Mooney: Scientifique ou ingénieur?

Publié le 19/11/2013 à 08:08, mis à jour le 19/11/2013 à 09:02

Mooney: Scientifique ou ingénieur?

Publié le 19/11/2013 à 08:08, mis à jour le 19/11/2013 à 09:02

Photo: Bloomberg

BLOGUE. J’ai une question pour vous : est-ce que vous investissez, est-ce que vous prenez vos décisions de placement de la façon d’un scientifique ou comme un ingénieur? La réponse peut représenter la différence entre le succès et la richesse.

C’est ce que j’ai réalisé lorsque j’ai lu une citation d’Eric Drexler, qui peut mériter le titre de père de la nanotechnologie. Il y a plus de 25 ans, son livre Engines of Creation m’avait vraiment fasciné. Or, dans son plus récent livre intitulé Radical Abundance, il explique les différences fondamentales entre la façon de fonctionner d’un ingénieur et celle d’un scientifique. Et c’est très pertinent pour les investisseurs.

«Si vous présentez à un scientifique des connaissances imprécises ou incomplètes, sa réaction sera de chercher à améliorer son savoir. De son côté, l’ingénieur, de façon routinière, acceptera cette réalité. Est-ce que les prédictions peuvent avoir jusqu’à 10% de possibilité d’erreur et cela pour des raisons mal comprises? Ces raisons peuvent représenter un problème et un casse-tête au scientifique. Pourtant, l’ingénieur a des chances de n’y voir aucun problème du tout. Il ne s’agit que d’ajouter une marge de sécurité de 50% et allons-y. Les marges de sécurité font partie des normes de conception et la connaissance imprécise n’est qu’une raison.»

Lorsque j’ai lu ces mots, je me suis dit, «wow, c’est exactement ce que doit faire le bon investisseur!»

En effet, lorsque vous prenez une décision de placement, que ce soit le choix d’investir dans un titre en particulier ou le montant que vous devez investir en actions par rapport à votre patrimoine, ou encore le montant que vous devez épargner pour prendre votre retraite à tel âge, vous ne possédez pas et vous ne posséderez jamais toute l’information, toutes les connaissances pour éliminer toutes les incertitudes.

Vous pouvez vous faire croire que c’est le cas, mais c’est une illusion. Que vous soyez Warren Buffett ou George Lacraque dans son sous-sol, vous devez décider sans avoir toute l’information. C’est un fait de la réalité humaine.

Cela devrait inciter en vous l’humilité et la prudence, si vous réagissez bien. Par contre, si vous réagissez en paniquant et baissant définitivement les bras, vous faites une erreur.

La clé du succès en Bourse, comme bien d’autres domaines en fait, c’est d’approcher vos décisions exactement comme le fait un bon ingénieur. La première étape est évidemment d’amasser le plus d’informations possible et de trier cette information (une grande partie n’est que du bruit ne devant pas influer votre décision).

Ensuite, une fois que vous avez évalué l’information pertinente, vous décidez en fonction de votre situation en tenant compte du fait que vous n’avez pas 100% de l’information (ce que j’appelle le principe d’incertitude). Vous ne pouvez pas être 100% certain.

Et il faut en tenir compte en ajoutant à tout votre processus une marge de sécurité. Celle-ci peut se retrouver dans une évaluation volontairement plus conservatrice de la société (si on parle d’acheter un titre boursier), dans la pondération initiale que vous donnerez au titre, etc.

Mais il est impératif d’ajouter dans votre façon d’investir ce concept de l’information incomplète. Peu importe votre expérience, vos succès passés, votre génie.

Vous devez gérer sur la base de la meilleure information disponible aujourd’hui ; pas une information parfaite, ni complète.

Ce n’est probablement pas un hasard que plusieurs bons gestionnaires et investisseurs sont des ingénieurs par formation !

Bernard Mooney

 

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