Mooney: Vendre à découvert, sport extrême

Publié le 20/05/2013 à 22:05, mis à jour le 21/05/2013 à 06:29

Mooney: Vendre à découvert, sport extrême

Publié le 20/05/2013 à 22:05, mis à jour le 21/05/2013 à 06:29

Photo: Bloomberg

BLOGUE. Vendre à découvert est une activité qui est relativement difficile à saisir pour bien des investisseurs. Cela semble contre-intuitif.

C’est ce que m’a rappelé cette question reçue récemment d’un lecteur. Ce dernier se demande ainsi comment ce type de produit pervers (son expression) pouvait exister et quel était son incidence sur les marchés.

C’est une bonne question.

D’abord, vendre à découvert n’est pas un produit ; c’est une opération comme acheter ou vendre un titre. Dans le cas d’une vente à découvert, l’investisseur vend un titre qu’il ne possède pas dans l’espoir de le racheter à prix plus bas.

Par exemple, je vends à découvert des actions de la société ABC à 10$ (c’est le courtier qui agit comme contrepartie en empruntant les actions) pour les racheter disons à 6$, empochant un profit de 4$ par action.

C’est la théorie.

Je sais que bien des gens se disent philosophiquement contre la vente à découvert pour toutes les sortes de raisons, notamment parce que bien des investisseurs qui la pratiquent vont aussi mener des campagnes négatives pour faire baisser les titres vendus à découvert. Ce qui mène à des abus, entre autres de gestionnaires de hedge funds.

Malgré cela, à mon avis, la vente à découvert a sa place dans les marchés financiers, ne serait-ce que pour faire contrepoids à tous les acheteurs, dont plusieurs ne se gênent pas pour faire leur propre campagne positive pour mousser leurs titres. De ce côté aussi, il y a des abus.

Dans l’ensemble, les vendeurs à découvert font partie des marchés, pour le meilleur et pour le pire.

Par ailleurs, si vous voulez vous enrichir en Bourse, la vente à découvert est la voie archi difficile. Je vous le déconseille fortement.

Pourquoi ? Parce que les lois de la mathématique jouent contre vous, systématiquement. Ainsi, lorsque vous vendez un titre à découvert, votre profit maximum est de 100%, soit lorsque votre titre perd 100% de sa valeur, ce qui est relativement rare, admettons-le. Par contre, votre perte elle est théoriquement infinie, parce qu’un titre à 10$ peut s’apprécier sans limite, vous poussant à la faillite. Imaginez-vous dans la peau d’un investisseur qui a vendu ce titre à découvert et qui le voit exploser à 50$, perdant plusieurs fois sa mise !

De plus, il ne faut pas oublier que vendre à découvert signifie lutter contre le biais systématique de la Bourse qui s’apprécie bon an mal de 8 à 10%.

Encore là, je salue le travail de ces vendeurs à découvert qui arrivent de temps en temps à identifier des abus corporatifs et des fraudes et rendant service à tous les investisseurs.

Ce sujet est d’actualité alors que le marché boursier est en ascension poussant bien des spécialistes de la vente à découvert. Je pense par exemple à Bill Ackman, gestionnaire et président de Pershing Square Capital, qui a vendu plus de 20 millions d’actions de Herbalife à découvert, de façon très publique.

Or, Herbalife a explosé de plus de 10% lundi alors que bien des gens estiment que M. Ackman tente de se couvrir pour limiter ses pertes (se couvrir signifie qu’il doit racheter les actions pour clore sa transaction). Herbalife s’est appréciée de 49% depuis le début de 2013. Selon Bloomberg, environ 23% des actions de Herbalife sont vendues à découvert.

Plusieurs titres ciblées par les vendeurs à découvert se sont fortement appréciés depuis quelques semaines, gracieuseté du marché haussier.

C’est pour cela que la vente à découvert est un sport extrême à éviter.

Bernard Mooney

 

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