Google : «Des taxes arbitraires ne sont pas la meilleure solution»

Publié le 20/09/2018 à 06:30

Google : «Des taxes arbitraires ne sont pas la meilleure solution»

Publié le 20/09/2018 à 06:30

C’est peut-être une coïncidence, mais la semaine dernière, à mi-chemin dans la campagne électorale québécoise (où, de toute façon, on en parle très peu), et à l’aube d’une campagne fédérale (où des analystes pensent qu’on en parlera beaucoup plus), Google a publié les fruits d’une étude commandée à Deloitte intitulée L’impact économique de Google au Canada (2017).

Cet impact prend vraiment toutes sortes de formes. Ça va des 60 000 fourgonnettes Pacifica que Chrysler assemblera à Windsor, en Ontario, afin de permettre à Waymo de tester sa technologie de voiture autonome, au rôle de la plateforme publicitaire AdWords qui permet aux commerçants canadiens «de générer deux dollars en revenus par dollar investi», en passant par l’investissement dans les centres de R-D en IA à Montréal, Toronto et Edmonton.

«C’est quelque chose que nous faisons partout dans le monde, et que d’autres, comme eBay et Facebook font également, de temps à autres», assure Hal Varian, économiste en chef chez Google, en entrevue. «On veut savoir comment les entreprises utilisent nos services.»

Google au Canada et dans le monde

Ainsi, au Canada, on apprend que Google soutient une activité économique annuelle évaluée entre 10,4 et 18,5 milliards de dollars, et aide au maintien de 112 000 à 200 000 emplois à temps plein. À lui seul, l’écosystème d’applications Android permet à quelque 69 000 travailleurs canadiens de générer des recettes de 1,5 milliard $ par an.

Ce que ne fait pas Google au Canada, par contre, c’est imposer la taxe de vente sur les produits qu’elle y vend, notamment la publicité sur ses plateformes numériques. Ça en agace plus d’un, malgré que la situation inverse profite également aux entreprises canadiennes vendant en ligne aux États-Unis, qui estiment qu’il s’agit là d’un avantage déloyal envers les entreprises canadiennes établies dans le même marché.

Québec a déjà l’intention de collecter la TVQ auprès de Spotify, Netfilx, Amazon et iTunes à partir du 1er janvier prochain. Google a confirmé qu'il s'ajoutait à la liste. Plus tôt cet été, un dirigeant de Google au Canada a également admis que si le fédéral lui fait formellement une demande similaire, l'entreprise s'y conformera.

Ottawa demeure réticent à emboîter le pas car, dit-on là-bas, ça fera monter le coût de l’accès à Internet et aux technologies sans fil.

En Europe, l’ambition politique est plus sévère, mais est en train de s’effriter. On souhaite imposer une taxe de 3% sur le chiffre d’affaires en Europe des géants américains de la techno avant la fin de l’année. La France mène la charge. La semaine dernière, l’Allemagne a changé son fusil d’épaule, estimant contre-productive cette «diabolisation» des GAFA. L’Irlande, qui profite du contexte actuel, est contre.

Un poids lourd dans tous les sens du terme

Tous les pays membres de l’OCDE jonglent avec cette patate chaude qu’est l’économie numérique, qui se faufile aisément entre les mailles du filet gouvernemental de l’impôt des sociétés et des taxes de vente locales. Des discussions ont lieu pour harmoniser la situation, mais rien ne bougera avant au moins 2020.

D'ici là, les sociétés comme Google font valoir leur effet bénéfique sur ces économies locales en termes de création d’emplois et de valeur commerciale. «Des taxes arbitraires (comme le 3% européen) ne sont pas la meilleure solution», ajoute M. Varian, qui préférerait que tous s’en tiennent aux discussions en cours du côté de l’OCDE, justement. «Ça ne cadre pas avec la réalité économique actuelle.»

La réalité actuelle fait état d’une économie nord-américaine qui roule à fond de train, et d’un marché de l’emploi qui, lui, commence à tourner à vide. Plus d’un employeur canadien aimerait bien pouvoir rivaliser à moyens égaux avec les géants étrangers qui ont les salaires qu'il faut pour embaucher les meilleurs professionnels... Il y a sans doute là matière à réflexion pour un gouvernement souhaitant égaliser les règles du jeu pour toutes les entreprises, petites et grandes.

Google est, sans conteste, un poids lourd de l’économie numérique au Canada. L’entreprise fait sa part de plusieurs façons, notamment, en offrant publiquement le fruit de ses recherches en IA gratuitement sur son site web. Mais il lui reste encore un bout de chemin à faire.

«La façon dont les PME canadiennes utilisent nos services est assez remarquable», s’exclame Val Harian, en commentant l’étude de Deloitte sur l’impact de Google chez nous. Celles-ci souhaiteraient sans doute pouvoir retourner le compliment à Google.

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À propos de ce blogue

Autrefois, on appelait ça de l'électronique mais de nos jours, les nouvelles technologies vont bien au-delà des transistors et des circuits imprimés. Des transactions bancaires à l'écoute en rafale d'émissions de télé les plus populaires, la technologie est omniprésente. Et elle comporte son lot de questionnements. Journaliste spécialiste des technologies depuis bien avant l'avénement du premier téléphone intelligent, Alain McKenna a observé cette évolution sous tous ses angles et livre ici ses impressions sur le sujet.

Alain McKenna
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