Des grippés vont-ils mourir à l'hôtel ?

Publié le 26/10/2009 à 11:32

Des grippés vont-ils mourir à l'hôtel ?

Publié le 26/10/2009 à 11:32

Par Olivier Schmouker

Les hôtels vont surtout servir de lieux de consultation. Photo : Bloomberg.

Réserver des hôtels pour y traiter des personnes souffrant de la grippe A(H1N1) fait partie du Plan québécois de lutte contre une pandémie d’influenza mis au point par le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS).

PLUS : Grippe A (H1N1) : des dizaines d'hôtels du Québec transformés en hôpitaux

Il s’agit de la «Stratégie numéro 12 : déployer des sites non traditionnels de soins». Il y est expliqué que des sites non traditionnels – à savoir autres qu’hôpitaux, cliniques et centres de santé – devront être trouvés afin de «prendre en charge la clientèle dont l’état de santé ne permet pas le maintien à domicile». Ces lieux permettront d’assurer «le triage et l’évaluation, de traiter, d’orienter et d’admettre les personnes grippées», peut-on lire dans le plan.

Les cas lourds seront admis à l’hôtel

Concrètement, cela signifie que si les urgences sont débordées – ce qui risque fort de survenir si une pandémie sévit –, les malades dont l’état de santé suscite des inquiétudes seront orientés vers les lieux non traditionnels, essentiellement des hôtels, mais aussi des résidences d’étudiants.

Là, du personnel médical dressera leur bilan de santé. Les cas les plus bénins seront renvoyés chez eux, avec une prescription médicale pour combattre au mieux la maladie. Les cas plus lourds, eux, seront pris en charge dans les chambres d’hôtel. Et les cas graves, directement à l’hôpital.

Pourquoi une telle mesure? Essentiellement parce les hôpitaux manquent de lits, et manqueront de place pour les consultations en cas de ruée vers les urgences.

D’où proviendra le personnel médical affecté dans les hôtels? La réponse n’est pas clairement fournie dans le documents ministériels, mais il est indiqué à droite et à gauche que du personnel à la retraite pourrait être appelé en renfort, tout comme différents services de la sécurité publique québécoise (pompiers, etc.).

Actuellement, des listes sont dressées de «spécialistes habilités à déclarer les décès dans des sites non traditionnels de soins», selon le Plan régional de Lanaudière. Il est aussi prévu de faire appel à des bénévoles «rapidement formés à l’ouverture (des sites non traditionnels de soins)».

Autre problème potentiellement épineux : les branchements informatiques. En effet, il faut que des ordinateurs soient installés dans les hôtels et reliés au réseau informatique de santé du Québec, pour que l’information circule convenablement entre tous les établissements.

De telles installations ne se font pas simplement en claquant des doigts, il faut notamment faire appel à des spécialistes, parfois installer de nouveaux câbles, et prévoir des délais en cas de bogue.

«Des choix tragiques»

Mais, tous ces efforts sont-ils bien nécessaires? Si l’on en croit la documentation du MSSS, cela ne fait aucun doute.

De fait, une pandémie d’influenza provoquera des «bouleversements considérables» sur la population entière : des malades partout, des personnes qui meurent, des contrecoups psychologiques innombrables, une économie qui se met à tourner au ralenti alors qu’elle est déjà plongée dans la récession, etc.

Le ministère a officiellement pris pour hypothèse que 35% des Québécois tomberaient malades lors de la première vague, laquelle devrait durer environ huit semaines.

Le scénario est alors le suivant :

- 2,6 millions de personnes sont infectées;

- 1,4 million de personnes vont consulter;

- 34 000 personnes ont besoin d’être hospitalisées;

- 8 500 personnes en décèdent (au lieu d’un millier pour la grippe saisonnière).

Mais dans ses documents, le ministère indique aussi que l’impact d’une telle pandémie pourrait toucher «jusqu’à 50% de la population». Si un tel scénario s’avérait, l’impact serait donc nettement plus fort…

Le Comité d’éthique de santé publique ne laissait pas non plus de doute sur le drame sanitaire qui risque de se produire, dans son avis émis en 2006 sur le Plan québécois de lutte contre une pandémie d’influenza. «L’éventualité d’une pandémie d’influenza, telle qu’elle est appréhendée, soulève la perpective de choix tragiques», avait-il alors écrit, en soulignant que «la létalité serait élevée» et «les ressources humaines et matérielles, limitées».

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