamacare) nuit au fonctionnement de nombreuses ONG américaines. L'investissement requis pour s'adapter à la nouvelle réglementation n'était pas prévu à leur budget. Pendant ce temps, en Inde, le gouvernement a scindé l'État d'Andhra Pradesh en deux, le Sud et le Nord. C'est arrivé trois mois à peine après qu'une ONG réclamant des droits de propriété terriens pour les plus démunis ait commencé son lobby. Du coup, ses coûts ont doublé, puisqu'il lui fallait mener ses actions auprès de deux instances au lieu d'une. Sans le financement d'Open Road Alliance, cette ONG ne pouvait continuer son action.

D.B. - Pourquoi les ONG que vous financez ne retournent-elles pas tout simplement solliciter les fondations qui leur ont accordé du financement au départ ?

M.W. - Avant de lancer Open Alliance, nous avons posé cette question à plusieurs dirigeants d'ONG. Ils ont tous répondu la même chose «Nous n'oserions jamais ! Nous craignons qu'ils nous jugent sévèrement et qu'ils refusent de nous financer de nouveau» Ces dirigeants ont raison, des fondations ont cessé de financer certaines ONG lorsqu'elles celles-ci ont rencontré des problèmes.

D.B. - N'est-il pas malhonnête de la part d'une ONG de ne pas avouer à son donateur que le projet qu'il a financé rencontre des difficultés ?

M.W. - Ce n'est pas souhaitable ni pour l'ONG, ni pour le donateur, ni pour notre secteur. C'est pourquoi Open Road Alliance milite pour plus de transparence. D'abord, il faut revoir les attentes. Les donateurs ne peuvent pas exiger la perfection, parce qu'on fait le bien. Ensuite, les ONG doivent se montrer plus courageuses. Mieux communiquer, demander des partenariats avec les fondations, solliciter de l'aide. Il faut oser dire, «Vous m'avez accordé 500 000 $ pour ce projet, un imprévu nous empêche de l'achever. Nous aurions besoin de 50 000 $ de plus. Sans cet argent, les premiers 500 000 $ seront perdus.» Quelle fondation a envie de gaspiller 500 000 $ ?

D.B. - Mais il n'y a pas que l'orgueil qui empêche les ONG de retourner voir les fondations qui leur ont accordé leur premier financement lorsque leurs projets tournent mal...

M.W. - En effet, aux barrières psychologiques s'ajoutent des barrières structurelles. Comme mentionné plus tôt, les CA des fondations ne se réunissent qu'une ou deux fois par année. De plus, la plupart des fondations allouent tout leur budget annuel, il ne leur reste rien pour les imprévus. Ces deux problèmes ne sont pas insolubles. Mais il faudra revoir le processus de dons. Chaque CA de fondation pourrait avoir un sous-comité «d'urgence» qui se réunit chaque trimestre pour évaluer les demandes hors norme. On pourrait aussi mettre de côté de 15 à 20 % du budget pour les imprévus. Ce serait reconnaître qu'il y aura des imprévus.

D.B. - Que pensent les autres fondations de votre intervention pour «ramasser les pots cassés» derrière elles ?

M.W. - Nous faisons de notre mieux pour faire connaître le travail d'Open Road Alliance. Toutes les fondations travaillent dans le même but : laisser le monde dans un meilleur état qu'elles l'ont trouvé. Lorsque nous expliquons notre action et mettons en évidence les lacunes des méthodes philanthropiques traditionnelles, la plupart des acteurs sont d'accord avec nous. Mais lorsque vient le temps d'implanter les changements, c'est exigeant. Nous devons être patients... mais persévérants.

D.B. - D'où viennent les fonds d'Open Road Alliance ?

M.W. - Open Road Alliance a été fondée en mai 2013 par la psychologue Laurie Michaels, d'Aspen, au Colorado.

À la une

Réunion de la Fed: les faucons de retour?

EXPERT INVITÉ. C’est clairement une déception pour les marchés.

Il y a une limite à l'écart entre les taux au Canada et aux É.-U., admet Macklem

Ottawa — Le gouverneur de la Banque du Canada, Tiff Macklem, a déclaré jeudi que les taux ...

Trois nominations pour Les Affaires aux Prix du magazine canadien

Mis à jour à 13:40 | lesaffaires.com

Les Affaires a recueilli trois nominations en vue de la 47e édition annuelle des Prix du magazine canadien.