Entrevue n°252: Hélène Boulet Supau, directrice générale, Sarenza


Édition du 13 Juin 2015

Entrevue n°252: Hélène Boulet Supau, directrice générale, Sarenza


Édition du 13 Juin 2015

Par Diane Bérard
D.B. - Les histoires de faillite et de redressement sont parfois douloureuses. La vôtre a son côté sombre aussi...

H.B.S. - Nous sommes deux associés, Stéphane Treppoz et moi. C'est un ami de Stéphane, et cofondateur de l'entreprise, qui l'a appelé à la rescousse. Les créanciers réclamaient la fermeture de Sarenza. Stéphane et moi avons proposé un plan de redressement. Les financiers l'ont accepté... à condition que les trois fondateurs partent et que nous prenions la direction. Ça a été un moment douloureux. Deux des trois associés ont compris, pas le troisième. Une société a des besoins différents selon les étapes de sa vie. Cela s'applique aux compétences de la direction aussi bien qu'à celles du reste de l'équipe. Prenez le cas de notre équipe client. Nous en sommes au troisième directeur en huit ans. Le premier a lancé le service, mais il n'était pas à l'aise dans un rôle de gestionnaire. Le second avait le talent de gérer une petite équipe, mais pas une grande. Depuis que ce service compte plus de 30 employés, nous lui avons donné un nouveau gestionnaire.

D.B. - Avant Sarenza, toute votre carrière s'est déroulée en finance. À quel point ce passé vous a-t-il servi ?

H.B.S. - Il m'a servi et me sert tous les jours. Au bout du compte, il n'y a que le chiffre d'affaires et le cash qui comptent. L'entreprise doit «faire ses chiffres» et avoir suffisamment d'argent pour régler ses factures à la fin du mois. On y arrive avec les bons indicateurs, des prévisions justes et des suivis. Prenez les soldes, il faut bien choisir quoi solder et jusqu'où solder.

D.B. - En septembre 2014, Sarenza a lancé sa propre marque de chaussures. Pourquoi ? Votre site propose déjà 700 marques...

H.B.S. - Les distributeurs ont tous leur marque. Cela permet de combler les lacunes du marché. Notre marque Georgia Rose, par exemple, propose de très petites et de très grandes pointures. Et puis, chaque paire de chaussures de notre marque maison rapporte plus que celles des autres marques, car nous contrôlons tout. Il n'y a pas d'intermédiaire. Mais il faut être stratégique. Sarenza a attendu sept ans avant de lancer Georgia Rose. Il fallait d'abord gagner une légitimité comme expert de la chaussure.

D.B. - Au Québec, les petits détaillants, surtout en région, dénoncent la concurrence déloyale d'Internet. Ils n'arrivent pas à suivre...

H.B.S. - Soyons clairs, je prône l'achat local en boutique avant l'achat Internet. Quand on a un détaillant plaisant et compétent à proximité, c'est lui qu'il faut privilégier. Internet ne peut remplacer le plaisir d'acheter auprès d'un humain. Mais je suis consciente qu'il est exigeant de maintenir des stocks à la hauteur des attentes du client. Et puis, il y a la concurrence des sites Web qui cassent les prix. Ce n'est pas le modèle Sarenza, mais plusieurs sites le font.

D.B. - Le mois dernier, les lecteurs du magazine Que choisir ont nommé Sarenza, premier site de commerce électronique en France. Que cherchent les internautes lorsqu'ils magasinent en ligne ?

H.B.S. - Cela évolue. Il y a quelques années, les clients voulaient du choix. Plus, c'était mieux. Notre moteur de recherche permettait d'établir des sélections en fonction de huit critères différents. Aujourd'hui, les internautes veulent aller vite. Ce n'est plus le choix qui les attire, c'est la personnalisation. Il ne faut leur montrer que les articles qui correspondent à leurs goûts.

D.B. - Vous dites : «Ce n'est pas parce que les choses sont difficiles qu'on ne les fait pas. C'est parce qu'on ne les fait pas qu'elles sont difficiles». Expliquez-nous.

H.B.S. - Pour redresser Sarenza, on a fait des choses complètement dingues. Nous n'avons pas laissé les obstacles bloquer notre redressement. On s'est centrés sur nos objectifs et on a trouvé des solutions. Il faut avancer. Et être prêt à rater des choses, parfois.

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