Le plus célèbre des personnages de Shigeru Miyamoto, et de tout l'univers du jeu vidéo, Mario.
BLOGUE. C'est une petite bombe pour l'univers du jeu vidéo qu'a lâchée Wired cette semaine: Shigeru Miyamoto, ce qui se rapproche le plus de Steve Jobs chez Nintendo (qui se rapproche elle-même le plus d'Apple dans cet univers), change de rôle.
M. Miyamoto est l'âme même de Nintendo. Il est le père du célèbre « Mario », de loin le personnage de jeu vidéo le plus populaire, et le plus lucratif, de l'histoire. Il est aussi derrière un paquet d'autres succès immenses de Nintendo, dont la série Zelda et la console Wii, qui a modifié à jamais le marché en introduisant la détection de mouvements comme façon de rejoindre un public plus large.
Nintendo, en tant qu'entreprise, ressemble aussi beaucoup à Apple, sur plusieurs points. D'abord, elle oeuvre à la fois dans les domaines du logiciel (les jeux) et du matériel (les consoles). Et un peu comme Apple, elle n'est à peu près jamais aussi bien servie que par elle-même: les meilleurs jeux pour des consoles Nintendo sont à peu près toujours conçus par Nintendo.
L'entreprise bénéficie elle aussi d'un culte puissant et étonnant. On les rencontre moins souvent si on ne s'intéresse pas aux jeux vidéo, mais les mordus de Nintendo sont nombreux et ils sont au moins aussi intenses dans leur dévotion que ceux d'Apple.
Je ne crois pas que ni l'un, ni l'autre ne serait gêné si on comparait M. Miyamoto à Steve Jobs. Du moins pour le côté créatif. J'ai déjà eu l'occasion de rencontrer M. Miyamoto en privé à deux ou trois occasions, ainsi que de le voir donner des présentations, et bien que la langue soit évidemment un obstacle, on ne peut assurément pas dire qu'il dispose du même talent de « showman » que Jobs. Nintendo a quelqu'un d'autre pour ça, le président de sa division américaine, Reggie Fils-Aimé.
Une tendance lourde
À Wired, M. Miyamoto a expliqué quitter son poste de responsable des grands projets chez Nintendo pour se concentrer sur de plus petites aventures.
Dans ce cas, le créateur de génie n'invente rien. Il est plutôt à la remorque d'une tendance que l'on voit se dessiner un peu partout dans cette industrie. Pour des raisons évidemment différentes, tant les entreprises que les individus eux-mêmes tendent à délaisser les projets immenses pour favoriser de plus petits desseins.
Du côté des entreprises, on aime leurs budgets nettement plus modestes et les impacts corollaires sur le niveau de risque. C'est vrai aussi pour les individus, qui profitent de la moins grande pression venant avec le niveau de risque plus faible pour laisser libre cours à leur imagination et accoucher d'idées plus audacieuses. Ils aiment aussi pouvoir changer de projets plus fréquemment.
Nintendo a l'un des cycles de développement les plus lents de l'industrie pour ce qui est des jeux. M. Miyamato a souvent planché jusqu'à cinq ans sur un jeu avant de le lancer. On devine que ça use son homme.
L'entrevue de Wired donne aussi un aperçu sur la façon dont M. Miyamoto a préparé la relève, une tâche toujours délicate qui l'est encore plus dans un rôle créatif. Une tâche dont on ne sait toujours pas si on aura réussi à s'acquitter chez Apple, par ailleurs.
Ainsi, il semble que M. Miyamoto n'a eu de cesse de répéter à ses jeunes subalternes qu'il allait se retirer au cours des derniers mois.
« La raison pour laquelle j'insiste à ce point est que, à moins que je dise que je vais me retirer, je ne peux pas les préparer, a-t-il expliqué. Après tout, tant que je reste en poste, il y a toujours une relation et les jeunes sont toujours dans une position où ils doivent se plier à mes idées. Mais j'ai besoin de gens qui grandissent beaucoup plus qu'aujourd'hui. »
Il sera intéressant de suivre, au cours des deux ou trois prochaines années, l'impact de ce changement chez le plus grand éditeur de jeux vidéo au monde. Les grands projets en souffriront-ils? Verra-t-on apparaître une série de petits produits révolutionnaires signés Miyamoto?
