Valeant: que feront Yves Michaud et nos gouvernements?

Publié le 20/05/2014 à 16:25

Valeant: que feront Yves Michaud et nos gouvernements?

Publié le 20/05/2014 à 16:25

Valeant est-elle un fleuron québécois dont il faut se réjouir, ou plutôt une société avec un faux siège social au Québec qui devrait nous faire pleurer de déception?

C'est un peu cette question que l'on posait, à la mi-avril, alors que la société de Laval lançait une OPA de 45 G$ US en argent et en actions sur la pharmaceutiques américaine Allergan.

Valeant tenait mardi son assemblée annuelle à Laval. L'occasion pour les médias de tenter d'en savoir plus sur la guerre en cours avec le conseil d'administration d'Allergan et sur la riposte qu'elle prépare. L'occasion pour nous de tenter de voir à quel point le Québec compte pour l'entreprise et si elle est à l'aise avec sa stratégie fiscale.

D'abord, un rappel sur les deux principaux agacements qui ont fait surface avec la tentative d'acquisition d'Allergan.

1-La politique d'investissement en R&D

Si Valeant met la main sur Allergan, il est assuré que les investissements en recherche et développement seront significativement coupés. Le dernier scénario de base de BMO Nesbitt Burns estimait que ceux-ci passeraient de 16,5% des revenus à 9%.

D'un point de vue purement capitaliste, le rôle d'une entreprise est de créer de la valeur. L'agacement vient du fait que d'un point de vue socio-économique, le rôle d'une entreprise est aussi de tenter de faire avancer la société en lui apportant de nouveaux produits.

2-La stratégie d'évitement fiscal

Le plus grand agacement attaché à cette tentative de prise de contrôle réside du côté de la fiscalité.

Jusqu'à 45% des coûts que récupérera Valeant si elle met la main sur Allergan pourraient provenir de ce qui est dans le jargon qualifié de "synergies fiscales".

Quel est le taux d'imposition effectif de Valeant?

Moins de 5%.

Quel est le taux d'Allergan?

26-27%.

Plusieurs analystes calculent que Valeant devrait ramener le taux d'imposition d'Allergan autour de 8%. C'est toute une économie. Qui se fera cependant au dépend du contribuable et des services publiques nord-américains.

SUIVRE SUR TWITTER: F_POULIOT

Comment la chose est-elle possible?

En acquérant Biovail, en 2010, Valeant a transféré son siège social des États-Unis au Canada. Elle a aussi décidé d'envoyer ses droits de propriété intellectuelle dans les Bermudes (et a depuis ajouté quelques juridictions fiscales avantageuses comme l'Irlande).

Les revenus qu'elle tire de cette propriété intellectuelle (souvent par licences) sont imposés aux faibles taux des îles. Valeant ne paie pratiquement pas d'impôt au Canada puisque la loi canadienne prévoit qu'une société ayant une filiale offshore dans des juridictions qui coopèrent (au plan du secret bancaire) peut rapatrier leurs dividendes sans impôt.

Dans les dernières années, Valeant a multiplié les acquisitions en tablant sur cette stratégie. Qui a fortement contribué à sa croissance. Pendant ce temps, la plupart des sociétés du secteur continuaient à être imposées autour de 20%.

C'est inéquitable, concluait-on il y a quelques semaines. Pendant que la plupart contribuent au développement de leur milieu, la société de Laval marche en tête de file de l'évitement fiscal.

Qui plus est, ajoutait-on, Valeant n'apparaît pas véritablement très animée de la fibre québécoise. Contrairement aux autres sociétés d'ici, ses communications aux investisseurs (page web, communiqués, rapports trimestriels, etc.) sont uniquement en anglais.

Questions et réponses de Michael Pearson

À propos de ce blogue

Diplômé en droit de l'Université Laval, François Pouliot est avocat et commente depuis plusieurs années l'actualité économique et financière. Il a été chroniqueur au Journal Le Soleil, a collaboré au Globe and Mail et dirigé les sections économiques des différentes unités de Quebecor Media, notamment la chaîne Argent. Au cours de sa carrière, il a aussi fait du journalisme d'enquête ce qui lui a valu quelques distinctions, dont le prix Judith Jasmin. La Bourse Southam lui a notamment permis de parfaire son savoir économique à l'Université de Toronto. François a de même été administrateur de quelques organismes et fondation. Il est un mordu des marchés financiers et nous livre son analyse et son point de vue sur diverses sociétés cotées en bourse. Québec inc. sera particulièrement dans sa mire.

Blogues similaires

Encore trop tôt pour sauter dans l’arène

Édition du 14 Juin 2023 | Dominique Beauchamp

ANALYSE. Les banques canadiennes pourraient rester sur le banc des pénalités quelque temps encore.

Shopify: prochaine victime de la malédiction boursière canadienne?

BLOGUE INVITE. Shopify est-elle différente des Nortel, Research in Motion, Valeant, Barrick Gold et autres?