Sept filles, 28 gars et 3 mois... pour propulser leurs entreprises

Publié le 10/03/2012 à 00:00

Sept filles, 28 gars et 3 mois... pour propulser leurs entreprises

Publié le 10/03/2012 à 00:00

Par Diane Bérard

Montréal a déjà produit de grandes entreprises technos. Elle aspire aujourd'hui à devenir une capitale numérique. Pour cela, il lui faut bâtir une masse critique d'entrepreneurs, mais aussi une communauté autour de ceux-ci. Des investisseurs, des anges financiers, des événements... L'accélérateur d'entreprises FounderFuel contribue à cet écosystème. Pour sa deuxième édition, il accueille 35 jeunes entrepreneurs qui soumettront leur idée d'entreprise au jugement d'une centaine de mentors. À la clé, un financement variant de 20 000 $ à 25 000 $. Les Affaires visitera régulièrement la cuvée 2012 et vous tiendra au courant du cheminement des candidats.

Elliot Yeo, 25 ans, et Angus Woodman, 28 ans, ont quitté St. John's, Terre-Neuve, le 27 février dernier. Pendant trois mois, ils habitent un appartement à l'angle des rues Sherbrooke et Berri, à Montréal. Tous les matins, ils se rendent au 51 de la rue Sherbrooke Ouest, à la maison Notman, pour apprendre comment propulser leur PME vers le succès. Avec 33 autres entrepreneurs Web canadiens, ils participent à la seconde édition du programme d'accélération d'entreprises FounderFuel.

Au lendemain de leur arrivée, ils ont assisté à leur premier «cours». Jon Bradford, cofondateur de l'accélérateur d'entreprises britannique Springboard et mentor chez FounderFuel, s'est adressé à eux par Skype. «Dans deux semaines, vous traverserez «la Vallée de la Mort». Vous aurez été bombardés de conseils. Vous aurez découvert tout ce qui cloche avec votre produit et votre entreprise. Et vous n'aurez plus aucune idée de ce qui va. Vos présentations manqueront de conviction. C'est normal. Vous participez à une expérience professionnelle et personnelle. Mais, rassurez-vous, la Vallée de la Mort a une fin.»

Travail en équipes

Le ton est donné. Les trois prochains mois s'annoncent intenses. Heureusement, personne ne devrait se sentir trop seul, car FounderFuel n'accepte pas de participant individuel, que des équipes. Chacune reçoit un financement de 20 000 $ à 25 000 $. En échange, Real Ventures - le fonds de capital-risque de 50 millions de dollars qui finance FounderFuel - réclame une participation de 6 % dans l'entreprise. Real Ventures compte 50 investisseurs, des personnes aussi bien que des institutions, telles que le Fonds de Solidarité FTQ, Investissement Québec et la Banque de développement du Canada.

Mais les participants ne viennent pas pour le financement. «Nous sommes ici à cause des mentors, confie le Vancouvérois Dan Haugseng, 27 ans. Je connais des gagnants de la première édition. Leurs échanges avec les mentors ont eu un impact important sur le développement de leur entreprise.»

Précieux mentors

La centaine de mentors associés à FounderFuel constitue le coeur de l'expérience. Mais, cette expertise, il faut savoir en profiter. «Ici, nous mettons les ressources au service des participants, explique Ian Jeffrey, directeur général de FounderFuel. À eux de saisir les occasions et de réclamer ce dont ils ont besoin.» Chaque mentor affiche ses heures de bureau, il faut prendre rendez-vous. «Si vous ne demandez pas, vous ne recevrez pas !» martèle Jon Bradford. Premier arrivé, premier servi, comme pour le recrutement des membres du comité aviseur, choisis parmi la centaine de mentors disponibles. Des mentors comme Yona Shtern, pdg de Beyond the Rack ; Sylvain Carle, cofondateur de Needium et de Praized ; et la Torontoise Sarah Prevette, fondatrice de Sprouter.

Le premier mois sera consacré à bâtir ou à valider la stratégie et la vision. Le deuxième, à développer une version bêta du produit ou à raffiner celle qui existe déjà. Le troisième, à amorcer la recherche de capital. Tout au long du programme, un but : se préparer au 23 mai, le Demo Day, alors que les 11 équipes défileront devant les investisseurs pour solliciter du financement.

L'entreprise d'Elliot et d'Angus n'existait pas à la fin de janvier. «Nous voulions nous lancer en affaires, FounderFuel nous a donné la poussée nécessaire», explique Angus. Impossible toutefois de parler de leur produit ni de mentionner le nom de leur entreprise ou de celle des autres participants. Les organisateurs de FounderFuel préfèrent que ces informations demeurent confidentielles jusqu'au Demo Day du 23 mai.

L'équipe de Jérémy Easterbrook, elle, est en affaires depuis octobre 2010. Mais elle a pris un pari : mettre leur entreprise montréalaise en veilleuse trois mois pour se consacrer à temps plein au programme FounderFuel. «Nous comptons beaucoup sur les mentors», confie Anne-Lyse Nivoix, 27 ans, une des trois complices de Jérémy.

L'entreprise des Torontois Jackey Li, Jack Tai et Kevin Wu, continue quant à elle de rouler. «Ce sera un défi de maintenir nos activités tout en profitant de tout ce que l'accélérateur nous offre», concède Jack Tai. Pas question non plus pour les Vancouvérois Kevin Gibbon et Dan Haugseng de prendre le risque de s'arrêter. «Nous avons lancé l'entreprise il y a un an. Des milliers d'utilisateurs ont déjà adopté notre produit», explique Dan. Kevin, lui, veut maîtriser l'art du «pitch». «Je dois devenir un gestionnaire», dit-t-il.

Créer des entreprises durables

Que peut-on espérer de la cuvée FounderFuel 2012 ? Des 104 entreprises qui sont passées par l'accélérateur américain Techstars depuis 2007 (le seul accélérateur à dévoiler ses chiffres), 88 existent toujours, 8 ont été achetées et 8 ont fait faillite. Certaines de ces entreprises sont bien jeunes, certes. Il faudra voir dans cinq ans. Toutefois, même les sceptiques, comme le capital-risqueur californien Jeff Cohn, d'eStrategy Partners, reconnaissent que, si les accélérateurs ne peuvent garantir la création d'entreprises durables, ils contribuent à créer des entrepreneurs Web et à bâtir des communautés numériques. «Et à faire naître des vocations d'anges financiers», ajoute David Cohen, cofondateur de l'incubateur Techstars.

ACCÉLÉRATEUR OU INCUBATEUR ?

Un accélérateur est un programme, alors qu'un incubateur est un lieu, explique John Stokes, associé fondateur du fonds Real Ventures, qui finance l'accélérateur FounderFuel. M. Stokes a été partenaire du fonds Montreal Start-Up, duquel a émergé Beyond the Rack, grand succès montréalais du commerce électronique. «L'incubateur a pour but le partage de services offerts par des consultants rémunérés, alors que l'accélérateur vise le partage d'expérience de la part de mentors, continue John Stokes. Enfin, l'entrepreneur qui participe à un accélérateur doit le quitter au terme du programme. Dans un incubateur, l'entrepreneur part lorsqu'il est prêt.»

UN NOUVEL ACCÉLÉRATEUR PAR JOUR

On trouve 150 accélérateurs d'entreprises dans le monde. Il s'en crée entre 5 et 10 par semaine. On trouve des accélérateurs d'entreprises jusqu'en Chine et en Russie. Quarante d'entre eux, dont FounderFuel, se sont regroupés dans le Global Accelerator Network (globalacceleratornetwork.com).

«Nous avons laissé notre famille, nos amis, notre ville pour venir à Montréal apprendre comment bâtir une entreprise profitable» - Dan Haugseng et Kevin Gibbon, 27 ans, entrepreneurs Web de Vancouver, à propos du programme FounderFuel

FOUNDERFUEL EN BREF

FounderFuel, édition 2012

Plusieurs centaines de candidatures

11 équipes : 4 de Montréal, 1 de Québec, 3 de Toronto, 2 de Vancouver, 1 de St. John's, à Terre-Neuve

35 participants

100 mentors

«FounderFuel n'aurait pas pu voir le jour plus tôt, affirme John Sokes, associé au fonds Real Ventures, qui finance l'accélérateur FounderFuel. Nous avions réservé l'adresse URL depuis 2007, mais il fallait que Montréal soit prête.» Avant FounderFuel, il y a eu Montreal Start-Up, Founders Lounge, Girls Geek, Tech Breakfast... des événements qui ont contribué à la croissance d'un Montréal numérique.

Visionnez la vidéo sur lesaffaires.com/videos

Dans notre numéro du 5 mai

Les moments forts de la cuvée 2012 de FounderFuel, l'avancement des projets et... comment les participants sont sortis de la «Vallée de la Mort» !

diane.berard@tc.tc

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