Rogers rachètera-t-il Vidéotron avant que Bell ne fusionne avec Telus?

Publié le 02/05/2018 à 09:05

Rogers rachètera-t-il Vidéotron avant que Bell ne fusionne avec Telus?

Publié le 02/05/2018 à 09:05

Si elle passe, la fusion de Sprint avec T-Mobile aux États-Unis pourrait provoquer la consolidation du sans-fil au Canada.

Remarquez, chez nos voisins du sud, rien n'est encore acquis : les analystes suivant le dossier estiment à 30 pourcent les chances que les autorités fédérales américaines donnent leur aval à cette transaction, qui ferait passer de quatre à trois le nombre de grands fournisseurs de services de télécommunications qu’on trouve au sud de la frontière.

C’est quand même la troisième tentative de fusion entre Sprint et T-Mobile, qui arrivent aux troisième et quatrième rangs de leur marché, derrière Verizon et AT&T. Ces deux derniers représentent chacun environ le tiers du marché américain, tandis que de très petits joueurs régionaux accaparent un autre 10 pourcent.

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À peu de choses près, la situation est la même au Canada. Dans le sans-fil, Rogers est légèrement en tête, avec environ le tiers du marché, comparativement à un peu moins de 30% chacun pour Bell et Telus. Shaw (Freedom Mobile) et Vidéotron, la filiale de Québecor qui fait office de quatrième joueur au Québec, détiennent ensemble moins de 10 pourcent du marché national.

Les chiffres varient si on fait le même calcul en tenant compte d’autres activités de télécommunications ou même des médias (Shaw, Cogeco et d’autres entrent plus lourdement en scène), mais vu l'actualité du secteur, c'est par le sans-fil que ça les choses commenceront à bouger.

La faute à la 5G

Pourquoi? En deux lettres : 5G. Plus d’un observateur estime que le passage à cette cinquième génération de réseaux sans fil équivaut, en plus gros encore, à ce moment dans l’histoire télévisuelle où la couleur a fait son apparition.

C’est, sans conteste, un passage à l’Internet mobile à très haute vitesse, avec un temps de réaction dans les millisecondes, d’un bout du réseau à l’autre.

La croissance pourrait être substantielle pour quiconque aura le premier réseau 5G en place au pays : les voitures autonomes, les villes intelligentes, les objets connectés, pas mal tout ce qui s’annonce comme une technologie du futur reposera, à terme, sur cette technologie.

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Seul hic : le coût associé au déploiement de la 5G est astronomique. Plus important que l’installation des premières antennes 3G, il y a une dizaine d’années. Au-delà des promesses (plutôt absurdes) de coûts réduits pour les consommateurs, c’est cette possibilité de n’avoir à développer qu’un seul réseau 5G pour les deux marques (et ainsi, sauver de précieux sous) qui incite Sprint et T-Mobile à s’unir.

La même chose pourrait arriver au Canada, estime Jeff Fan, analyse torontois de Scotia Capital, qui pense qu’un feu vert à la fusion Sprint et T-Mobile (T-Mint? Sprobile?) par la FCC pourrait inciter le CRTC à revoir sa position sur le nombre de joueurs nécessaires pour des télécoms canadiennes saines.

«Les législateurs canadiens croient à l’importance d’un modèle à quatre joueurs, mais je pense que cette transaction devrait au moins soulever la question de la nécessité de conserver ces quatre mêmes joueurs à plus longue échéance», dit-il. «Si les États-Unis passent à un marché à trois joueurs, pourquoi le Canada devrait-il lui-même demeurer un marché comptant quatre joueurs?» 

Rogers-Vidéotron ou Bell-Telus?

Si on doit éliminer un joueur dans le sans-fil canadien, lequel ce sera? Les rumeurs d’une fusion entre Bell et Telus vont et viennent depuis de nombreuses années. De leur côté, Rogers et Vidéotron ont plusieurs atomes crochus, et un passé qui les rapproche beaucoup.

Shaw pourrait aussi venir brouiller les pistes, mais quand on regarde l’état de son réseau, concentré sur les principales grandes villes à l’ouest de la rivière Outaouais, ça semble moins certain (en plus, son «revenu moyen par utilisateur», un indicateur-clé dans l’industrie, est à peu près moitié moins élevé que celui de ses rivaux, à 37,66$ en 2017).

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Encore une fois, Jeff Fan a sa petite idée là-dessus. Selon lui, les trois gros joueurs canadiens verront leur valeur boursière bonifiée de 10 à 13%, advenant une fusion de leurs deux homologues américains. Pourtant, Québecor demeure son titre favori dans ce secteur.

Est-ce que ça signifie que la société montréalaise pourrait devenir une proie alléchante dans un avenir rapproché? Toute spéculation à ce sujet dépend d’une décision qui sera prise par les autorités américaines sur la fusion entre Sprint et T-Mobile. L’analyste de Scotia Capital pense qu’il serait plus raisonnable de miser sur un partage des infrastructures entre différents fournisseurs canadiens, avant de parler d’acquisition ou même de fusion. On se dirigerait alors vers des réseaux 5G Bell-Telus et Rogers-Vidéotron...

En tout cas, il semble se profiler à l’horizon un beau risque quant à la croissance de la valeur des grands joueurs canadiens du sans-fil. Jusqu’à ce qu’un d’eux se fasse bouffer par un des trois autres…

 

 

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À propos de ce blogue

Autrefois, on appelait ça de l'électronique mais de nos jours, les nouvelles technologies vont bien au-delà des transistors et des circuits imprimés. Des transactions bancaires à l'écoute en rafale d'émissions de télé les plus populaires, la technologie est omniprésente. Et elle comporte son lot de questionnements. Journaliste spécialiste des technologies depuis bien avant l'avénement du premier téléphone intelligent, Alain McKenna a observé cette évolution sous tous ses angles et livre ici ses impressions sur le sujet.

Alain McKenna
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