Le retour des jeunes est souhaité dans plusieurs régions qui, malgré le chômage élevé, font face à un manque de main-d'oeuvre spécialisée et à un problème de relève.
" C'est assez facile d'avoir du personnel d'usine. Comme beaucoup de moulins ont fermé, on réussit à engager des employés en foresterie qu'on forme pour construire des maisons. Mais on a des problèmes à trouver des employés spécialisés, comme des techniciens en architecture ", dit Stéphane April, pdg du fabricant de maisons usinées Batitech, de Cabano.
Miralis, un fabricant d'armoires de cuisine de Rimouski, recherche depuis plus de deux ans des informaticiens et une personne pour assumer la direction des ressources humaines.
L'entreprise tente d'attirer les jeunes " en leur vantant non seulement les emplois possibles, mais aussi la qualité de vie ", indique Daniel Drapeau, directeur général de Miralis, qui est lui-même revenu à Rimouski après des séjours à Québec et à Montréal.
Devenir propriétaire
Toutefois, " l'absence de transport en commun et le manque de logements locatifs expliquent en partie les difficultés à combler les emplois disponibles en région ", souligne Serge Ouellet, en précisant que la ville de Rimouski tente de régler ces problèmes.
Autre difficulté : " Soit le conjoint ne veut pas suivre, soit il a peur de ne pas se trouver d'emploi ", ajoute M. Drapeau.
La solution se trouve peut-être du côté de l'entrepreneuriat. Les régions ont beaucoup à offrir en matière d'accompagnement. " En Gaspésie, nous travaillons depuis des années à soutenir la relève en affaires ", soutient Étienne Bouchard, directeur général du CLD de la MRC de Bonaventure. En 2009, plus de 50 % des 555 000 $ investis par le CLD dans des entreprises du territoire ont visé des projets de relève.
Encore faut-il trouver des gens prêts à prendre la relève, particulièrement chez les jeunes qui n'ont pas grandi dans un environnement d'entrepreneurs. La région devra aussi attirer des immigrants. " Beaucoup d'entrepreneurs ne sont pas encore prêts. Mais le besoin créera l'ouverture ", estime Éloïse Harvey, présidente du fabricant saguenéen d'équipements Mecfor, en précisant que les régions doivent se doter de structures d'accueil pour favoriser la venue d'entrepreneurs immigrants.
Le manque de liens entre les vendeurs et les acheteurs d'entreprises nuit aux chances d'en assurer la transmission. " Il y a des repreneurs sur le marché, des gens qui se disent prêts mais qui ne connaissent pas les entreprises à vendre ", note Chantal Pilon, directrice générale de la Société de promotion économique de Rimouski.
Un problème de financement
Le financement peut toutefois poser problème. " En région, l'accès à des capitaux comme des anges financiers ou du capital de risque se fait rare ", dit Stéphane April, pdg du constructeur de maisons usinées Batitech créé à Cabano il y a quatre ans. De plus, " le système de financement est toujours long et complexe. Il fonctionne à l'inverse de l'entrepreneur qui agit rapidement et simplement ", affirme Jean-Marie Perreault, un entrepreneur en série de Montréal qui s'est installé en Gaspésie où il a lancé navigue.com.
" Les jeunes qui sont prêts à se lancer en affaires ou à prendre la relève se font dire par des banquiers qu'ils n'ont pas d'historique de financement, qu'ils manquent d'expérience ", souligne Marc Lamy, conseiller en services aux entreprises au bureau d'Emploi-Québec à Saguenay.
" Les banquiers sont toujours prêts à nous offrir un parapluie quand il fait beau, mais celui-ci se referme quand il pleut ", illustre Mme Harvey, qui se prépare à prendre la relève de son père.
pierre.theroux@transcontinental.ca
