Montréal est aussi un paradis fiscal

Publié le 20/11/2009 à 18:00

Montréal est aussi un paradis fiscal

Publié le 20/11/2009 à 18:00

Le Centre Financier International de Montréal agit comme paradis fiscal. Photo : LesAffaires.com

Chronique. Les paradis fiscaux n'ont pas été épargnés par la crise financière. Ils ont été propulsé à l'avant-scène alors que plusieurs pays ont multiplié les tentatives pour restructurer leur système financier. Pour être crédibles dans leur démarche, ces pays n'ont pas eu le choix d'adopter la ligne dure envers ces États qui offrent de généreux avantages fiscaux aux entreprises et aux personnes fortunées.

Par exemple, la Suisse a plié devant le fisc américain qui réclamait les noms de quelque 4 450 clients de la banque UBS soupçonnés de fraude fiscale.

Le rôle des paradis fiscaux

C'est facile de saluer ces initiatives. Trop facile, car la réalité est plus complexe.

Ces paradis ont un rôle à jouer. Ils entraînent une compétition saine entre les pays, en les forçant à freiner leur avidité en matière d'imposition. Car voyez-vous, même les États ont besoin de concurrence !

Malgré cet aspect, les paradis fiscaux sont unanimement dénoncés. Si nous nous entendons si facilement sur ce point, c'est pour la simple raison que nous sommes hypocrites. Quand c'est nous, c'est bon et vertueux; quand c'est eux, c'est mal et vicieux !

Par exemple, presque personne ne remet en question le Centre Financier International de Montréal (CFI-Montréal). Et pourtant...

CFI-Montréal agit comme paradis fiscal pour les sociétés financières. Créé en 1986, à l'initiative du ministère des Finances du Québec en collaboration avec la Bourse de Montréal et la Ville de Montréal, le CFI vise à promouvoir la métropole en tant que centre financier international grâce à un programme d'avantages fiscaux attrayants. Le programme vise à faciliter l'établissement et le développement de sociétés spécialisées dans les transactions financières internationales, ce qu'on appelle des centres financiers internationaux (CFI). Il permet l'exemption partielle du bénéfice net des sociétés et des sociétés de personnes. Il accorde aussi des déductions fiscales aux employés de ces sociétés.

Il y aurait maintenant 118 sociétés qualifiées CFI dans la région montréalaise, par rapport à 45 en 1997, indiquait récemment le pdg par intérim, Jacques Girard, au Journal de Montréal.

L'intention paraît noble, n'est-ce pas ? Qui s'oppose au développement de la principale ville du Québec ? D'ailleurs, les partisans de CFI-Montréal vous diront que cet organisme a réussi à attirer plusieurs institutions financières internationales, comme la Société Générale, de France.

Évidemment, il ne faut pas oublier qu'on les attire en leur procurant des avantages fiscaux majeurs, comme le font les paradis fiscaux traditionnels.

Deux poids, deux mesures

Mais pourquoi est-ce justifié quand c'est nous qui utilisons des incitatifs fiscaux pour attirer des investisseurs et des sociétés financières, et que cela ne l'est plus lorsqu'il s'agit des îles Caïmans, de la Suisse ou du Liechtenstein ?

Parce que c'est légal ? Je vous rappelle qu'il est légal de s'établir dans les paradis fiscaux, comme les îles Caïmans. Mais si vous apprenez que telle société y a établi une filiale ou que tel individu y a ouvert un compte, vous présumerez automatiquement qu'il y a anguille sous roche.

Pourtant le délit ne se situe pas là, mais dans le fait de ne pas déclarer tous ses revenus, quelle que soit leur provenance. Dans ce sens, les travailleurs au noir sont dans le même bain que l'investisseur offshore, qui ne déclare pas non plus tous ses revenus au fisc.

Un aspect moins connu

L'autre aspect moins connu du CFI, c'est qu'il permet à plusieurs institutions d'ici d'économiser de l'impôt sans que personne ne s'en aperçoive. Parmi la liste des sociétés certifiées comme CFI, on trouve des noms comme Scotia Capitaux, BMO Banque de Montréal, Banque CIBC, Caisse centrale Desjardins, etc. Autrement dit, le CFI a attiré à Montréal des institutions qui s'y trouvaient déjà. Ironique, n'est-ce pas ?

En fait, plusieurs sociétés financières canadiennes ont créé des filiales étrangères afin d'être admissibles aux avantages fiscaux du CFI. En faisant passer des transactions par cette filiale étrangère, elles réduisent leur fardeau fiscal. Dans ces cas, l'avantage réel pour l'économie montréalaise est quasiment nul, tandis que le gouvernement du Québec, pour sa part, perd des revenus fiscaux.

Il y a un nom pour cela : le bien-être social financier.

Je ne dis pas que c'est mal. Je dis qu'on devrait se questionner quant à la pertinence d'un tel programme. On devrait également se regarder bien froidement dans le miroir avant de jouer les vierges offensées devant les bénéfices fiscaux qu'offrent d'autres pays.

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