Pouliot - Pipeline de TransCanada: dans la situation actuelle, Québec doit dire NON

Publié le 06/08/2013 à 09:31, mis à jour le 06/08/2013 à 09:31

Pouliot - Pipeline de TransCanada: dans la situation actuelle, Québec doit dire NON

Publié le 06/08/2013 à 09:31, mis à jour le 06/08/2013 à 09:31

Photo: Bloomberg

BLOGUE. Le gouvernement du Québec doit-il dire oui au projet de pipeline pétrolier de l'Est de TransCanada? Peut-être, mais certainement pas avant de s'être assuré d'un approvisionnement en gaz naturel à prix concurrentiel. Pour l'heure, si ce projet va de l'avant, le potentiel de développement économique du Québec apparaît faire un pas en arrière.

La Presse faisait état il y a quelques jours d'une plainte logée par Gaz Métro devant l'Office National de l'Énergie concernant des tarifs jugés exorbitants que lui demande TransCanada pour le transport d'une partie de ses approvisionnements en gaz dans les prochaines années.

La situation est complexe. Jetons-y un œil.

Premier problème: deux bouchons en formation

Sans trop compliquer la chose, notons que deux bouchons sont actuellement en voie de formation sur le réseau de pipelines gaziers qui alimente le Québec. Gaz Métro et sa partenaire ontarienne Union Gas devrait régler celui du sud en construisant un petit oléoduc de 300 M$ qui permettra normalement au Québec de sécuriser ses approvisionnement en gaz pour l'hiver 2015.

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Le deuxième bouchon est celui de la pointe nord du triangle de l'Est. Et il devrait se former autour de 2017-18, lorsque TransCanada aura converti au pétrole une partie des tuyaux qui transportent actuellement du gaz.

Le premier problème est là. TransCanada se dit prête à ajouter de la capacité, qui permettrait d'assurer les approvisionnements du Québec en hiver, mais il semble qu'elle demandera pour cette nouvelle capacité un tarif supplémentaire en fonction du coût des nouveaux tuyaux (qui sera plus élevé que celui des vieux tuyaux pour lesquels Gaz Métro n'aura plus à payer). Gaz Métro est contre, et estime que ses clients ne devraient pas avoir à payer pour cette nouvelle capacité. Les coûts supplémentaires devraient être à charge des pétrolières ou des clients pétroliers, plutôt que des clients gaziers.

Le deuxième problème: une apparence de surfacturation

Une deuxième pomme de discorde se trouve dans une récente entente signée par Gaz Métro pour désormais acheter au hub de Dawn (Ontario) le 40% du gaz qu'elle n'y prenait pas déjà. Cette démarche a été autorisée par la Régie de l'énergie du Québec de manière à sécuriser les approvisionnements de Gaz Métro et à diminuer les coûts pour les clients québécois.

Le principe en matière de transport par pipeline est que l'on paie un tarif fixe, plus un certain montant en fonction de la distance parcourue. La molécule de gaz coûte plus chère à Dawn que dans l'Ouest, où s'approvisionne encore Gaz Métro pour 40% de ses livraisons, mais la distance à parcourir est nettement moindre (700 km, plutôt que 3700 km). D'où une économie anticipée de plus de 50 M$ pour les clients gaziers québécois (138 M$ au total, en incluant les distributeurs ontariens).

En raison de cette entente, TransCanada perd toutefois des volumes de transport sur le pipeline qui part de l'Ouest jusqu'à l'Ontario. Au même moment, une décision défavorable de l'Office National de l'Énergie quant aux tarifs qu'elle peut facturer sur cette ligne principale vient au surplus de la heurter.

De manière à tenter de récupérer ce qui est perdu, TransCanada a avisé Gaz Métro qu'elle est prête à transporter le gaz de Dawn dans son autre réseau de pipeline, mais au même prix que si ce gaz partait de l'Ouest.

C'est cela, vous voyez bien: les 138 M$ d'économies obtenues pour les clients québécois s'évaporent, et comme le coût de la molécule est plus cher à Dawn, il y a même un risque qu'ils doivent payer plus.

Gaz Métro n'est évidemment pas d'accord. Elle fait valoir que l'Office était au courant de la perte de volume qu'allait occasionner la décision de la société québécoise de s'approvisionner à Dawn. Et que, conséquemment, le tarif doit être celui d'une courte distance.

Ce que doit faire Québec

À propos de ce blogue

Diplômé en droit de l'Université Laval, François Pouliot est avocat et commente depuis plusieurs années l'actualité économique et financière. Il a été chroniqueur au Journal Le Soleil, a collaboré au Globe and Mail et dirigé les sections économiques des différentes unités de Quebecor Media, notamment la chaîne Argent. Au cours de sa carrière, il a aussi fait du journalisme d'enquête ce qui lui a valu quelques distinctions, dont le prix Judith Jasmin. La Bourse Southam lui a notamment permis de parfaire son savoir économique à l'Université de Toronto. François a de même été administrateur de quelques organismes et fondation. Il est un mordu des marchés financiers et nous livre son analyse et son point de vue sur diverses sociétés cotées en bourse. Québec inc. sera particulièrement dans sa mire.

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