Retraites: Trois-Rivières a raison, que dira Alban D'Amours?

Publié le 04/08/2014 à 18:21

Retraites: Trois-Rivières a raison, que dira Alban D'Amours?

Publié le 04/08/2014 à 18:21

Le maire de Trois-Rivières a raison dans le dossier des régimes de retraite municipaux. Le projet de loi du gouvernement du Québec est inadéquat en qu'il tente un coup d'argent. Il sera maintenant intéressant de voir si la pensée d'Alban D'Amours évoluera.

C'est avec le sourire qu'on a accueilli, il y a quelques jours, la sortie du maire Yves Lévesque et de quelques autres élus pour demander des amendements au projet de loi Moreau. Ces élus reprochent au gouvernement de n'avoir tenu compte que de la situation de Québec et Montréal, et semblent estimer que le projet de loi les forcera à avoir une épreuve de force inutile avec leurs employés.

-Tiens, tiens, cheminerait-on finalement vers le cœur de la question?

Il y a quelques semaines, nous indiquions en chronique que, à l'exception du maire Régis Labeaume, les maires du Québec avaient peur de dire la vérité sur le projet de loi.

Dans sa forme actuelle, il vise certes à protéger le contribuable et à assurer la pérennité des régimes de retraite. Mais il vise beaucoup plus que ça. Il vise à permettre à certaines municipalités de faire un coup d'argent. C'est ce bout d'histoire dont, depuis le début, la plupart des maires ne parlent pas.

Un rapide récapitulatif du dossier avant d'aller plus loin.

L'historique

Il y a plus d'un an, Alban D'Amours et une équipe d'experts déposaient un rapport destiné à assurer la pérennité des régimes de retraite.

On y proposait notamment une nouvelle méthode de calcul des déficits, baptisée "capitalisation améliorée". L'adoption de cette méthode visait à diminuer les risques de déficits futurs. Elle avait aussi pour effet de faire doubler les déficits passés. Vous avez bien lu, faire doubler.

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En commission parlementaire, les municipalités, les villes de Québec et Montréal en tête, s'amenèrent pour demander un partage 50-50 des déficits passé (Montréal avait formulé sa demande d'une autre manière, mais l'objectif recherché était le même).

Jusque-là, rien à redire. Depuis quelques années, la facture avait beaucoup monté pour les municipalités (et le contribuable) et il était tout à fait défendable que l'on refuse un nouveau bond.

Le nouveau projet de loi abandonne cependant la méthode de capitalisation améliorée. Si bien qu'on ne parle plus de partager en deux un déficit qui serait doublé, mais de partager en deux le déficit actuel. C'est tout un monde de différence.

Il ne s'agit plus de protéger le contribuable pour le futur, mais de récupérer d'importantes sommes d'argent qui avaient déjà été empruntées. Bref, de faire un coup d'argent.

Un coup d'argent que l'on tente de bonifier en réduisant le coût du service courant à un maximum de 18% de la masse salariale (20% pour les policiers et pompiers). Mais on n'entrera pas dans le détail de cette autre mesure afin de ne pas complexifier l'histoire.

Combien récupéreront les municipalités?

Ce n'est clair qu'à Québec.

À ce jour, seul le maire Régis Labeaume a publiquement reconnu qu'il y avait dans l'opération une récupération d'argent.

Sur la dernière évaluation actuarielle officielle de 2010, le projet de loi permet à la Ville de Québec de récupérer 141 M $.La Ville anticipe cependant que la prochaine évaluation actuarielle (2013) devrait faire passer son déficit de 517 M$ à 616 M$, si bien que, au final, la récupération réelle de la Ville devrait tourner autour de 80 M$.

C'est 80 M$ qui ont déjà été empruntés et qui, une fois reçus, pourront être affectés ailleurs.

On a demandé à la Ville de Montréal quelle serait la force de sa récupération. L'administration Coderre indique que les chiffres ne seront fournis que lors de la comparution de la Ville en commission parlementaire, le 20 août. Mais la récupération sera assurément plus importante qu'à Québec. Évidemment en raison des populations, mais surtout parce que la nouvelle loi prévoit que la Ville de Québec devra assumer 100% du déficit passé du régime de retraite de l'ancienne Ville de Québec (et non pas le séparer 50-50). Or, ce vieux déficit représente la moitié du déficit total de la Ville. Montréal n'a apparemment pas une obligation aussi forte, ce qui devrait avoir un effet multiplicateur sur son coup d'argent.

Aussi paradoxale que cela puisse paraître, les efforts de Régis Labeaume à Québec rapporteront beaucoup plus à la métropole qu'ils ne lui rapportent à lui.

La grande question

À propos de ce blogue

Diplômé en droit de l'Université Laval, François Pouliot est avocat et commente depuis plusieurs années l'actualité économique et financière. Il a été chroniqueur au Journal Le Soleil, a collaboré au Globe and Mail et dirigé les sections économiques des différentes unités de Quebecor Media, notamment la chaîne Argent. Au cours de sa carrière, il a aussi fait du journalisme d'enquête ce qui lui a valu quelques distinctions, dont le prix Judith Jasmin. La Bourse Southam lui a notamment permis de parfaire son savoir économique à l'Université de Toronto. François a de même été administrateur de quelques organismes et fondation. Il est un mordu des marchés financiers et nous livre son analyse et son point de vue sur diverses sociétés cotées en bourse. Québec inc. sera particulièrement dans sa mire.

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