Et si les marchés avaient raison de célébrer?

Publié le 06/01/2017 à 17:40

Et si les marchés avaient raison de célébrer?

Publié le 06/01/2017 à 17:40

Les tensions géopolitiques que risque de provoquer le rancunier Donald Trump et ses menaces aux entreprises par gazouillis ont de quoi susciter l’exaspération et même la peur chez bien des observateurs.

Les nouveaux records du S&P 500 et du Nasdaq, le 6 janvier, de même que le flirt de l’indice phare Dow Jones avec la marque symbolique des 20000 points énervent aussi certains financiers qui y voient une euphorie exagérée, dans la foulée des promesses procroissance du président élu.

Pour la semaine, le Dow Jones a gagné 1%, le S&P 500 1,7%.

Cette fois, le secteur de la technologie a participé à l’enthousiasme. Apple(AAPL, 117,91$US) et les titres FANG (Facebook, Amazon, Netflix et Alphabet, en plus de ceux d’Expedia et de Priceline) ont propulsé le Nasdaq à la hausse de 2,6%.

D’autres observateurs constatent que l’encaisse des fonds communs de placement est déjà revenue à un plancher de 5 ans, ce qui fait craindre que leurs gestionnaires ont moins de munitions pour alimenter d’autres gains.

Le ratio qui compare le multiple cours-bénéfices du S&P 500 à l’indice de volatilité est un autre signal de danger, indique Éric Corbeil, économiste en chef de Valeurs mobilières Banque Laurentienne.

Ce ratio reflète un niveau d’optimisme excessif à court terme, similaire aux seuils observés avant les mouvements de repli de décembre 1993, d’août 1990 et de février 2017.


« Les gains sont compréhensibles puisqu’ils proviennent des mesures de relance économique de l’administration Trump. Mais les avancées paraboliques exigent habituellement une période de digestion et je ne crois pas que ce sera différent cette fois, a évoqué le stratège en chef Sam Stovall, de CFRA, à l’agence Reuters. »

Les taux et les Bourses montent pour les bonnes raisons

Mais si les marchés avaient raison de s’apprécier? Après tout, la croissance économique chez nos voisins du Sud et ailleurs dans le monde prend du mieux, si l’on se fie à la remontée synchronisée des plus récents indicateurs des directeurs d’achat (PMI), un peu partout dans le monde.

L’indicateur GDPNow de la Réserve fédérale d’Atlanta prévoit que le PIB américain croîtra de 2,9% au quatrième trimestre.

«L’élan économique mondial est de retour et son impact sur les prévisions de bénéfices est considérable. Le taux de révision des bénéfices des entreprises de l’indice des 42 pays MSCI mondial augmente pour la première en six ans», fait remarquer Stéfane Marion, stratège de la Financière Banque Nationale.

Or, en 2010, les taux américains de 10 ans dépassaient 3%, précise le stratège, insinuant ainsi que la remontée récente des taux est un phénomène cyclique normal.

Quel est le portrait aux États-Unis?

Les bénéfices des entreprises du S&P 500 devraient rebondir de 4,4% au quatrième trimestre de 2016, pour un deuxième trimestre consécutif. Il s'agit de la première fois depuis l'automne 2015 que les bénéfices croissent deux trimestres d'affilée, note S&P Capital IQ. Le consensus colligé par Thomson prévoit une hausse de 6,1%.

Le retour de la croissance des bénéfices devient le carburant essentiel pour la Bourse puisque les multiples d’évaluation se contractent habituellement lorsque les taux d’intérêt remontent.

Les prévisionnistes tablent sur une hausse de 11,7% des bénéfices en 2017, selon S&P Capital IQ.

Où vont les bénéfices, les Bourses devraient suivre, reconnaît d'ailleurs M. Corbeil.

À cet égard, un ratio qui compare la proportion des PME américaines qui prévoient augmenter leurs prix de vente par rapport à celles qui relèveront les salaires pointe vers une hausse des marges de profit, dit-il

La création modérée de 156000 emplois et le bond de 2,9% du salaire horaire (le plus en sept ans) au mois de décembre, aux États-Unis, devraient donner à la Fed la latitude loisir de normaliser ses taux en douceur.

«Le taux de chômage et le salaire horaire justifient deux ou trois hausses du taux directeur en 2017. En même temps, d’autres indicateurs plaident pour une approche graduelle. Le ratio qui compare le taux d’emploi à la population et celui qui mesure la proportion des emplois à temps plein n’ont pas encore retrouvé leur niveau d’avant la crise», explique M. Marion.

Trop d’optimisme à court terme

Les stratèges de Wall Street sont nombreux à prévoir un essoufflement boursier et même un mouvement de repli en raison de la montée rapide des cours et des annales présidentielles.

À court terme, les marchés pourraient trébucher à tout moment parce que des investisseurs seront tentés d’encaisser des gains, dans l’énergie en autres, croit Michael Hartnett, stratège en chef de Bank of America Merrill Lynch.

Pour les prochains trimestres, M. Hartnett reste néanmoins confiant et prévoit de bons gains pour les Bourses et les matières premières.

Celui qui avait prévu que la fin de l’austérité budgétaire des gouvernements donnerait un nouveau souffle aux marchés, cultivera cet optimisme jusqu’à ce que certains signaux lui disent que la fête est finie.

Parmi ceux-ci, M. Hartnett surveille les indicateurs d’un excès d’optimisme dans la répartition des portefeuilles des investisseurs et dans les prévisions de bénéfices, ou encore un durcissement inattendu de la politique monétaire des banques centrales en raison de l’inflation.

Des observateurs font beaucoup de cas de la hausse des taux américains, mais les taux obligataires de dix ans (2,42%) sont à peine 0,25% de plus qu’un an plus tôt, selon Bloomberg.

L’impact de l’appréciation du billet vert sur la compétitivité des exportations américaines et sur la capacité des gouvernements et des entreprises étrangères à rembourser leurs dettes émises en dollars américains inquiète tout autant.

Pourtant, un dollar fort reflète surtout l’appétit pour les actifs américains et améliore la compétitivité de ses partenaires commerciaux, en dépréciant leur monnaie.

Pour sa part, M. Corbeil suit de près le resserrement de l’indice des conditions financières de Goldman Sachs, un mélange du dollar et des taux d'intérêt américains, pour s’assurer qu’il n’étrangle pas trop les entreprises.

 

 

 

À propos de ce blogue

La Sentinelle de la Bourse se veut un blogue pour les investisseurs qui s¹intéressent aux rouages de la Bourse et aux marchés financiers. Son objectif : surveiller et débusquer des repères financiers pertinents pour prendre le pouls des Bourses et ainsi mieux aiguiller les décisions de placement de l¹investisseur.

Dominique Beauchamp
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